E-commerce: le consommateur est-il suffisamment protégé par la loi?

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. Depuis la propagation du virus, l’e-commerce au Maroc a connu une véritable évolution. DR.

Comme pour de nombreux pays à travers le monde, le Maroc connaît une numérisation rapide dans le domaine des paiements sur internet. Selon le dernier rapport du Centre interbancaire de la monétique (CMI), les consommateurs marocains adoptent de plus en plus les paiements numériques, ce qui permet au Royaume de s’aligner sur la tendance mondiale. Mais ces transactions sont-elles bien encadrées par la loi ? Eclairage.

Pandémie oblige, les pratiques commerciales ont changé. Depuis la propagation du virus, l’e-commerce au Maroc a connu une véritable évolution. De janvier à septembre 2021, les sites marchands et sites des facturiers affiliés au CMI ont réalisé 14,9 millions d’opérations de paiement en ligne via cartes bancaires, marocaines et étrangères, pour un montant global de 5,7 milliards de dirhams (MMDH).

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Une année après, les paiements en ligne par carte bancaire ont encore davantage explosé dans le Royaume. Selon les chiffres présentés par l’agence, ces derniers ont augmenté de 34,3% en termes de nombre de transactions et de 19,3% en termes de montant global. Et ce lors du premier trimestre de 2022 comparé à la même période en 2021. Au total, les sites affiliés à l’institution ont effectué quelque 6,3 millions de transactions de paiement en ligne par carte bancaire, pour un montant total de 2,3 MMDH.

Un paiement réglementé par la loi

En effet, le commerce électronique connaît une croissance rapide dans le monde entier et devient l’un des modes de consommation les plus courants, en particulier chez les nouvelles générations. Le Maroc s’inscrit pleinement dans cette numérisation, qui est appelée à façonner l’économie du XXIe siècle. « Les gens ont tendance à tout mélanger. Lorsque le CMI parle de paiement en ligne, il parle de toutes les transactions faites sur Internet. Qu’il s’agisse d’un consommateur ou d’une entreprise qui paie ses impôts, sa CNSS ou autres, l’essentiel c’est que le paiement se fasse en ligne », explique Ouadi Madih, président de l’Association de la protection du consommateur UNICONSO.

Cependant, et selon notre source, bien que lesdits chiffres englobent tous les paiements en ligne, le secteur du e-commerce a beaucoup évolué. En termes simples, cet anglicisme signifie tout ce qui se rattache à l’achat et à la vente des produits ou services via un site internet et moyennant un paiement quel que soit sa nature : en ligne ou en cash. « Maintenant lorsque nous parlons d’achat en ligne, nous parlons généralement d’un paiement par carte. Sur ce volet, nous avons une loi qui garantit la transaction commerciale ainsi que la sécurité du paiement du produit du fournisseur », fait savoir notre source.

En ce sens, Ouadi Madih détaille que ladite sécurité démarre déjà à partir de l’octroi de la carte 3D Secure, un protocole sécurisé de paiement sur Internet, reconnu sur le plan international qui consiste à s’assurer, lors de chaque paiement en ligne, que la carte est utilisée par son véritable titulaire. Ensuite, toujours selon les propos de notre interlocuteur, la sécurité est garantie par la plateforme « Maroc Telecommerce » qui met à la disposition des entreprises et administrations une infrastructure technologique sécurisée, leur permettant de diversifier leurs canaux d’encaissement et de ventes.

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En partenariat avec les banques et le CMI, elle propose  un service de paiement via Internet ouvert à plus de 8 millions de cartes bancaires locales et plus de 3 milliards de cartes internationales. « Il y a aussi la plateforme e-commerce proposée par le CMI, qui est facile d’utilisation et qui garantit des transactions ultra sécurisées », dit le président d’UNICONSO. Pour lui, le cheminement réglementé par la loi présente peu de risques, la défaillance étant rarement due à la procédure de paiement en ligne mais plutôt à des affaires d’escroqueries que la loi 31-08 aborde avec précision.

En effet, la loi 31-08 édictant des mesures de protection du consommateur, définit à partir de son article 25 jusqu’à l’article 44, les pratiques commerciales conclues à distance et énonce les droits et devoirs de chacune des parties. Cette dernière précise que le contrat de vente à distance par un moyen électronique est valable s’il a été conclu conformément aux conditions prévues par la loi 53-05 relative à l’échange électronique des données juridiques, laquelle stipule que l’écrit sous forme électronique est admis en preuve au même titre que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane. Il faut également qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité.

Une sécurité qui laisse à désirer

« Lorsque le consommateur nous parle d’e-commerce, il confond beaucoup de choses. Pour lui, n’importe quelle transaction commerciale via Internet est réglementée par la loi », avance Ouadi Madih. Il poursuit qu’une pratique commerciale réglementée consiste à accéder à un site et y trouver mentionnées, les informations suivantes : les conditions générales (comprenant certaines mesures que les fournisseurs doivent obligatoirement appliquer) ainsi que les coordonnées administratives de l’entreprise (patente, registre de commerce, autorisation, adresse physique, etc.)

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« Nombre de personnes commercent via les réseaux sociaux WhatsApp, Facebook, etc. et déposent des réclamations en cas d’escroquerie. Mais comment pouvons-nous nous assurer de l’existence de l’entreprise afin de retracer la personne en question ? C’est pratiquement impossible. Je compare ces gens, aux vendeurs ambulants. Ce sont les mêmes, c’est juste que certains échangent avec leur client de manière physique alors que d’autres le font sur internet », explique le président d’UNICONSO.

Ainsi, dans la loi édictant les mesures de protection du consommateur physique et en ligne, le législateur explique que c’est au fournisseur de proposer au client le mode de paiement (par carte, par virement, par chèque, avant ou après livraison, etc.) Il l’oblige même à sécuriser ledit mode de paiement puisqu’après tout, la responsabilité lui revient à lui seul.

« A mon sens, les seuls paiements sécurisés sont le paiement par carte et le paiement en cash. Car pour le paiement par carte, ma banque m’assure, et en cash, j’ai toujours le choix de me rétracter et donc de refuser la commande », souligne notre source.

Par ailleurs, avec une population de plus de 1,3 milliard d’habitants et plus de 473 millions d’internautes, le continent africain a assisté à la montée en puissance de plusieurs plateformes locales de commerce électronique. Cette industrie émergente est également confrontée à des défis, notamment une infrastructure inadéquate, un marché fragmenté et une pression financière.

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« Le problème que nous rencontrons souvent, c’est que nous n’avons pas d’autres points de sécurité au niveau du paiement. Comme par exemple une assurance qui protège le client de tous les risques qui menacent sa carte bancaire », relève Ouadi Madih. Il ajoute qu’au Maroc, il est très difficile de prouver un retrait d’argent fait par une personne autre que le titulaire de la carte auprès d’un guichet GAB ou autre.

« Dans ce cas, le client n’est pas à 100% protégé. Il lui faudra déposer une requête auprès du procureur, lequel doit vérifier tout cela, et trancher si le client peut être remboursé ou pas. C’est très long et n’aboutit pas toujours à un résultat satisfaisant », conclut notre source.

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