« Que se taisent les armes! », lance le pape pendant sa visite historique en Irak

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« Que se taisent les armes! », a lancé le pape François peu après sa venue « longtemps attendue » en Irak, la première visite papale de l’histoire dans le pays ravagé par les guerres et désormais confronté à la pandémie, saluant des chrétiens restés malgré tout.

Sous haute protection et circulant seul et masqué sous un strict confinement anti-Covid, le souverain pontife de 84 ans est venu en « pèlerin de paix » réconforter l’une des plus anciennes communautés chrétiennes au monde, étiolée par violence et pauvreté.

Au cours de son séjour — qui s’achèvera lundi au terme de 1.445 km parcourus principalement par les airs pour éviter les zones où se terrent toujours des jihadistes — le pape tendra également la main aux musulmans en rencontrant le grand ayatollah Ali Sistani, plus haute autorité pour de nombreux chiites d’Irak et du monde.

Le chef des 1,3 milliard de catholiques du monde a évoqué tous les sujets brûlants en Irak devant ses plus hauts responsables, parmi lesquels le président Barham Saleh, qui a envoyé l’invitation officielle pour cette visite sans précédent.

 

 

« Assez de violences, d’extrémismes, d’intolérances », a dit le pape. Assez aussi, de la « corruption », la raison pour laquelle des centaines de milliers d’Irakiens ont manifesté pendant des mois fin 2019. A l’époque déjà, le pape avait exhorté l’Irak à cesser de réprimer ses jeunes en demande de justice.

Il faut « édifier la justice », a-t-il de nouveau martelé.

Et que « personne ne soit considéré comme citoyen de deuxième classe », surtout pas les chrétiens — 1% de la population dans ce pays musulman — ni les Yazidis, minorité martyre du groupe Etat islamique (EI) dont des milliers de ses femmes ont été vendues sur les « marchés aux esclaves » des jihadistes.

François a dénoncé des « barbaries insensées et inhumaines » perpétrées en Irak, la Mésopotamie antique, « berceau de la civilisation ».

Il a encore rappelé « la présence très ancienne des chrétiens sur cette terre » où est né selon la tradition Abraham, plaidant pour « leur participation à la vie publique » comme « citoyens jouissant pleinement de droits, de liberté et de responsabilité ».

Après cette étape politique, le pape va entamer la partie plus spirituelle et populaire de son voyage, celle qu’il préfère de loin.

 

 

Le programme est ambitieux. Il va commencer par une prière en la cathédrale Notre-Dame du Perpétuel secours en fin de journée. Cette église catholique du centre de Bagdad avait été le théâtre à la Toussaint 2010 de la prise d’otages la plus sanglante contre des chrétiens d’Irak: 53 morts.

Il ira ensuite à Najaf, Ur, Erbil, Mossoul, Qaraqosh: à chaque fois, il ne verra que quelques centaines de personnes, à l’exception d’une messe dimanche dans un stade d’Erbil au Kurdistan, en présence de plusieurs milliers de fidèles.

Bagdad a assuré avoir pris toutes les mesures de sécurité « terrestres et aériennes ». Et, signe de détente inespéré dans les tensions irano-américaines toujours latentes en Irak, un des groupuscules qui revendiquent parfois des tirs de roquette sur des Américains a annoncé une trêve le temps de la visite papale.

Au sujet des ingérences étrangères, le pape a appelé « les nations » à ne pas « imposer des intérêts politiques ou idéologiques » à l’Irak.

Pour Saad al-Rassam, chrétien à Mossoul, ville toujours en reconstruction après la guerre contre l’EI, ce voyage tombe à point nommé dans ce pays qui a vu son taux de pauvreté doubler à 40% en 2020. « Nous espérons que le pape expliquera au gouvernement qu’il doit aider son peuple », dit-il à l’AFP.

Au-delà des difficultés sécuritaires ou économiques que subissent les 40 millions d’Irakiens, les chrétiens dénoncent des discriminations et le peu d’aide du gouvernement pour récupérer leurs maisons ou leurs terres, souvent accaparées par des miliciens — parfois chrétiens — ou des proches de politiciens.

 

Lire aussi: L’Irak s’apprête à recevoir le pape entre Covid, roquettes et manifestations

 

Malgré tout, le pape exhorte les chrétiens à rester ou à revenir en Irak où ils sont 400.000, contre 1,5 million il y a vingt ans.

Un appel au retour « obligatoire » mais « difficile », reconnaît le cardinal le cardinal Leonardo Sandri, qui chapeaute la « Congrégation pour les églises orientales » au Vatican et accompagne le pape, tant l’Irak va depuis 40 ans de guerre en crise.

Selon la fondation « Aide à l’Eglise en détresse », seuls 36.000 des 102.000 chrétiens partis du nord irakien sont revenus. Parmi eux, un tiers dit prévoir de quitter le pays d’ici 2024 par peur des miliciens et en raison du chômage, de la corruption et des discriminations.

Moment historique samedi quand le pape sera reçu dans la ville sainte de Najaf (sud) par le grand ayatollah Ali Sistani, 90 ans et jamais apparu en public.

Le souverain pontife participera également à une prière à Ur avec des dignitaires chiites, sunnites, yazidis et sabéens.

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