La police financière italienne (GDF) a annoncé mardi une vaste opération anti-mafia en Italie et…
Qui est Matteo Messina Denaro, le mafieux le plus recherché d’Italie arrêté à Palerme?

Recherché depuis 30 ans par toutes les polices d’Italie, le parrain sicilien Matteo Messina Denaro, arrêté lundi à Palerme, fut un assassin impitoyable dont la cruauté s’inscrit dans la grande tradition des chefs de Cosa Nostra, la mafia sicilienne.
« Avec les personnes que j’ai tuées moi-même, je pourrais remplir un cimetière », se serait vanté auprès d’un ami ce grand amateur d’armes à feu, selon des propos rapportés par la presse italienne et qui ont contribué à bâtir la réputation de ce tueur, qui a commis son premier homicide à 18 ans.
Surnommé Diabolik, du nom d’un criminel protagoniste d’une célèbre BD italienne dont il est lui-même fan, cet homme condamné plusieurs fois à la perpétuité était le chef incontesté de Cosa Nostra dans la province de Trapani, dans l’ouest de la Sicile, même si son pouvoir débordait jusqu’à Palerme, la capitale de l’île.
Adepte des Rolex en or et des vêtements griffés, ce passionné de jeux vidéo et de BD traîne aussi une réputation de grand séducteur.
Né le 26 avril 1962 à Castelvetrano, dans le sud-ouest de la Sicile, il baigne dès l’enfance dans le crime organisé: son père, don Ciccio, est le chef du clan local et son parrain de baptême est lui-même un « homme d’honneur ».
En 1989 commencent ses premiers démêlés avec la justice à cause de sa participation à la lutte sanglante entre deux clans. En 1989, il est accusé du meurtre de Nicola Consales, un propriétaire d’hôtel qui s’était plaint devant une de ses employées d’avoir « toujours ces petits mafieux dans les pattes ». Or cette employée n’était autre que la maîtresse de Messina Denaro.
En 1992, il fait partie d’un groupe de sicaires dépêchés à Rome pour tenter d’assassiner le juge antimafia Giovanni Falcone. Ils sont finalement rappelés par Toto Riina, le boss de Corleone surnommé « le fauve » pour sa férocité, qui souhaitait un autre modus operandi.
Matteo Messina Denaro lui-même fut impitoyable au cours de sa longue carrière. En juillet 1992, après avoir participé au meurtre de Vincenzo Milazzo, le chef du clan d’Alcamo, il étrangla la compagne de ce dernier, enceinte de trois mois. Les deux cadavres furent enterrés dans la campagne.
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En tant que chef du clan de Castelvetrano, ce myope aux épaisses lunettes est allié au fameux clan des Corleonesi, immortalisé au cinéma dans « Le Parrain », dans la guerre meurtrière de la mafia à coups d’attentats dans la péninsule.
Après l’arrestation de Toto Riina, Messina Denaro poursuivit sa stratégie de terreur tous azimuts de la mafia, fournissant un soutien logistique pour organiser des attentats à Florence, Milan et Rome, qui firent au total une dizaine de morts et une centaine de blessés.
C’est durant l’été 1993 qu’il choisit de disparaître dans la nature, débutant ainsi sa longue fuite face à la justice, qui multiplie les mandats d’arrêt contre le criminel, accusé entre autres d’association mafieuse, d’homicide, de détention d’explosifs et de vol.
En novembre 1993, il est l’un des organisateurs de l’enlèvement du petit Giuseppe Di Matteo pour contraindre son père Santino à rétracter son témoignage sur l’assassinat du juge Falcone. Au bout de 779 jours de détention, l’enfant est étranglé et son corps dissous dans l’acide.
En 1994 et 1996, les témoignages de repentis permirent de faire la lumière sur son rôle au sein de Cosa Nostra. En 2000, à l’issue du maxi-procès contre la mafia baptisé « Omega » à Trapani, il fut condamné par contumace à la prison à perpétuité.
Durant sa cavale, il gère ses « affaires » en communiquant sous le pseudonyme « Alessio » à travers des « pizzini », ces messages écrits sur de petits morceaux de papier, appréciés des mafieux pour leur discrétion par rapport aux téléphones portables.
En 2015, la procureure Teresa Principato avait estimé qu’il avait pu échapper si longtemps à la police seulement parce qu’il était protégé « à un très haut niveau », sans préciser s’il s’agissait de responsables politiques. « Nous avons eu confirmation de sa présence au Brésil, en Espagne, en Grande-Bretagne, en Autriche », avait-elle ajouté.
Ses années de fuite sont entourées de nombreuses rumeurs, dont une supposée opération de chirurgie esthétique pour le rendre méconnaissable. Il bénéficie de nombreuses sources de revenus, du trafic de drogues aux jeux de hasard, aussi bien en Italie qu’à l’étranger.
En 2020, nombre de ses collaborateur ont été arrêtés, resserrant les mailles du filet autour du boss. En outre, le 21 octobre 2020, il est de nouveau condamné par contumace à la perpétuité pour avoir été l’un des commanditaires de l’assassinat du juge Falcone en 1992.