La Belgique craint une «nouvelle vague de djihadisme»

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© EMMANUEL DUNAND / AFP

La radicalisation en prison et le risque de récidive des condamnés pour terrorisme laisse planer sur le pays une menace persistante, alertent les services de renseignement dans un rapport publié vendredi.
Comme la France, la Belgique a été touchée à de nombreuses reprises par le terrorisme ces dernières années. D’abord en 2014 avec l’attentat du musée juif de Bruxelles, puis en 2016 avec l’attaque de l’aéroport et du métro de la capitale, où 32 personnes ont perdu la vie.
En mai dernier, une attaque à Liège a également fait trois morts à Liège. Pour la première fois depuis sept ans, les services de renseignement ont rendu public vendredi leur rapport d’activité 2017-2018. Un document unanimement salué par les médias belges par sa transparence et son franc-parler.
L’occasion pour la sûreté de l’État de dresser un tableau objectif de la menace terroriste. Et si, à l’heure actuelle, un attentat est «possible mais peu probable», la radicalisation en prison et la récidive des condamnés est un «problème d’une ampleur considérable». Et fait craindre une nouvelle vague extrémiste dans le pays.
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«Gangsters djihadistes»
La radicalisation en prison est tout sauf un phénomène nouveau en Belgique. «Dès 2014, les services de renseignement ont constaté que des dossiers de terrorisme avaient des ramifications au sein des institutions pénitentiaires. Certains terroristes entretenaient des contacts directs avec des détenus», relève ce rapport, consulté par Le Figaro. Un nombre croissant de criminels de droit commun ont été embrigadés.
«Leur détention constituait une étape décisive dans leur processus de radicalisation. C’est ainsi qu’est apparue une génération de “gangsters djihadistes”, de dangereux criminels sortis de prison et qui rejoignaient les rangs des combattants belges en Syrie», ajoute ce document. Ce phénomène «subsiste encore aujourd’hui», indique la sûreté de l’État.
Exemple concret avec Benjamin Herman, auteur de l’attaque de mai dernier à Liège. Les enquêteurs ont découvert que le jeune homme, qui a assassiné deux inspecteurs de police, s’était radicalisé en détention. Ce cas «est venu clairement (et dramatiquement) justifier la nécessité, pour les services de renseignement, de continuer à accorder une attention particulière aux prisons», note le rapport.
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Les autorités ont réussi à déceler deux types de comportements adoptés par les extrémistes en milieu carcéral: quand certains ont une attitude «ouvertement radicale en réponse au sentiment de frustration que leur impose l’environnement», d’autres «cultivent la discrétion afin de dissimuler leurs idées et s’arrangent pour ne pas se faire remarquer du personnel pénitentiaire». Des comportements qui rendent impossible le comptage des individus radicalisés.
Toutefois, les renseignements observent que le nombre de prisonniers liés au radicalisme et au terrorisme «n’a fait que s’accroître depuis 2014». En septembre 2018, on dénombrait ainsi 130 détenus condamnés pour terrorisme ou en détention préventive dans le cadre d’un dossier de terrorisme.
La crainte de la récidive
Les lourdes pertes de l’État islamique en Syrie ont considérablement ralenti leurs attaques en Europe ces derniers mois. Pour autant, ce conflit a agi comme «catalyseur» de la récidive des prisonniers, alerte le rapport. «Nombreux sont les individus condamnés en Belgique entre 2001 et 2011 dans des affaires de terrorisme et qui récidivent en tant qu’extrémistes islamistes ou terroristes», constate la sûreté de l’État. Et d’ajouter: «Le problème a pris une ampleur considérable.
Les prisons abritent aujourd’hui une population de détenus incarcérés pour terrorisme d’une importance jamais égalée auparavant. Du seul fait de l’importance de cette population, le risque de «contagion» est plus considérable que jamais».
Ainsi, la Belgique «devra encore faire face pendant un certain temps à une menace terroriste latente». Depuis 2012, le pays compte plus de 400 départs de djihadistes en Syrie, ce qui en fait l’un des tout premiers pourvoyeurs de combattants étrangers, à proportion de population.
Aujourd’hui, un tiers des combattants est revenu. Beaucoup sont morts et 150 sont encore actifs sur place. «L’implosion du califat n’a pas entraîné un retour massif», observe-t-on. Concernant les individus emprisonnés en ce moment, il s’agit de jeunes. À la fin de leur peine, la majorité d’entre eux sera âgée de 25 à 30 ans. «Les élans récidivistes de ce groupe d’individus détenus pour faits de terrorisme sont susceptibles d’entraîner une nouvelle vague d’extrémisme, voire de djihadisme dans notre pays», craignent les auteurs.

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