Au Maroc, la langue française menacée par l’anglais ?

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Depuis quelques jours, un hashtag devenu viral demande le remplacement de la langue française au Maroc par l’anglais, l’estimant plus «universel».

« L’anglais, c’est le futur », « le peuple marocain veut supprimer la langue française, langue du colonialisme, et la remplacer par l’anglais, langue de la science et du monde », « Nous, les Marocains, devrions jeter la langue française à la poubelle, car c’est une langue inutile dans le monde moderne ». Ce sont quelques-uns des milliers de messages et tweets postés depuis mi-septembre sur les réseaux sociaux au Maroc, sous le hashtag #Yes_for_english_instead_of_french_in_Morocco (Oui à l’anglais au lieu du français au Maroc).

Pour ses défenseurs, la langue de Shakespeare est celle de « l’avenir », de la « mondialisation » ou encore de « l’ouverture vers le monde entier », contrairement au français qui selon eux est aujourd’hui « révolue ».

Sur la toile, la campagne anti-français s’est amplifiée depuis la récente sortie du porte-parole du gouvernement français Gabriel Attal, annonçant une réduction du nombre de visas octroyés au Maroc, mais aussi à la Tunisie et l’Algérie. « Il est temps que le Maghreb s’intéresse davantage au partenariat avec le monde anglo-saxon », lit-on dans un tweet posté le 29 septembre.

« Plus importante à apprendre »

Une étude intitulée « Shift to english in Morocco » (Passer à l’anglais au Maroc), publiée en avril dernier par le British Council, consolide l’objectif de cette campagne. « L’anglais gagne rapidement en importance parmi les jeunes Marocains, qui le considèrent comme vital pour débloquer des opportunités éducatives, professionnelles et culturelles », explique-t-on dans les principales conclusions de l’étude.

Selon le document, les jeunes Marocains pensent qu’il est plus important d’apprendre l’anglais que l’arabe ou le français. Ainsi, 40 % des personnes interrogées pensent que « l’anglais est la langue la plus importante à apprendre, contre seulement 10 % pour le français ». L’étude souligne aussi qu’au Maroc, les jeunes sont « beaucoup plus susceptibles » de recommander à leurs amis, leur famille et leurs collègues d’apprendre l’anglais plutôt que l’arabe ou le français.

 

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Aussi, en juillet dernier, le ministère de l’Éducation nationale a annoncé la d’un partenariat avec le British Council et la Société nationale de radio et de télévision (SNRT) pour la diffusion, à partir de septembre sur la radio nationale, d’un programme d’apprentissage de l’anglais.

Autant d’éléments qui laisseraient penser que le français est menacé par l’anglais au Maroc. Mais la réalité est autre. C’est ce qu’assurent en tous cas les défenseurs de la francophonie, estimant que le français reste la deuxième langue d’enseignement dans les écoles et universités du royaume.

Le français résiste

« Le Maroc est un pays plurilingue. C’est dans l’ADN des Marocains d’être curieux et de se tourner vers d’autres langues. C’est une bonne chose. Le français n’est absolument pas en déclin, c’est plutôt l’inverse », assure à H24Info Anouchka Kerouas, attachée de coopération pour le français dans la zone sud du Maroc. «Depuis août 2019, une loi a réinstallé les langues étrangères pour l’enseignement des disciplines scientifiques et techniques et la grande majorité des langues étrangères choisies dans ce sens, c’est le français», rappelle la responsable de l’Institut français, faisant référence à la loi-cadre sur l’enseignement.  Qui avait beaucoup fait débat à l’époque.

Et de poursuivre : «Le français est maintenant la langue utilisée pour enseigner les disciplines scientifiques au collège et au lycée. C’est aussi une langue qui est apprise plutôt à l’école primaire. La loi qui a été mise en place en 2019 est en train de faire son chemin peu à peu pour recouvrir dans quelques années la totalité de l’enseignement».

D’autant plus que, selon elle, «les Marocains représentent toujours le premier contingent présent en France dans les études supérieures» et «malgré toutes les réformes et les difficultés qu’il y a eu dans le coût de l’enseignement supérieur en France, on a constaté que le choix des Marocains n’avait pas évolué dans d’autres sens».

Arrivé au Maroc il y a près de trois semaines, Gaëtan Pellan, le nouveau directeur de l’Institut français de Casablanca, ne voit pas non plus de menaces pour la francophonie. « Ici, le français est très présent dans la vie de tous les jours. Il y a aussi un grand engouement pour les tests de certification pour faire des études en France. Les cours de français ne désemplissent pas non plus ici », soutient-t-il. Selon lui, « la francophonie a encore de beaux jours devant elle et le français a encore toute sa place ».

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