Professeur tué en France: qui est Abdelhakim Sefrioui, l’islamiste franco-marocain toujours en garde à vue ?

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Abdelhakim Sefrioui arrêté le 29 décembre 2012 lors d’une manifestation en soutien à l’islamiste palestinien Cheikh Yassine. (Photo Miguel MEDINA / AFP)

Harangueur charismatique et sulfureux, Abdelhakim Sefrioui, en garde à vue depuis samedi dans le cadre de l’enquête ouverte sur l’assassinat de l’enseignant Samuel Paty, sillonne depuis plus de 15 ans la région parisienne, organisant manifestations, prières de rue et actions devant des lycées.

De Saint-Ouen (nord de Paris), où il milite déjà contre une proviseure de lycée, à Drancy (nord-est), en passant par Les Ulis (sud-ouest de la capitale), il a, avec différents collectifs, déstabilisé « des collectivités, des mairies, des élus pour les pousser à prendre des décisions concernant l’islam ou le problème israélo-palestinien », raconte Noam Anouar, délégué syndical Vigi (classé à gauche) et ancien policier du renseignement à la préfecture de police de Paris.

Né en 1959 à Fès, franco-marocain, marié à une Française convertie et père de deux enfants, selon plusieurs interlocuteurs, Abdelhakim Sefrioui apparaît dans les médias au début des années 2000, alors que la France s’apprête à adopter la loi controversée sur le port de signes religieux à l’école.

Alors libraire rue Jean-Pierre Timbaud, artère parisienne parsemée de magasins de livres ou d’habits islamiques, il est interrogé par l’AFP à la veille de manifestations contre cette loi.

Ce texte – adopté au printemps 2004 – « a rendu flagrante une fissure » entre les musulmans et les autres, dit-il alors.

« Les chrétiens, les juifs, les homosexuels auraient le droit de manifester et on dit aux musulmans de se faire tout petits ? », s’agace-t-il, avant de prédire que la loi sur la laïcité va pousser à la création de « dizaines » d’établissements confessionnels musulmans.

 

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Ses enfants sont d’ailleurs, à l’époque, scolarisés à domicile, se souvient l’ancien maire des Ulis, ville de l’Essonne (sud de Paris) où il réside.

« Je m’en souviens très bien parce que j’avais été saisi par l’inspectrice de l’Education nationale. Il avait deux enfants et ne les scolarisait pas, et l’inspectrice voulait vérifier », raconte Paul Loridant.

Le maire va rapidement avoir maille à partir avec le militant. A la tête de l’association culturelle des musulmans des Ulis, Abdelhakim Sefrioui organise tous les samedis des manifestations pour réclamer l’augmentation de la surface de la future mosquée de la ville – amenant jusqu’à 200 personnes à prier sur la dalle de la mairie.

Entouré « d’une petite cour », M. Sefrioui « était très très provocateur, fier, sûr de lui…. Il disait «on sera majoritaire, parce qu’on fait plus d’enfants que vous», il avait une volonté de conquête », se rappelle l’élu.

 

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« A ma connaissance, ajoute-t-il, il était arrivé aux Ulis à la fin des années 90. Et puis, un jour, il a disparu ».

On retrouve Abdelhakim Sefrioui quelques années plus tard à Drancy (nord-est de Paris), où il mène une cabale contre l’imam Hassan Chalghoumi. Avec le collectif pro-palestinien Cheikh Yassine, qu’il a entretemps créé, il manifeste contre celui qu’il qualifie de « faux imam » pour ses bonnes relations avec la communauté juive et son soutien à la loi interdisant le voile intégral.

– Déstabilisation, dénigrement –

Un an après, on le retrouve aux côtés du groupe islamiste – dissout depuis par les autorités – Forsane Alizza: ils font pression sur la proviseure d’un lycée de Saint-Ouen (nord de Paris), après l’exclusion de lycéennes portant des jupes longues.

C’est « quelqu’un de sulfureux », d' »extrêmement violent verbalement », explique à l’AFP M’hammed Henniche, secrétaire général de l’Union des associations musulmanes du 93 (Seine-Saint-Denis, nord), qui s’est confronté à lui à plusieurs reprises.

« Personne ne peut le contrôler et le peu de gens qui ont essayé de travailler avec lui lui ont demandé de ne pas prendre la parole. Mais il fait ce qu’il veut », ajoute M. Henniche, responsable de la mosquée de Pantin, qui va être fermée pour six mois pour avoir relayé une vidéo dénonçant un cours sur la liberté d’expression dispensé par l’enseignant assassiné vendredi.

Depuis des années, « il est dans la déstabilisation et le dénigrement des responsables associatifs, c’est son seul objectif », avance M. Henniche.

Et il sait y faire: « il a l’intelligence, le savoir, pour détecter la chose qui va buzzer », ajoute le responsable, qu’il s’agisse de la loi sur le voile ou la vidéo d’un parent d’élève. « Il parle bien, il est à l’aise, il aime exister ».

Dans les vidéos de lui qui ont précédé la décapitation de Samuel Paty, on le voit la barbe blanche, bien taillée, raconter calmement sa rencontre avec l’administration du collège du Bois d’Aulne, où enseignait le professeur.

Depuis samedi, cet homme fiché S depuis des années est en garde à vue, comme quatorze autres personnes.

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