Baptisé “Bailar Larache”, le premier festival de danse de la ville du Nord du Maroc…
Vidéo. Zoom sur la danse afro, style urbain très en vogue au Maroc
Publié leAu Maroc comme dans le reste du monde, la danse afro attire de plus en plus d’adeptes. H24Info est allé assister à un cours de danse de Joyce Stanley, professeur congolais de danse afro au Maroc.
La danse afro (afrodance en anglais) a conquis les coeurs et surtout les corps bien au-delà du continent africain. Plus une semaine ne se passe sans qu’un nouveau challenge de danse afro fasse son apparition sur les réseaux sociaux, repris par des adeptes du monde entier. Elle fait partie des danses urbaines actuelles les plus en vogue.
Voir cette publication sur Instagram
Si des cours de danses africaines traditionnelles avaient déjà lieu au Maroc à partir de 2009, la danse afro débarque pour la première fois il y a environ une dizaine d’années. En 2015, son enseignement se développe avec des pionniers dans le royaume comme Stella à Casablanca et Gérard à Marrakech. Et depuis 2018-2020, cela se généralise dans les salles de sports et écoles de danse.
Parmi les professeurs actuels les plus actifs, on cite Joyce Stanley, qui a commencé à enseigner au Maroc en 2017. Nous le rencontrons avant l’un de ses cours pour discuter du phénomène. La danse afro, qu’est-ce que c’est déjà? « C’est plusieurs danses africaines regroupées dans une seule case avec une touche moderne, urbaine. On retrouve plusieurs rythmes, danses de plusieurs pays africains comme le Congo, le Gabon, le Sénégal, la Côte d’Ivoire, etc. », explique le danseur-chorégraphe de 24 ans.
Son succès est du dans un premier temps à la popularisation de la musique affiliée qu’on nomme l’afrobeat, grâce à des chanteurs comme Papa Wemba, Werrason (Congo-Kinshasa), Roga-Roga (Congo-Brazzaville), ou encore Burna Boy, Wizkid (Nigeria), qui ont joué dans de grands festivals internationaux. « A partir de 2016, l’afrodance a bénéficié d’une visibilité extraordinaire à travers le monde », poursuit Joyce Stanley.
Et au Maroc aussi. « Il y a une bonne réception de la part des Marocains qui sont fous amoureux de la danse afro », s’enthousiasme l’artiste que nous interviewons un lundi soir, juste avant son cours hebdomadaire dans l’une des écoles de danse réputées à Casablanca. Plusieurs dizaines d’élèves affluent à son cours, certains depuis plusieurs années, d’autres qui découvrent.
« La scène marocaine demande de la danse afro »
« J’ai commencé l’afrodance en 2019, d’abord en regardant des vidéos. J’ai aimé l’ambiance, j’ai donc poursuivi l’apprentissage avec des ateliers et des cours réguliers », témoigne Khalid, élève du cours de danse afro de Joyce. » Mon objectif: élargir la communauté des danseurs afro au Maroc, car on n’en trouve pas beaucoup comparé au hiphop et au breakdance », ajoute-t-il.
De son côté, Quentin, Français résident au Maroc, a commencé à suivre ce cours il y a deux ans. Ce qui lui a plu: « cette énergie, cette bonne humeur… ». « C’est un vrai défi au niveau des pas, l’apprentissage des chorégraphies et l’énergie qu’il faut mettre, mais avec de l’entraînement, on y arrive ». Shanon, résidente américaine, aime l’afrodance pour « son style, sa rapidité et sa musique ». « J’ai choisi l’afrodance car j’ai vécu au Sierra Leone, et je vis maintenant au Maroc », précise la jeune femme.
« Aujourd’hui, la scène marocaine demande de la danse afro comme partout dans le monde. La danse afro, même africaine, est l’avenir du monde entier dans le domaine de la danse, car quand tu danses l’afro, tu peux danser toutes les danses », renchérit Joyce Stanley qui a fondé sa propre compagnie de danse afro « Team Afro Maroc », composée d’une dizaine de danseurs professionnels qui se produit un peu partout sur le territoire marocain.
Lire aussi : Musique. Jawi: « Le lien entre le gnaoua et l’électro, c’est la transe »
Les artistes qui l’inspirent? « Il n’y a pas d’artistes en particulier qui m’ont inspiré ou m’inspirent. Pour créer mes mouvements, je m’inspire de la nature, cela peut être un surfeur, un bateau qui passe… Par contre, je suis passionné et impressionné par le travail de certains chorégraphes: Mickael Jackson bien sûr, j’adore aussi les Twins, les freestylers Diablo et Stalamuerte, Dj Arafat pour le coupé-décalé, une Américaine, Parris Goebel, qui chorégraphie tous les projets de stars, notamment Chris Brown… », énumère le danseur.
Originaire de Pointe-noire, ville économique de la République du Congo, Joyce Stanley s’est formé en autodidacte et a découvert sa passion pour la danse un peu par hasard. A l’âge de 11 ans, en rentrant chez lui, il tombe sur une répétition de danseurs hip-hop de son quartier. Ces derniers le prennent sous son aile et l’enfant apprend très vite, à tel point qu’il s’ennuie et commence alors à se former tout seul, notamment via des vidéos mais aussi des ateliers dans plusieurs pays.
