« A cause de niveaux sonores trop forts, la surdité survient plus précocement » (ORL)

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Photo d'illustration. Crédits photo: Matt Dutile/AFP

Les bruits environnants, notamment avec l’usage abondant d’appareil électroniques auditifs, provoquent la surdité de plus en plus précoce. Et le Maroc n’est pas épargné par le phénomène. 

L’Unesco organisait du 16 au 29 janvier 2023 en France la 20e édition de la Semaine du Son autour du thème «Savoir écouter, savoir se parler». L’objectif de cette initiative est de « sensibiliser le public et les élus à l’importance sociétale des sons et de la qualité des environnements sonores ». A cette occasion, H24Info s’est entretenu avec Dr Sara Halily, ORL à Casablanca, au sujet de la santé auditive de la population au Maroc.

Habitants des grandes villes, nous vivons dans un monde où le bruit est quasi-permanent. Sans compter les écouteurs et casques systématiquement portés aux oreilles des jeunes et moins jeunes pour écouter musiques et autres contenus. Le problème, c’est que bien souvent, le niveau sonore n’est pas adapté à notre ouïe et se révèle beaucoup trop fort.

« Les conséquences de ce phénomène que nous observons sont surtout les surdités précoces, qui au lieu d’arriver normalement vers 60 ans, touchent certaines personnes vers 45 ans », observe la médecin qui explique que la plupart du temps, nous écoutons les contenus à travers nos appareils électronique « avec un niveau sonore trop fort ».

Surdité précoce ou veillissement auditif?

En France, plus de sept millions de personnes reconnaissent avoir au moins une déficience auditive soit 11,2% des Français, estimait une enquête réalisée en 2014 par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) et citée par l’AFP.

Si une partie des cas de surdité est d’origine héréditaire, « il y a des manifestations du vieillissement auditif qui peuvent apparaître dès 30, 40 ou 50 ans. Et dans ces cas-là, le bruit est l’une des causes les plus évidentes », explique aussi à l’AFP  le professeur Paul Avan, qui dirige le Centre de recherche et d’innovation en audiologie humaine (CERIAH).

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« On s’aperçoit que la qualité des sons utilisés est souvent médiocre, or le système auditif n’aime pas être sollicité constamment. Il faut retrouver du silence, même un minimum, et des sons naturels pour permettre au moins de temps en temps à notre oreille interne de se reposer », souligne ce chercheur.

Dr Sara Halily pointe aussi du doigt les sources de bruits professionnelles, qui sont souvent les plus gênantes car subies, « comme sur les chantiers, dans les hôtels, les boites de nuit, qui évoluent en permanence dans le bruit » ou encore « les personnes en centre d’appel ».

Outre la déficience auditive ou la surdité, l’experte attire l’attention sur les conséquences générales d’une surexposition au bruit sur la santé du patient: « une personne atteinte de surdité peut connaître la dépression, des insomnies, des acouphènes et subir un isolement social ».

Une sensibilisation qui prend du temps

« Notre discours peine à convaincre car il faut s’exposer longtemps pour avoir un déficit. Une personne peut donc aller en boite de nuit, écouter de la musique à plus de 100 décibels et se porter très bien le lendemain. Mais certaines personnes découvrent qu’elles sont sourdes à 60 ans et c’était évitable », déplore Pr Avan, indiquant que « sensibiliser sur ce qu’est un bon son est un travail difficile qui devrait être commencé dès l’école ».

De son côté, Dr Halily invite à « prendre conscience » des bruits qui sont trop forts ou gênants pour l’oreille afin de « s’en protéger », « même si on ne pas contrôler le bruit environnant de la vie quotidienne, il y a des choses que l’on peut maîtriser comme baisser le son des écouteurs, s’éloigner des baffes, mettre un casque pour protéger ses oreilles quand on travaille avec des machines bruyantes »… « A nous de cette façon de créer notre environnement sain », énonce-t-elle. « Quand c’est le travail, on n’a souvent pas le choix de rester ou quitter. Par contre, on a le choix d’éviter certains environnements à l’extérieur ».

Selon une autre étude réalisée fin novembre par OpinionWay sur le bruit dans les cafés, bars et restaurants en France, 65% des répondants disent avoir déjà renoncé à un lieu de restauration à cause du bruit. Dans ce pays, les conséquences sanitaires comme économiques du bruit sont estimées à environ 145 milliards d’euros par an, dont 42 milliards pour la seule Ile-de-France (source: Ademe, Agence de la transition énergétique). Des labels devraient voir le jour pour valoriser les initiatives d’espaces calmes ou de « moments apaisés » prises par les collectivités et les entreprises privées.

« Au Maroc, on commence à voir des campagnes de prévention, c’est de plus en plus régulé. Je commence à recevoir systématiquement dans mon cabinet des employés de centres d’appel, avant même que les entreprises les embauchent. Celles-ci leur font faire une audiométrie avant la prise de poste, puis annuellement. Au moindre problème, il y a un aménagement du code du travail. Toutes les sociétés qui se respectent imposent des règles strictes par rapport au port du casque, à la protection de l’employé », développe Dr Halily au sujet du monde du travail.

Et de conclure: « Le médecin du travail doit faire en sorte que les employés soient protégés. Il faut accorder une grande place dans le monde professionnel à la médecine préventive du travail ».

 

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