Semi-conducteurs: malgré les sanctions, le secteur chinois garde le moral

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Semi-conducteurs: malgré les sanctions, le secteur chinois garde le moral
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« Soutenez les puces chinoises »: c’était le slogan d’un récent salon des semi-conducteurs à Shanghai, reflétant l’optimisme du secteur malgré la pluie de sanctions américaines ces dernières années.

Les stands du salon Semicon, organisé la semaine dernière dans la mégapole de l’est de la Chine, étaient remplis de visiteurs curieux d’observer de plus près ces micropuces.

Hautement stratégiques, elles sont essentielles à la production d’une multitude d’appareils électroniques, des machines à café aux voitures électriques en passant par les smartphones, et sont aussi présentes dans l’armement.

Et depuis quelques années, elles sont au coeur d’un bras de fer géopolitique, les Etats-Unis et plusieurs pays européens ayant décidé de bloquer les exportations de technologie avancée dans les semi-conducteurs vers la Chine, par crainte de son utilisation à des fins militaires.

En réaction, Pékin accélère ses efforts pour atteindre l’auto-suffisance: un sujet omniprésent au salon Semicon, avec des slogans comme « Surmonter le goulot d’étranglement technologique, nationaliser les matériaux clés des puces chinoises ».

« Plus les Etats-Unis nous imposent des restrictions, plus vite certaines de nos entreprises nationales vont se développer », assure à l’AFP un professionnel du secteur, M. Wang.

Même opinion pour Vicky Zheng, représentante d’une entreprise d’assemblage de puces de Qingdao (est): selon elle, les restrictions vont forcer la Chine à « se développer davantage pour rattraper son retard, voire pour remplacer des produits, afin de disposer de solutions plus nombreuses et de meilleure qualité ».

M. Huang, exposant dont l’entreprise de test de semi-conducteurs, King Long Technology, se trouve à Suzhou, près de Shanghai, affiche lui aussi sa confiance.

« Dans un environnement soumis à une telle pression, la Chine fait des progrès très rapides pour augmenter ses capacités en technologie et en production, ainsi que dans la formation du personnel technique », assure-t-il.

La preuve de ces progrès: en septembre, le géant chinois Huawei a dévoilé son nouveau téléphone Mate 60 Pro, équipé d’une puce Kirin 9000s.

La puce se veut la remplaçante, fabriquée localement, de la Kirin 9000 produite par le champion taïwanais du secteur, TSMC. Huawei n’a plus le droit de se fournir auprès de TSMC en raison des sanctions américaines.

Mais la provenance exacte de cette puce est désormais remise en question.

Jeudi dernier, un responsable américain a déclaré que le poids lourd des semi-conducteurs chinois Smic avait pu violer la loi américaine en fournissant Huawei malgré les sanctions. Les actions de Smic ont alors chuté en Bourse.

M. Huang, du groupe King Long, reconnaît que les restrictions étrangères vont « quand même avoir un impact » sur le secteur, surtout à court terme.

La plupart des fabricants chinois de puces ont d’ailleurs annoncé des pertes l’an dernier. Loongson Technology, qui en conçoit, a essuyé une perte nette de 329 millions de yuans (42 millions d’euros), contre un bénéfice de 5,2 millions de yuans un an plus tôt.

Loongson, placé en 2023 sur liste noire par le département américain du Commerce et donc privé de tout accès aux technologies américaines, a admis le mois dernier que ses coûts en recherche et développement avaient grimpé de 36%.

Pour Scotten W. Jones, du site spécialisé TechInsights, la technologie de fabrication de semi-conducteurs dont dispose la Chine actuellement est « bien loin derrière les meilleurs modèles de ASML », le géant néerlandais du secteur.

« Si la Chine est prête à investir suffisamment, elle pourra probablement rattraper le reste du monde, mais je pense qu’il faudra attendre au moins une décennie », estime l’expert.

Pékin semble en effet prêt à investir: selon l’agence Bloomberg, la Chine est en train de lever plus de 27 milliards de dollars pour un fonds dédié à l’industrie des puces.

D’où l’optimisme observé au salon Semicon de Shanghai: selon Robyn Klingler-Vidra, une spécialiste de l’innovation au King’s College à Londres, il est « justifié » par le rythme auquel les entreprises chinoises sont en train de rattraper leur retard.

Elle cite la nouvelle puce de Huawei fabriquée par Smic, soulignant que les deux entreprises sont en train d' »étudier » des puces encore plus sophistiquées.

« Cela va à l’encontre des idées selon lesquelles, malgré des investissements gouvernementaux importants, la Chine ne serait compétitive que dans des secteurs déjà matures », observe Mme Klingler-Vidra.

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