Sahara: les tergiversations de Londres

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Les gouvernements du Maroc et du Royaume-Uni ont signé, mardi à Rabat, un cadre stratégique de coopération portant sur l’action climatique, l'énergie propre et la croissance verte
Le ministre des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, Nasser Bourita (D), et le ministre d'Etat du Moyen-Orient, de l'Afrique du Nord, de l'Asie du Sud et des Nations Unies du Royaume-Uni de Grande Bretagne et d’Irlande du Nord, Lord Ahmad de Wimbledon ©Archives

Encore une fois, Londres botte en touche au sujet du dossier du Sahara en préférant renvoyer la balle dans le camp des Nationes Unies et ce malgré les répétitifs appels appelant le gouvernement britannique à envisager une reconnaissance de la marocanité du Sahara. 

Dans une question écrite adressée au gouvernement britannique, le député Patrick Grady, représentant du parti national écossais, formation nationaliste à velléité séparatiste, a interpellé le Secrétaire d’État adjoint aux Affaires étrangères, chargé des Amériques et des Caraibes, David Rutley, au sujet du cadre stratégique de coopération entre le Royaume-Uni et le Maroc sur l’action climatique, l’énergie propre et la croissance verte, signé le 9 mai 2023.

L’élu de cette principale formation indépendantiste écossaise cherchait à savoir “si la coopération avec le Maroc sur l’énergie propre inclura des activités au sein du Sahara occidental”.

La réponse du ministre britannique puise ses éléments de language davantage dans le registre littéraire que politique: “Le Cadre stratégique de coopération entre le Royaume-Uni et le Maroc sur l’action climatique, l’énergie propre et la croissance verte est un protocole d’accord non contraignant qui établit les bases sur lesquelles la coopération bilatérale peut être développée dans les secteurs de l’action climatique, de l’énergie propre et de la croissance verte entre le Royaume-Uni et le Maroc. »

Après cette introduction en guise, au choix, de rappel ou de diversion, David Rutley se prononce, timidement bien entendu tout en restant à équidistance des deux belligérants. “Actuellement, aucune activité dans le Sahara occidental n’est couverte par le Cadre. Toutes les activités sont examinées au cas par cas”.

Une réponse qui découragerait les plus téméraires des investisseurs à venir s’implanter dans cette zone. De même, elle va à l’encontre de ce que préconisent des institutions britanniques autour du renforcement du potentiel économique de cette région, comme l’a relevé l’Institut britannique pour le libre-échange (IFT).

Sur cette même lignée, le député écossais soumet une autre question ayant trait, cette fois-ci aux ressources naturelles des provinces du sud. Ainsi donc, “en référence à la réponse du 9 février 2024 à la Question 12714 sur le Sahara occidental: Ressources naturelles, si la politique de son département prend en compte que toute activité commerciale au Sahara occidental nécessite l’accord de représentants reconnus du peuple sahraoui pour être conforme au droit international”.

C’est à quoi le responsable britannique répond en soulignant que “nous ne considérons pas l’activité commerciale comme illégale au Sahara occidental, à condition qu’elle respecte les intérêts du peuple sahraoui”. David Rupley sait pertinemment que la question du respect des intérêts des sahraouis est le détail dans lequel se cache le diable. Car c’est à travers cette brèche que les séparatistes et leurs alliés agitent leurs épouvantails des procès judiciaires en instrumentalisant, à satiété, cette ubuesque question de « représentativité » des populations de ces provinces.

Wait and see 

Fidèle à sa politique légendaire de « noyade » de poisson, Londres esquive majestuesement le piège écossais en renvoyant la balle dans le camp de l’Onu.

Le Royaume-Uni continue de soutenir les efforts dirigés par l’ONU et le travail de Staffan de Mistura en tant qu’envoyé personnel du Secrétaire général de l’ONU pour le Sahara occidental. Nous encourageons également un engagement constructif dans le processus politique et surveillons les progrès réalisés”, conclut le diplomate britannique.

De fait, la réponse adressée par le responsable britannique, et publiée le 23 avril, laisse un peu perplexe. Ou plutôt décevante pour appeler les choses par leur nom.

Le gouvernement britannique, et contrairement à son homologue espagnol ou français, s’est libéré des contraintes de l’Union européenne et de ses instances. Pas de procès en perspective pouvant compromettre les engagements des entreprises britanniques comme c’est le cas pour les firmes européennes obligées à composer avec les manœuvres judiciaires des séparatistes.

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Le gouvernement de Rishi Sunak avait donc une occasion pour se départir de son flegme britannique et reconsidérer, même légèrement, sa position vis-à-vis de ce dossier. D’autant plus qu’il existe un précédent judiciaire qui soutient cette démarche: La haute cour britannqiue a rejeté, en 2023, le pourvoi déposé par le Polisario au sujet de l’accord d’association Maroc-Royaume-Uni.

Dans cette même lignée, plusieurs voix britanniques ont appelé à secouer ce statu quo. »Avant ma visite au Maroc, j’ai adressé une lettre écrite au ministre britannique des Affaires étrangères, David Cameron, afin d’attirer son attention sur le retard qu’a pris le Royaume-Uni sur la question par rapport aux États-Unis« , déclara, début janvier, le député britannique Liam Fox.

L’on sait que les Anglais sont longs à la détente, mais au lendemain de la déclaration américaine concernant le Sahara, les regards se sont vite dirigés et posés avec insistance sur Londres. Sera-t-elle la prochaine à reconnaître la marocanité du Sahara?

Car, les mielleuses déclarations sont certes un témoignage d’une bonne entente mais en politique, le devoir de faire prévaut sur le devoir de dire!

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