« J’ai suivi beaucoup d’ateliers au Maroc avec des professeurs internationaux comme nationaux, j’ai également fait un stage à l’Ecole des Sables au Sénégal. Quand je voyageais, j’aimais découvrir les danses différentes de mon pays. Par exemple, quand je suis allé chez ma tante en Angola, j’ai vu qu’il y avait des danseurs d’afrohouse, je m’y suis directement intéressé », raconte Joyce Stanley.
Et de préciser: « J’ai commencé par le hiphop car la danse afro on la danse tous les jours, c’est dans la culture. J’étais intéressé par le hiphop étant petit, puis vraiment attiré par la danse africaine. Jusqu’aujourd’hui, je danse toujours le hiphop, le contemporain et l’afro ».
« Je suis tombé amoureux du Maroc »
« L’enseignement, je ne l’ai pas choisi. C’est venu à moi car mon entourage me poussait, me disait que j’étais fait pour ça. Dans mon pays, j’avais une facilité à organiser des chorégraphies avec des groupes, à prendre le lead, donc je me suis formée en techniques d’enseignement car enseigner est un véritable atout », poursuit-il.
En 2016, le jeune danseur rend visite à sa grand-mère au Maroc pour de simples vacances. Il ne s’attendait pas à ce que ce soit le point de départ d’une longue histoire d’amour avec le pays. Pour rassurer sa mère, il entame à Tanger une formation d’une année en informatique mais aussi en management commercial, avant de prévoir de rejoindre son père en France. Le destin en a voulu autrement.
Lire aussi : Vidéo. Billet d’humeur, le quatuor électro qui a enflammé Tanjazz
« Je suis tombée amoureux de l’ambiance marocaine, du Maroc. Je m’organise ici en tant que danseur et ma réputation me suit, je me fais repérer très vite », reprend l’artiste qui commence à enseigner en 2017 à Tanger, au centre culturel Tabadoul ainsi qu’au centre Caritas qui accueille les migrants. Il chorégraphie la même année le Festival International des Musiques du Monde et des Arts d’Afrique de Tanger (WOMAAF) qui invite des artistes de renommée internationale comme Youssou Ndour, Saida Fikri, Marième Fall. C’est le premier festival qu’il chorégraphie au Maroc.
Pour passer les castings de plusieurs productions, Joyce Stanley descend s’installer à Casablanca. Entre temps, il commence déjà à donner plusieurs stages et ateliers dans tout le royaume. 2019 enregistre un événement important dans sa carrière: l’un des chorégraphes marocains les plus emblématiques, Khalid Benghrib, le sélectionne pour danser aux Jeux africains de Rabat. Il le choisit dans la foulée pour intégrer sa troupe, 2K-FAR, qui bénéficie de plus de 20 ans d’expérience dans la danse contemporaine avec des tournées au Maroc et à l’international, particulièrement en Europe.
Voir cette publication sur Instagram
« Je fais partie de ses deux dernières créations: L’Haal (Violet) qui a été présentée en Hollande cet été et qui tourne dans toute l’Europe et au Maroc, et Zreq (Bleus) qui sera bientôt en tourné dans tout le Maroc », confie l’artiste qui participe aussi actuellement avec la compagnie de Khalid Benghrib au projet Manbet.
« Il s’agit d’un projet adressé aux professionnels comme aux non-danseurs durant lequel une formation est donnée par 11 professeurs de diverses disciplines, dont moi pour la danse afro. C’est un programme totalement gratuit, dans le cadre de Rabat capitale africaine de la culture 2022 et en partenariat avec le ministère de la Culture », complète Joyce Stanley.
Voir cette publication sur Instagram
Après ses réussites, plus question de rejoindre la France ou de s’engager dans une autre voie professionnelle. D’ailleurs, ses projets ne se limitent pas à la danse stricto sensu. Le jeune talent enchaîne les collaborations artistiques mais aussi publicitaires pour de grands groupes en Afrique, un aspect qui a contribué à sa popularité sur les réseaux sociaux.
« Mes parents ont finalement accepté ma voie quand ils ont vu que je gagnais de l’argent avec la danse, ce qui est une chance extraordinaire parce que c’est très difficile de gagner sa vie avec la danse en Afrique, même si personnellement, je ne suis pas d’accord. Les personnes qui croient à certains stéréotypes pensent que l’on ne va rien faire avec la danse, c’est faux. Il y a l’enseignement, les compagnies, les projets… Tu peux mieux gagner ta vie que pleins de personnes diplômées et salariées », argumente le jeune homme qui par ce discours, souhaite envoyer un message d’espoir à ceux qui veulent vivre de la danse en Afrique.
« C’est possible. Comme dans tout domaine, il y a des difficultés, mais la chance qu’on a dans la danse, c’est d’être indépendant. Ce n’est pas impossible de vivre de la danse; pour réussir, il faut se faire accompagner, bien s’entourer, se structurer et surtout le plus complexe, se distinguer », conclut Joyce Stanley.