Reportage. À Asni où l’horreur a frappé, les habitants pleurent dignement les disparus

Publié le
a5179d03 6bf1 459d a7b7 184bd89335fe

Difficile, voire impossible, de retenir ses larmes à l’entrée d’Asni. Niché dans les falaises escarpées d’Al-Haouz, ce doux village vivait autrefois au rythme paisible de ses habitants humbles et modestes jusqu’au soir du vendredi dernier, quand la mort a frappé sans ménagement.

Il aura fallu moins de dix secondes pour que ce douar, où les vieilles maisons en terre incarnaient la simplicité des riverains, se transforme en un gigantesque amas de gravats, la puissance du séisme étant des plus brutales par rapport à d’autres régions.

Le séisme d’Asni n’a rien donc du « doux penthotal » chanté par Léo Ferré pour décrire la mort. Il s’est abattu sur les enfants et les vieux, affligeant sur son passage les pires souffrances physiques et morales aux proches et aux parents et fendant l’âme de quarante millions de Marocains.

Pour arriver sur place, l’équipe de H24info a dû traverser la voie reliant Marrakech à Moulay Brahim, une route extrêmement abrupte et sinueuse en raison des chutes de pierres et des éboulements causés par le tremblement de terre, avant d’atterrir à Asni.

Deux jeunes hommes du village nous ont reconnu, séance tenante, et accueilli avec la même courtoisie d’antan, avant de nous conduire directement vers le père éprouvé par la mort de ses enfants et les maisons les plus dévastées par le tremblement et où ont eu lieu le plus de pertes humaines.

Asni en ruines
Asni en ruines ©H24info

Le visage atterré, Abderrahim, papa d’une fille de dix ans et d’un fils de douze ans seulement, nous a raconté comment il a appris la tragique disparition de ses enfants.

« J’appelais tout le monde mais personne ne m’avait répondu. Il n’y avait pas de réseau. C’est une femme qui m’a appelé pour m’informer que ma maison s’est effondrée. Ma femme a été évacuée mais les enfants ont été encore sous les décombres. Quand je suis arrivé. Mes enfants étaient déjà transportés à l’hôpital et ma femme blessée aux deux jambes », regrette-t-il.

Démuni de son domicile, il passe en ce moment ses nuits dehors à l’instar de tous les autres villageois.

Un dessin de sa défunte fille, collé à l’un des derniers murs encore debout et tout aussi attristant que les pertes constatées, continue d’émouvoir aux larmes les passants et les voisins.

Sur cette esquisse au stylo, elle a dessiné sa mère Fatima et écrit autour de son corps les autres noms de la famille. Une sensation de déchirement insoutenable surgit à la vue de son œuvre.

Quant à Hassan, trentenaire et père de famille, il a vu cette nuit macabre de vendredi la maison qu’il a construite de ses propres mains voler littéralement en éclats.

« A Tagadirt N’Asni, le douar a été fortement dévasté. Les maisons sont en ruines, et les gens ne peuvent plus retourner à leurs domiciles. Les maisons sont toutes fissurées de l’intérieur et personne ne pourrait y vivre après ce qui s’est passé », nous a-t-il relevé.

Revenant sur les détails de son échappée à une mort certaine ce soir-là, le rescapé raconte qu’en dépit de la fatigue d’une journée de travail, il s’est réveillé à l’instant même où la terre a commencé à trembler.

« Je ne savais plus quoi faire. Je me suis jeté sur mes enfants pour les protéger et nous étions sur le champ couverts de gravats. Je me suis ressaisi et enlevé les décombres pour les évacuer à l’extérieur », relate-t-il, à bout de souffle.

Le village d’Asni et ses environs ont jusque-là enregistré des dizaines de morts et plusieurs blessés à la suite de ce séisme ravageur. Les autres localités, notamment celles avoisinant la province de Chichaoua, de Taroudant et d’autres provinces de la région Marrakech-Tensift-Al Haouz, ne sont pas en reste.

La rédaction vous conseille

Les titres du matinNewsletter

Tous les jours

Recevez chaque matin, l'actualité du jour : politique, international, société...

Reportage. À Asni où l’horreur a frappé, les habitants pleurent dignement les disparus

S'ABONNER
Partager
S'abonner