L’ex-archevêque de Tanger révèle la crise diplomatique évitée entre Rabat et le Vatican

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L'ex-archevêque de Tanger en compagnie du pape François./Crédits: DR.

L’ex-archevêque de Tanger, Santiago Agrelo, est revenu sur les raisons de son départ du Maroc en 2019 après la brouille diplomatique entre Rabat et le Vatican suite à ses déclarations sur la situation des migrants dans le royaume.

Invité par la revue « Vida religiosa » dans une table ronde sur l’incidence politique des organisations ecclésiastiques, Santiago Agrelo, qui a officié pendant 12 ans au Maroc, a partagé son expérience et a révélé les véritables raisons derrière son départ à la suite à la visite du pape François au Maroc.

En pleine préparation de la visite du Pape, effectuée les 30 et 31 mars 2019, Santiago Agrelo reçoit un courrier la nonciature (« ambassade » du Vatican). « Chère excellence (…) Je tiens à vous informer que le vendredi 7 mars dernier, j’ai été convoqué par le ministre des Affaires étrangères du Maroc en raison de l’interview que vous avez donnée à l’occasion de la conférence de presse précédant la visite apostolique du Saint-Père », lit-on dans le courrier de la nonciature, daté du 12 mars, divulgué par le site Religion Digital.

Dans le même courrier, la nonciature demande à l’archevêque de « s’abstenir d’accorder des interviews sur la question des émigrés, dans lesquelles le gouvernement du Maroc et sa politique sont critiqués ».

« Vous savez parfaitement qu’en ce moment nous n’avons pas besoin d’interviews qui créent un malaise entre le gouvernement et le peuple marocain », poursuit la nonciature, qui suggérait également à l’archevêque de « ne pas entrer dans l’évaluation de la question de la liberté de conscience, une question très difficile et dangereuse, qui ne nous concerne pas, nous autres étrangers, mais qui relève de la responsabilité du Roi et de son peuple ».

La nonciature a ainsi ordonné à Santiago Agrelo d’évoquer uniquement « la question humanitaire des migrants et l’assistance que le personnel et l’archevêque de Tanger accomplissent louablement en faveur des émigrés ».

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Dans l’interview en question, publiée la veille de la convocation de la représentation du Vatican par le ministère des Affaires étrangères, Santiago Agrelo estimait que depuis son arrivée au Maroc « la situation des migrants avait empiré », pointant du doigt les politiques européennes et les actions des autorités marocaines et espagnoles dans la gestion des flux migratoires.

« La police peut à n’importe quel moment les (migrants) arrêter et les renvoyer, sans qu’aucun avocat ne soit présent et sans qu’un juge ne puisse les écouter, pour savoir pourquoi ils sont au Maroc, ce qu’ils cherchent ou ce qu’ils fuient. Ils sont ainsi dans une situation d’extrême vulnérabilité. C’est pourquoi notre église tente d’être à leurs côtés et de les écouter », avait affirmé l’archevêque, qui espérait que le Pape évoque les problématiques liées à la migration durant sa visite.

Ferme dans ses propos, l’archevêque avait souligné dans un courrier à la nonciature n’avoir « jamais manqué de respect à aucun gouvernement ». « Que la défense des droits des migrants dérange un gouvernement me surprend, tout comme comme je suis surpris par la plainte du gouvernement du Maroc et le fait que la nonciature n’ait pas défendu ma liberté. Mais lorsque vous agissez consciencieusement et défendez ce que vous pensez devoir défendre dans l’arène politique, vous devez être prêt à payer en personne », avait-il écrit.

Le pape François a officiellement accepté la démission de Santiago Agrelo en mai 2019. L’archevêque avait déposé sa démission pour « cause d’âge » en 2017, mais cette brouille diplomatique a finalement acté son départ officiel.

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