“Paroles d’Experts” de Faïçal Tadlaoui : Réforme de la Moudawana V2

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C’est parti pour la réforme très attendue du Code de la famille. Ce grand chantier législatif a été relancé à travers la Lettre Royale du 26 septembre 2023, adressée au chef du gouvernement. Le roi attend des “propositions d’amendement” après concertation avec la société civile, dans un délai de 6 mois. Alors, comment imaginer une deuxième réforme de la Moudawana ? Les avis de Amina Lotfi, Présidente de l’Association Démocratique des Femmes du Maroc (ADFM), et Najia Tak Tak, avocate au barreau de Casablanca, spécialiste du Code de la famille.

 

Six mois. C’est le délai fixé par le souverain au gouvernement pour faire des propositions de réforme du Code de la famille. Un délai qui sonne comme un ultimatum, note Faïçal Tadlaoui qui rappelle que cette réforme concerne tous les Marocains dans leur quotidien : le mariage des mineurs, la polygamie, l’héritage, la tutelle, la pension alimentaire ou la garde des enfants.

Il y a en effet urgence selon Amina Lotfi  car il faut «harmoniser le code de la famille avec notre constitution».  Et dénonce au passage «un retard de douze ans» sur ce dossier. Il s’agit également d’harmoniser nos lois avec les engagements internationaux du royaume.

«Le Code de la famille a vingt ans, il a passé l’âge de l’adolescence, il doit être majeur et correspondre mieux aux besoins de la société», souligne pour sa part Najia Tak Tak, avocate au barreau de Casablanca. Ce Code qui était révolutionnaire a fini par soulever un mécontentement chez bon nombre de personnes, reconnait-elle. Pour certains, la Moudawana a fait exploser le nombre de divorces alors que d’autres trouvent que les réformes ne vont pas assez vite, explique-t-elle.

Exemple : le mariage des mineurs. Malgré son interdiction depuis 2004, l’article 20 autorise toujours le mariage précoce des jeunes filles âgées de moins de 18 ans. Faut-il l’autoriser en cas de grossesse d’une mineure ? La question fait débat : l’interdire complètement risque de créer un problème social, avertit Maître Tak Tak. Cela va à l’encontre des droits de l’enfant rétorque la présidente de l’ADFM pour qui l’âge du mariage doit rester fixé à 18 ans.

Pénaliser la polygamie

Autre sujet sensible, la polygamie. Les associations féministes réclament son interdiction et sans dérogation possible pour protéger la première femme de l’injustice et de la violence psychique, économique et parfois physique. Nos invitées vont encore plus loin : il faut l’interdire et même la pénaliser !

Le phénomène prend hélas de l’ampleur constate notre avocate : «A Casablanca par exemple, on a de plus en plus de demandes d’autorisation de polygamie. Et dans la plupart des cas, la première épouse accepte de peur d’être marginalisée. On a carrément des audiences entières consacrées à la polygamie.»

Amina Lotfi suggère le lancement d’une étude nationale pour mesurer l’impact désastreux de la polygamie sur la vie des familles et de la société dans son ensemble.

Garde partagée

Quant au divorce, rien à redire pour ce qui concerne les divorces par «commun accord» et celui du «chikak», quand la femme demande le divorce. Dans ce dernier cas, la femme se met en situation de précarité, car elle est non seulement considérée comme fautive et mise au ban de la société, mais elle ne recevra pas d’indemnités. Et si la femme divorcée conserve la garde des enfants, celle-ci peut lui être retirée si elle décide de se remarier.

Les associations féministes dénoncent depuis toujours les articles 173 et 175 du Code de la famille et réclament des mesures permettant à la femme remariée après le divorce de bénéficier de la garde partagée.

«Cette garde devrait être discutée et décidée entre les deux parents. En cas de désaccord, le nouveau Code de la famille devrait prévoir des mesures qui prennent en compte l’intérêt supérieur de l’enfant», estime pour sa part Amina Lotfi.

Autre blocage : la tutelle légale qui est systématiquement attribuée au père des enfants. Une situation qui pose beaucoup de nombreux administratifs à la mère qui les garde notamment pour ce qui concerne leur scolarité ou des voyages hors du territoire national.

Rendez-vous donc dans 6 mois.

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