Droits des travailleurs: la France épinglée

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Interpellation pendant la manifestation contre la réforme des retraites, à Paris. (Crédit AFP)

« Brutalité policière », « arrestations aveugles »: dans un monde où les atteintes aux droits des travailleurs restent « à des niveaux record », la France est sèchement épinglée vendredi pour sa réponse musclée à la contestation contre la réforme des retraites.

Les manifestations contre le report à 64 ans de l’âge de départ à la retraite « ont donné lieu à des brutalités policières, des arrestations aveugles et des attaques au gaz lacrymogène », énumère la Confédération syndicale internationale (CSI) dans la dernière édition de son Indice des droits dans le monde, finalisé avant les récentes émeutes urbaines déclenchées en France par la mort d’un adolescent tué mardi par un policier.

La France fait ainsi partie des 69 Etats, parmi les 149 étudiés par la principale confédération syndicale de la planète, à avoir procédé à des arrestations et des détentions jugées « arbitraires » entre avril 2022 et mars 2023.

Comme en 2022, Paris est accusé de violations « répétées » des droits des travailleurs, là où l’Allemagne ou les pays scandinaves se voient seulement reprocher des atteintes « sporadiques ».

« Quand vous souhaitez modifier une loi qui concerne les travailleurs, et la réforme des retraites en est un exemple, la moindre des choses qu’on puisse attendre est le dialogue », affirme à l’AFP Luc Triangle. Or les syndicats ont été « ignorés », pour le secrétaire général par intérim de la CSI.

Mais le classement de la France reste comparativement avantageux.

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Le Royaume-Uni est ainsi épinglé pour des violations « systématiques » des droits, dans un monde où 87% des Etats enfreignent le droit de grève.

Liberté d’expression, de réunion ou d’association, dialogue social: les atteintes aux principaux droits des travailleurs mondiaux se maintiennent à « des niveaux record », s’alarme la Confédération, qui revendique 338 syndicats affiliés, implantés dans 168 pays et territoires.

La CSI est particulièrement préoccupée par la situation en Equateur et en Tunisie, deux Etats qui intègrent la liste annuelle des « dix pires pays pour les travailleurs ».

Situation inquiétante en Tunisie

« En Équateur, de grandes manifestations en faveur de la démocratie et des droits collectifs (…) ont été réprimées dans la violence », justifie-t-elle.

« En Tunisie, le président Kais Saied sape les libertés civiles des travailleurs et ébranle des institutions démocratiques », comme le Parlement dissous en 2021, ou la nouvelle Constitution « adoptée en 2022 sans consultation des partis politiques ou des partenaires sociaux ».

A l’inverse, la Colombie et le Brésil, où la présidence a basculé début 2023 de l’extrême droite incarnée par Jair Bolsonaro à la gauche représentée par Lula, sortent de la liste des dix pires pays.

La situation des travailleurs en Amérique latine n’en demeure pas moins catastrophique: 18 des 19 syndicalistes assassinés à travers le monde en 2022-2023 (deux de plus qu’en 2021-2022) y ont perdu la vie.

Rien qu’en Colombie, « 15 syndicalistes ont été victimes d’assassinats ciblés entre avril et octobre 2022 », détaille la CSI auprès de l’AFP.

Pas moins de 86 personnes ont en outre payé de leur vie leur participation à des grèves ou des manifestations.

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« De façon générale, en 2022-2023, (…) les grèves et les manifestations organisées par les syndicats pour dénoncer l’augmentation du coût de la vie ont fait l’objet d’une plus grande brutalité policière, même dans des pays généralement moins enclins à la violence policière », alerte la Confédération.

En plus des autorités publiques, la CSI dénonce comme chaque année une série de grandes entreprises (ou leurs branches locales) « qui ont violé les droits des travailleurs, sont liés à une violation de ces droits ou ne se sont pas servies de leur influence pour y remédier ».

Figurent notamment dans la liste Amazon (Etats-Unis), Apple (Australie), Deliveroo (Pays-Bas), Ikea (Pologne), Ryanair (Espagne), Starbucks (Etats-Unis), Stellantis (Pologne) ou encore Uber (Pays-Bas).

Dans un communiqué publié vendredi midi, la Confédération européenne des syndicats (CES) s’est indignée que 15 des entreprises ayant enfreint les droits des travailleurs aient bénéficié de « plus d’un milliard d’euros » de financements européens.

Ryanair aurait à elle seule reçu 962 millions, Amazon 29,5 millions et Ikea 28,7 millions.

Les « patrons » coupables d’atteintes aux droits des travailleurs « sont scandaleusement récompensés par de lucratifs marchés publics », regrette la secrétaire générale de la CES, Esther Lynch.

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