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Vidéo. Figue de Barbarie, un fruit devenu hors de prix
Publié leLa figue de Barbarie, jadis surnommée « fruit du pauvre » au Maroc, est en passe de devenir un aliment tendance, hors de portée d’une bonne partie des citoyens. Ce fruit aux multiples vertus, a vu son prix s’envoler allant de 50 centimes et 1 dirham à 2 ou 3 voire 10 dirhams la pièce, soit presque 16 fois le prix initial. Eclairage.
Prête à se déguster sur le pouce, la figue de Barbarie « Hendiya » ou encore « zaaboul » a pendant des années fait des heureux. Ce fruit très prisé des Marocains, notamment pour son goût doux, ses valeurs nutritives et énergétiques ainsi que son prix accessible. Mais la filière a vécu un autre tournant. Les prix des figues de Barbarie sont désormais plus élevés que ceux des fruits exotiques. Alors qu’ils se situaient entre 0,50 et 1 dirham trois années auparavant, aujourd’hui, variant d’un vendeur à l’autre, ces aliments sont actuellement parmi les fruits les plus chers. Et la raison est connue de tous : la cochenille du cactus a ravagé la totalité ou presque, des plantations de figuiers.
Un fruit détruit par la cochenille
« En début du mois de juillet, j’avais acheté moi-même à Marrakech, une figue de Barbarie à 15 dirhams. La question de la rareté est normale puisque quelque 120.000 hectares ont été détruits au niveau national par la cochenille sauvage », explique Mohammed Sbaghi, directeur de recherche à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA). Il souligne que les scientifiques et chercheurs n’ont toujours pas trouvé de solution pour parer à la dissémination de la cochenille du Cactus que ce soit au niveau national ou international. « Le problème, c’est qu’elle se déplace d’une manière et d’une vitesse incroyables et imprévisibles », ajoute-t-il.
Grosso modo, les cochenilles sont des insectes ravageurs qui s’attaquent aux feuilles, tiges ou encore racines des plantes ornementales, fruitières ou légumières. Ces suceurs vont jusqu’à provoquer une malformation ainsi qu’un dessèchement de la plante. «Ce que les gens doivent comprendre, c’est qu’il ne s’agit pas de l’insecte qui, une fois écrasé, délivre un liquide d’une magnifique couleur. Au Pérou par exemple, on élève depuis des siècles ces cochenilles pour en tirer un colorant, rapporteur de beaucoup d’argent au pays», fait savoir Mohamed Sbaghi.
Il détaille que les spécialistes marocains ont constaté que cet insecte produit de l’acide carminique rendant le fruit de très mauvaise qualité, d’une faible quantité, et très acide. «Si la cochenille ravageuse du Maroc n’a pas d’effets néfastes sur la santé des humains, elle en a tout de même sur la qualité du fruit que nous produisons», exprime notre source.
Lire aussi. Enfin une solution pour lutter contre la cochenille ravageuse de cactus
En l’absence de solutions connues permettant de stopper l’insecte, le ministère de l’Agriculture a mis en place un plan d’urgence d’envergure de lutte contre la cochenille du cactus dès 2016. Il a surtout porté sur une recherche ciblée, pour notamment, la sélection de variétés résistantes et la mise au point de produits de traitement. Pour au final, réaliser une avancée majeure avec des résultats concluants marqués par l’identification de huit variétés de cactus résistantes à la cochenille à partir d’une collection appartenant à l’INRA. Il s’agit des variétés Marjana, Belara, Karama, Ghalia, Angad, Cherratia, Akria et Melk Zhar.
Un nouvel espoir
« Le programme a été mené au niveau de l’INRA en partenariat avec les ORMVAs, les DRA, l’ONSSA et l’ONCA. A travers les variétés de raquettes résistantes que nous avons trouvées et que le ministère de l’agriculture est entrain de planter actuellement, différentes production vont voir le jour d’ici 2024. Et au fur et à mesure, nous allons avoir plus de fruits sur le marché, mais certainement avec le temps, le prix va baisser de plus en plus pour revenir à son ancienne position », estime le chercheur.
Une lueur d’espoir pour cette filière très prometteuse. Car les pépins dudit fruit, bien qu’ils ne soient pas appréciés de tous, ont bien fait leurs preuves. Outre les fruits, et les produits comestibles qui en résultent (sodas, confitures, raquettes pour le bétail), différents produits cosmétiques peuvent en être extraits.
L’huile de figue de Barbarie est le meilleur exemple. Elle risque de devenir le nouvel indispensable beauté. Et pour cause, elle regorge de vertus. Comme son nom l’indique, cette dernière est obtenue à partir des graines de la figue de Barbarie. Cette huile rare et pleine de vertus, ne doit pas être confondue avec le macérât huileux de figuier de Barbarie, moins riche en actifs et moins cher.
Une découverte en or
«C’est très rapporteur pour l’économie du pays. Car l’huile brute coûte chez les grossistes entre 7.000 et 10.000 dirhams le litre pour arriver chez le consommateur final, à un prix qui peut aller jusqu’à 30.000 dirhams le litre», révèle Rachid Bouharroud, chercheur et spécialiste en cochenille du cactus au niveau de l’INRA d’Agadir. Il explique que la quantité du fruit à partir de laquelle se fait l’extraction de l’huile, dépend de sa teneur en graines. «Il faut d’abord extraire les pépins et procéder au séchage. En général, la quantité d’huile de figue de Barbarie représente 8% de celle du fruit. 100 kg de graines séchées et prêtes pour l’extraction, permettent de produire en moyenne, 8 kg (environ 8 litres) d’huile.
Ainsi, cette huile est l’une des huiles les plus chères au monde, avec un prix de mille dollars le litre, soit quatre fois plus chère que l’huile d’argan. Cette révolution provoquée par l’huile de figue de Barbarie dans le monde de la cosmétique a poussé les entreprises internationales à s’orienter vers le Maroc. Car sa renommée provient essentiellement de son fort pouvoir anti-âge. Appliquée sur la peau, elle offre un effet tenseur doublé d’une protection contre les radicaux libres qui permettent de gommer les rides, de prévenir leur apparition et lutter contre le relâchement de la peau.
Mais si pour produire un litre d’huile de graines de figue de Barbarie, 30 kilos de pépins sont nécessaires, représentant à peu près une tonne de fruits bruts, ne favorise-t-on pas la cherté du prix du fruit ainsi que sa rareté ?
«Pour l’instant, le Maroc favorise plus la production du fruit en attendant d’avoir plus de quantité d’ici 2024. Et si avant l’arrivée de la cochenille, on avait proposé d’en faire plusieurs usages, c’est parce qu’il y avait du gaspillage. Et qu’une bonne partie du fruit finissait par se retrouver à la poubelle. Autant en profiter », conclut Rachi Bouharroud.