Gaza: une distribution d’aide alimentaire tourne au cauchemar

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Dans le nord de Gaza, manger son cheval pour ne pas mourir de faim
Un homme assis dans une charrette tirée par un cheval circule vendredi au milieu des décombres à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza © AFP

Une population affamée, de l’aide enfin livrée et des soldats « menacés »: plus d’une centaine de personnes ont perdu la vie jeudi, selon le Hamas, dans une distribution d’aide alimentaire qui a tourné au cauchemar à Gaza, théâtre de scènes de piétinement et de tirs à balles réelles sur la foule.

Jeudi à l’aube, des milliers de personnes s’agglutinaient sur la rue al-Rashid, près du « rond-point de Naplouse », dans l’ouest de Gaza, principale ville du nord de la bande de Gaza, où des Palestiniens ont raconté avoir été forcés ces derniers jours à manger du fourrage animal ou à abattre des animaux de trait, pour se nourrir.

Selon des témoins et les services de santé de Gaza, les militaires israéliens postés à proximité pour protéger le convoi d’aide ont ouvert le feu sur cette foule qui se précipitait sur les camions, une trentaine selon l’armée israélienne, à leur arrivée sur place.

« Alors que le convoi (parti du sud de Gaza) est entré dans le nord, des milliers de personnes se sont précipitées sur les camions, ce qui a provoqué une bousculade dans laquelle des dizaines de Gazaouis ont été blessés et tués, certains d’entre eux renversés par des camions« , a indiqué un responsable de l’armée.

Puis, une partie du convoi a poursuivi son chemin, mais des « dizaines » de civils ont foncé sur les camions, et se sont rendus à proximité des forces israéliennes sur place qui ont tiré des « coups de semonce » avant « d’ouvrir le feu », a poursuivi ce responsable militaire.

« Il s’agissait de tirs restreint (…), il ne s’agissait pas d’un événement massif de notre point de vue« , a-t-il ajouté. L’armée a fait état de « dizaines de morts et de blessés« , bousculés ou piétinés par la foule qui a « encerclé les camions et pillés » les cargaisons, mais pas de bilan des tirs.

Le ministère de la Santé du Hamas a dénombré dans l’après-midi 104 morts et 760 blessés lors de ce qu’il a qualifié de « carnage » dans la bande de Gaza, où le seuil des 30.000 morts depuis le début de la guerre le 7 octobre a été franchi jeudi.

– « Payé de notre sang » –

« Nous étions dans la rue al-Rachid, et soudain des chars nous ont pris d’assaut. Il y avait des colis remplis d’aide. Les gens, à cause du manque de nourriture et de farine ont foncé pour les récupérer. C’était le chaos, il y avait des foules de gens, mais les forces d’occupation continuaient à nous tirer dessus, il y a eu tant de martyrs et de victimes« , a déclaré à l’AFP un témoin refusant de révéler son identité.

« Je suis l’un des blessés, j’étais dans la rue al-Rachid. Nous étions debout pour obtenir de la nourriture pour nos enfants (…). Mais nous avons payé cette aide de notre sang« , a indiqué un autre témoin.

Des cadavres ont été transportés à l’aide d’une charrette tirée par un âne le long de la route longeant la côte de la bande de Gaza, selon un collaborateur de l’AFP sur place. Dans un communiqué conjoint les factions palestiniennes ont dénoncé un « crime odieux sur des civils sans défense ».

Ces dernières semaines, les organisations humanitaires ont tiré la sonnette d’alarme sur la situation humanitaire à Gaza, l’ONU estimant que 2,2 millions de personnes, soit l’immense majorité de la population, sont menacées de famine, en particulier dans le nord où les destructions, les combats et les pillages rendent presque impossible l’acheminement de l’aide humanitaire.

Selon l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa), un peu plus de 2.300 camions d’aide sont entrés dans la bande de Gaza au mois de février, une baisse d’environ 50% par rapport à janvier, et une moyenne quotidienne de quelque 82 camions par jour.

D’après l’ONU, environ 500 camions entraient en moyenne quotidiennement dans la bande de Gaza avant le début de la guerre le 7 octobre, alors que les besoins de la population locale était alors moindres.

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Dans un entretien récent à l’AFP, le chef du bureau de coordination de l’aide humanitaire de l’ONU pour les Territoires palestiniens, Andrea De Dominico, a fait état des problèmes liés à l’acheminement de l’aide dans le nord de Gaza, où la situation tient de « la misère à l’état pur ». A l’arrivée de convois, disait-il, des « milliers de personnes bloquent les camions pour les décharger au risque de se faire tirer dessus ».

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