Espagne: une décision de justice contre Puigdemont crée la polémique

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Le rejet d’un recours du leader indépendantiste catalan Carles Puigdemont contre le mandat d’arrêt lancé à son encontre, alors même que la formation d’un nouveau gouvernement dépend de lui, a déclenché une polémique en Espagne. 

L’arrêt du Tribunal consitutionnel (plus haute institution judiciaire du pays) est survenu alors que le Premier ministre socialiste sortant Pedro Sánchez doit obtenir l’appui des sept députés du parti de Puigdemont, élus le 23 juillet, pour pouvoir être reconduit dans ses fonctions par la nouvelle assemblée, qui se réunira pour la première fois mercredi.

La « Salle des vacances » du TC, composée de trois magistrats de garde pendant l’été pour expédier les affaires courantes, a déclaré non recevable mercredi le recours déposé par les avocats de Puigdemont contre ce mandat d’arrêt, a confirmé jeudi à l’AFP un porte-parole du Tribunal.

Puigdemont vit en exil en Belgique depuis la tentative avortée de sécession de l’Espagne et un référendum d’autodétermination jugé illégal, organisé en 2017 par le gouvernement régional de la Catalogne, qu’il dirigeait à l’époque.

La décision de ces trois magistrats du TC, pris au milieu de l’été, presqu’en catimini, quelques jours seulement après le dépôt du recours, a stupéfait la classe politique et les milieux judiciaires en raison de son caractère rarissime.

Depuis 2017, tous les recours en lien avec la tentative de sécession de la Catalogne ont, en effet, toujours été déclarés recevables par le Tribunal constitutionnel, qui les a ensuite examinés en session plénière. A tel point que le parquet de ce même TC a décidé de faire appel de cet arrêt, a indiqué le porte-parole du Tribunal.

« Inhabituel »

L’arrêt a fait l’objet de critiques au sein même du TC. « C’est inhabituel », a déclaré jeudi María Luisa Balaguer, elle-même membre du Tribunal, dans une interview à la radio Cadena Ser.

« Je ne sais pas ce qui a incité ces personnes » à prendre une telle décision, alors qu’il est « habituel de déclarer recevables » ces recours, a-t-elle poursuivi, rappelant que « depuis 2017, tous ces dossiers ont été examinés en (séance) plénière ».

L’avocat de Puigdemont, Gonzalo Boyé, a ironisé sur la rapidité de la décision.

« On ne peut pas dire que le (Tribunal) Constitutionnel ne travaille pas (…) Nous avons présenté le recours le 31 juillet et il est déjà résolu (…) Même un procès rapide n’est pas aussi rapide », a-t-il écrit sur Twitter, rebaptisé X.

Pour sa part, Laura Borrás, l’une des dirigeantes de Junts per Catalunya (JxCat), le parti indépendantiste de Carles Puigdemont, a dénoncé sur X une décision prise « en pensant à l’investiture » du prochain chef du gouvernement, sans plus de précisions.

Elle faisait clairement allusion à la situation paradoxale résultant des élections législatives du 23 juillet: Sánchez, dont le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) est arrivé seulement deuxième avec 121 sièges, derrière le Parti populaire (PP, droite) et ses 137 sièges, a, malgré tout, des chances réelles de réunir les soutiens nécessaires pour être investi chef du gouvernement grâce au jeu des alliances.

Lire aussi. Espagne: l’extrême droite entre au gouvernement d’une quatrième région

Mais pour cela, il devra impérativement obtenir non pas la neutralité, mais un vote favorable de JxCat, qui exige en contrepartie un référendum d’autodétermination et l’amnistie pour tous les Catalans condamnés pour la tentative de sécession. L’arrêt n’est donc pas, a priori, une bonne nouvelle pour M. Sánchez.

Le secrétaire général de JxCat, Jordi Turull, a ainsi vu dans la décision du TC une nouvelle preuve qu’il existait « une stratégie de l’Etat contre l’indépendantisme ». « Et la stratégie ne ferme pas pendant les vacances », a-t-il ajouté.

« Le gouvernement craint que la décision (du TC) complique le processus d’investiture », titre, de son côté, jeudi le quotidien El País.

Le Parti socialiste et le PP se sont abstenus de tout commentaire, mais les milieux de gauche notent que sur les trois magistrats composant la « Salle des vacances » du TC, les deux qui ont pris la décision du rejet sont clairement identifiés comme des conservateurs, la troisième magistrate s’y étant opposée.

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