Vague Omicron au Maroc: doit-on craindre une désorganisation sociale?

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Des passants masqués et non masques dans une rue de Rabat. DR.

Alors que le variant Omicron se propage au Maroc à grande vitesse, la vie sociale et économique est-elle menacée? Réponse avec deux experts, Dr Tayeb Hamdi, médecin généraliste et chercheur en politiques et systèmes de santé, et Pr Yahia Cherrah, membre du comité scientifique ad hoc pour la vaccination anticovid. 

La vague Omicron se répand au Maroc depuis deux semaines, avec une hausse hebdomadaire des cas positifs de 50% entre la semaine dernière et la semaine précédente. Le nouveau variant jugé moins virulent, mais plus transmissible s’installe actuellement un peu partout dans le monde.

Il y a cinq jours, le Conseil scientifique français a alerté quant à « la possible désorganisation sociétale » du pays, « à partir de début janvier », à cause d’une éventuelle hausse des arrêts maladie corrélée à celle des cas covid.

Ce scénario est-il probable au Maroc? « Malheureusement et heureusement, non », répond Dr Tayeb Hamdi. Pour le médecin généraliste et chercheur en politiques et systèmes de santé, le Maroc ne doit pas craindre une désorganisation sociale faisant suite à la hausse des cas Omicron, et ce, pour deux raisons. La première est le manque de diagnostic.

« En France, quand ils détectent 200.000 cas, c’est qu’ils ont fait plus d’un million de tests. Pour isoler beaucoup, il faut tester beaucoup, ce que ne fait pas le Maroc, donc on ne risque pas de voir énormément de cas positifs par jour », explique-t-il. « Au Maroc, si on fait 50.000 tests, ce qui est le maximum connu par le pays jusqu’à présent en termes de diagnostic, on va pouvoir détecter entre 12.000 et 15.000 cas maximum. Ce n’est pas 15.000 personnes qui vont perturber la vie sociale ».

La seconde raison pour laquelle le Maroc n’a pas à craindre une perturbation de sa vie sociale due à Omicron, réside dans le fait que « les personnes cas contact ne se confinement pas automatiquement », « même les personnes positives ne s’isolent pas correctement », poursuit le spécialiste. « Ainsi, je dis malheureusement, car cet état de fait va donner un coup d’accélérateur à la vague, mais heureusement car la vie sociale ne sera pas perturbée ».

La France, qui en est à sa cinquième vague de l’épidémie, a comptabilisé plus de 100.000 cas positifs au covid-19 samedi 25 décembre, jour de Noël et donc de grands rassemblements familiaux. Un niveau qui n’avait jamais été atteint auparavant dans L’Hexagone. En découle un nombre important d’abstentions au travail dans le secteur des transports qui s’est vu contraint déjà d’annuler des trains, mais aussi dans les hôpitaux où le personnel soignant est débordé et insuffisant. Pour pallier ce problème, le Conseil scientifique français envisage d’assouplir les conditions d’isolement des personnes contaminées et des cas contact.

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Au Maroc, la situation restera stable « jusqu’au moment où l’Etat prendra des mesures très restrictives pour freiner le virus, et cela concernera toute la population, dès lors on pourra craindre pour la vie sociale », projette Dr Hamdi. « Ce sont des mesures qui viendront remplacer le manque de diagnostic ainsi que le manque de respect des mesures d’isolement ».

Pr Yahia Cherrah, membre du comité spécial pour la vaccination anticovid, se dit en partie d’accord avec la lecture de son confrère. « Généralement, les personnes qui font des tests sont celles chez qui la maladie est déjà déclarée. Certains pays ont connu une désorganisation sociale également parce que les fêtes de fin d’année ont mené un nombre de personnes conséquent, rendant visite à leurs familles, à aller se faire tester. On a donc découvert beaucoup de cas », analyse-t-il.

Et d’ajouter: « Lors des précédentes vagues au Maroc, on a réussi à gérer, il n’y a pas eu de blocage total. Le royaume a quand même du recul; comme le reste du monde, on a les moyens de gérer les différentes vagues que ce soit au niveau hospitalier ou autres pour limiter les dégâts. »

Perturbations sociales

Toutefois, l’expert estime que le pays n’est pas à l’abris de perturbations sociales « si les gens ne respectent pas les consignes de sécurité telles que le port du masque, la distanciation sociale, etc. ». Il rappelle la règle selon laquelle une personne positive au covid-19 doit « logiquement s’isoler et ne pas partir au travail même si elle ne présente pas de symptômes ». A ce titre, il indique que la moyenne mondiale de confinement s’élève à 10 jours pour les cas positifs et sept jours pour les cas contact. « A la découverte d’Omicron, on était à 15 jours pour les contaminés mais c’est passé à 10 jours avec l’actualisation des données », précise-t-il.

Quant à l’éventualité d’un retour au confinement, les deux experts ne l’envisagent pas. « Un confinement, c’est difficile, mais on aura des mesures qui y ressemblent, cela est très probable. On verra alors la désorganisation sociale, scolaire, économique », prévoit Dr. Tayeb Hamdi. « Si le système de santé est saturé, le confinement est le seul moyen de ralentir l’épidémie, mais nous n’arriverons pas jusque-là. On le voit déjà en Europe, le taux de contamination est très élevé mais les hôpitaux ne sont pas saturés. C’est le résultat de la campagne de vaccination », observe de son côté Pr Cherrah qui invite les derniers quatre millions de réfractaires au Maroc à aller se faire vacciner.

Pour rappel, la troisième vague de transmission communautaire liée au variant Omicron a débuté il y a deux semaines au Maroc et serait estimée à onze semaines, soit plus rapide et plus courte que la vague Delta. C’est ce qu’a annoncé lundi 27 décembre, Mouad Mrabet, coordinateur du Centre national des opérations d’urgence de santé publique. Il a anticipé un pic durant la semaine du 17 au 23 janvier 2022, en fonction du degré d’adhésion de la population aux mesures préventives et aux dispositifs mis en place par le gouvernement.

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