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“Paroles d’Experts” de Faïçal Tadlaoui. Chaos politique en France: quelles répercussions pour le Maroc ?
Publié leLes élections européennes qui ont vu la percée de l’extrême droite en France ont eu pour conséquence la dissolution de l’Assemblée nationale et plongé la France dans une période d’incertitude. Le succès du Rassemblement National (RN) va-t-il se confirmer aux prochaines législatives ? Quelles répercussions pour nos compatriotes sur place ? Quel impact sur les relations avec le Royaume et quid de la marocanité du Sahara ? Les pistes de réponses de Abdelghani Youmni, économiste et professeur à l’Université Mundiapolis, et Abdellah Tourabi, journaliste politique et éditorialiste.
Abdelghani Youmni, économiste et professeur à l’Université Mundiapolis, ne cache pas sa surprise après la décision d’Emmanuel Macron de dissoudre l’Assemblée, “un acte qui a semé la consternation même au sein de sa propre majorité”. Cette initiative, perçue par certains comme une réaction impulsive, et par d’autres comme une manœuvre politique risquée, vise peut-être à redéfinir les alliances et les équilibres de pouvoir au sein de la République, souligne t-il.
Abdellah Tourabi, journaliste politique, critique l’approche autoritaire de Macron, suggérant que des compromis auraient été possibles avec la droite traditionnelle pour éviter cette crise. Selon lui, cette démarche révèle un penchant monarchique du président, mettant en avant un pari politique qui pourrait avoir des conséquences durables pour la politique intérieure française.
La question de la mobilité est au cœur des préoccupations, notamment en raison de l’importante diaspora marocaine en France, qui compte près de 1,8 million de résidents et 50.000 étudiants. Un durcissement des politiques de visa et de regroupement familial pourrait directement impacter ces communautés. Tourabi rappelle l’effet néfaste de la circulaire Guéant en 2011, qui avait déjà restreint les possibilités pour les étudiants étrangers en France, signalant que des mesures similaires pourraient se reproduire.
Sur le plan économique, Youmni met en garde contre le risque de protectionnisme accru, prôné par les factions les plus radicales du RN. Une telle politique pourrait par exemple menacer les investissements français dans des secteurs clés comme l’aéronautique et l’automobile, essentiels pour l’économie de grandes villes marocaines telles que Casablanca, Tanger ou Kénitra.
Reconnaissance du Sahara
La question de la souveraineté du Sahara sera scrutée bien sûr par tous les observateurs avec une attention particulière portée aux positions parfois ambiguës de certains membres du RN. Le Royaume peut tout de même compter sur des figures comme Éric Ciotti qui a passé une alliance avec le RN et qui s’est déjà exprimé pour la marocanité du Sahara. Pour Tourabi, la haine viscérale qu’entretient le RN avec le voisin algérien peut contribuer à un rapprochement avec le Maroc mais de côté, Youmni met en garde contre toute concession qui pourrait compromettre les principes fondamentaux du Maroc: « Le Maroc ne laissera jamais ses ressortissants de faire maltraiter sans réagir . »
Face à ces défis, il apparaît crucial pour le Maroc d’anticiper les évolutions politiques et d’adapter sa stratégie diplomatique et économique. Youmni souligne l’importance de préserver la place de la langue française et l’éducation à la française au Maroc, qui pourraient être remises en question par un changement radical de politique en France. Tourabi, quant à lui, rappelle la capacité du Maroc à maintenir un cap stable grâce à la vision à long terme du Roi Mohammed VI, tout en soulignant que certains comportements xénophobes et isolationnistes seraient diplomatiquement inacceptables.
La relation historique entre le Maroc et la France, bien que riche, doit s’adapter aux nouvelles réalités politiques. Alors que la France navigue à travers cette période tumultueuse, le Maroc se doit de rester vigilant et prêt à ajuster sa politique en conséquence, et ce, quel que soit le résultat des futures échéances électorales en France.