Référendum constitutionnel en Mauritanie, l’opposition dénonce un “coup de force”

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A l’issue d’une campagne houleuse, les Mauritaniens sont appelés à se prononcer ce samedi par référendum sur une révision de la Constitution dénoncée par les principaux partis de l’opposition qui appellent au boycott.

L’opposition dite radicale crie au « coup de force » du président Mohamed Ould Abdel Aziz, 60 ans, qu’elle soupçonne de vouloir créer un précédent qui pourrait faciliter à terme une suppression de la limitation à deux du nombre de mandats présidentiels.

Les bureaux de vote doivent ouvrir de 07H00 à 19H00 GMT dans ce vaste pays en grande partie désertique limitrophe du Sénégal, du Mali, de l’Algérie et du Maroc.

Les résultats attendus en début de semaine prochaine
Un des enjeux sera le taux de participation parmi les quelque 1,4 million d’inscrits, puisque l’opposition radicale s’est engagée dans un « boycott actif » du scrutin, en espérant reprendre à son compte une éventuelle forte abstention.

Elaborée en septembre-octobre lors d’un dialogue entre le pouvoir et l’opposition dite modérée, cette révision porte sur le remplacement du Sénat par des Conseils régionaux élus et sur la suppression du médiateur de la République et du Haut conseil islamique.

Elle prévoit également une modification du drapeau national, auquel seraient ajoutées deux bandes rouges pour « valoriser le sacrifice des martyrs » de la résistance à la colonisation française qui s’est achevée en 1960.

En mars, la révision de la loi fondamentale a été adoptée par l’Assemblée nationale, mais rejetée par le Sénat. Le président a passé outre en convoquant dans la foulée un référendum.

Interventions musclées de la police
Le dernier jour de la campagne, jeudi, a été à nouveau marqué par des interventions musclées de la police, qui a dispersé à coups de gaz lacrymogène et de matraque des opposants dans trois quartiers de la capitale Nouakchott.

A Genève, le Bureau des droits de l’homme de l’ONU s’est dit jeudi « préoccupé » par le climat de la campagne et « l’apparente suppression de certaines voix dissidentes ».

Arrivé au pouvoir par un coup d’Etat en 2008, le président Abdel Aziz, un ancien général élu en 2009 puis réélu en 2014 pour cinq ans, doit faire face à une fronde du Sénat, pourtant majoritairement favorable au pouvoir, qui s’est cabré contre un texte signifiant sa disparition.

Alors qu’une vingtaine de sénateurs ont entamé mercredi un sit-in au Parlement afin d’exiger des excuses du président pour les avoir accusés de corruption et pour qu’il renonce au référendum, M. Abdel Aziz a renouvelé ses accusations lors de son dernier grand meeting de campagne jeudi soir à Nouakchott.

« Ils me demandent de leur présenter des excuses, je ne le ferai jamais », a lancé le chef de l’Etat, en estimant que ces sénateurs avaient « trahi la Nation ».

« Ces gens ont selon leurs propres dires procédé à des partages d’argent pris sur des hommes d’affaires pour saper les institutions du pays », a-t-il accusé, appelant la foule de ses partisans à décréter la dissolution du Sénat « qui coûte très cher et ne correspond à rien, à aucun besoin ».

L’opposition radicale, regroupée au sein d’une alliance, a accusé vendredi le pouvoir de « préparer une fraude à grande échelle ».

La violence « n’est pas notre choix » mais il « finira pas s’imposer aux gens », a également averti son chef de file, Jemil Ould Mansour, qui dirige le parti islamiste Twassoul, en estimant que « seul le pouvoir en endossera la responsabilité ».

L’opposition soupçonne le chef de l’Etat de vouloir aller au-delà de son second mandat, qui s’achève en 2019, malgré ses dénégations répétées. Elle motive ses inquiétudes par les déclarations de ministres ou de proches du président en faveur d’un troisième mandat.

Les Mauritaniens voteront samedi dans deux urnes: l’une pour les principaux amendements et l’autre pour la modification du drapeau.

L’unique parti de l’opposition appelant à voter non, la Convergence démocratique nationale (CDN) a dénoncé une « campagne inégalitaire », le oui bénéficiant de la quasi totalité du temps d’antenne officiel. Toutes les autres formations en campagne, de la majorité ou de l’opposition modérée, appellent à voter oui.

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