France: des milliers de manifestants contre la réforme des retraites

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Le cortège parisien, fort de plusieurs dizaines de milliers de personnes, s’est ébranlé vers 14h15 de la place de la République avec les responsables des principaux syndicats français à leur tête. Crédits photo: AFP

Des centaines de milliers de manifestants, des grèves à l’école ou dans les transports: les syndicats ont donné jeudi le coup d’envoi de la contestation pour faire reculer le gouvernement sur sa réforme phare des retraites, saluant d’ores et déjà une mobilisation « réussie ».

« La retraite avant l’arthrite », « métro, boulot, caveau »… De Calais à Nice, des manifestants ont battu le pavé dans la matinée, avant que le cortège parisien ne s’élance vers 14H15 pour dire « non » au recul de l’âge légal de départ de 62 à 64 ans, sur fond de large mécontentement social dans un contexte de forte inflation.

« Je m’oppose farouchement au fait qu’on m’impose de devoir travailler jusqu’à 64 ans, c’est insensé », témoigne Laurent Quéré, 42 ans, charpentier et couvreur à Plabennec (Finistère), rencontré dans la manifestation de Brest. « Je pose la question: quel client sera assez fou pour nous confier des chantiers à 64 ans ? »

Dans la foule, beaucoup de primo-manifestants, comme Jérôme Thevenin, cuisinier de 52 ans à la carrière « hachée ». « Je n’ose même pas faire le calcul pour savoir quand je pourrai partir », dit ce manifestant marseillais en espérant que la mobilisation « fera réfléchir le gouvernement ».

Les premiers chiffres remontés par les autorités attestent d’une mobilisation très importante, globalement dans le calme: 36.000 personnes ont ainsi défilé à Toulouse, 26.000 à Marseille, 25.000 à Nantes, 19.000 à Clermont-Ferrand, 15.000 à Montpellier… Ils étaient 23.000 à Lyon, où la manifestation a été émaillée de quelques heurts entre forces de l’ordre et militants d’ultra-gauche.

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Les pointages de la police ou des préfectures sont particulièrement significatifs dans des villes moyennes, à l’image de Pau (13.600 manifestants), Angoulême (9.000), Châteauroux (8.000) ou Alès (7.200).

Globalement, les niveaux sont comparables voire supérieurs à ceux du 5 décembre 2019: au démarrage de la contestation contre le précédent projet de réforme des retraites, la police avait compté 806.000 manifestants en France, la CGT 1,5 million.

« Je pense que le million va être dépassé », a déclaré le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, dans le carré de tête de la manifestation à Paris, évoquant une mobilisation « réussie ».

« On est clairement sur une forte mobilisation, au-delà ce qu’on pensait », a abondé le numéro un de la CFDT, Laurent Berger.

A Abbeville (Somme), le député LFI François Ruffin s’est dit convaincu que « la bataille de l’opinion est déjà gagnée, neuf actifs sur 10 sont contre. On doit passer de +on a raison+ à +on peut gagner, battre Macron sur cette réforme à 64 ans+ ».

Transports au compte-goutte

Côté usagers, ceux qui n’ont pas recours au télétravail ont dû composer avec des transports en commun au compte-goutte.

A la SNCF, qui affiche un taux de grévistes de 46,3%, la circulation était « très fortement perturbée »: un TGV sur trois circule, voire un sur cinq selon les lignes, et à peine un TER sur dix en moyenne. Le métro parisien est également « très perturbé ».

De nombreux services publics étaient touchés. 28% de grévistes ont été comptabilisés dans la fonction publique d’Etat par leur ministère de tutelle.

Dans l’éducation, le principal syndicat, la FSU, a dénombré 70% d’enseignants grévistes dans les écoles et 65% dans les collèges et lycées. Le ministère chiffre pour sa part la mobilisation à 42% dans le primaire et 34% dans le secondaire. Quelques dizaines d’établissements ont été l’objet de blocus à Paris, Rennes, Tours et Toulouse notamment.

Il n’y avait aucun trafic au port de Calais, premier de France pour les voyageurs, en raison d’une grève des officiers de port.

Raffineries et dépôts pétroliers étaient aussi appelés à cesser leurs activités. Dans la raffinerie TotalEnergies de Feyzin (Rhône), où les expéditions ont été suspendues, le taux de grévistes a atteint 86%, selon la CGT.

La direction d’EDF faisait part de 44,5% de grévistes sur ses effectifs totaux à la mi-journée.

« Impôt sur la vie »

Pour le leader de Force ouvrière, Frédéric Souillot « on est partis pour un conflit dur » et « il faut bloquer l’économie ».

Une réponse à Emmanuel Macron, qui a jugé mercredi qu’il fallait « faire le distinguo entre les syndicats qui appellent à manifester dans un cadre traditionnel et ceux qui sont dans une démarche délibérée de bloquer le pays ».

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Les huit principaux syndicats présentent un front uni inédit depuis 12 ans. Les partis de gauche sont aussi vent debout contre une réforme vue comme « un impôt sur la vie », ont accusé les parlementaires socialistes.

Cette première journée a valeur de test pour l’exécutif comme pour les syndicats, qui se retrouveront à partir de 18H00 pour décider d’une nouvelle date. Le 26 janvier est sur la table.

La CGT du pétrole veut se remettre en grève ce jour-là pour 48 heures, et le 6 février pour 72 heures.

La CGT Mines-Energie a elle aussi annoncé une grève reconductible. Les baisses de production d’électricité se sont déjà fortement intensifiées jeudi, atteignant au moins l’équivalent de deux fois la consommation de Paris.

Avant la présentation du texte en Conseil des ministres lundi prochain, le gouvernement a continué de son côté à faire œuvre de « pédagogie », Elisabeth Borne défendant un « projet porteur de progrès social pour le pays ».

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