Jouahri : «Les banques marocaines sont présentes dans plus d’une trentaine de pays en Afrique »

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Jouahri décortique les besoins de l'Afrique en termes d'intégration économique
© @BankAlMaghrib

Le gouverneur de la Banque centrale, Abdellatif Jouahri, a souligné ce mercredi à Dakhla l’importance d’établir une intégration économique complète en Afrique pour atteindre la prospérité souhaitée.

Dans un discours prononcé lors de l’ouverture de la cinquième édition des « Journées internationales de la macroéconomie et des finances », organisée sur trois jours sous le thème « L’intégration économique en Afrique : la voie vers un avenir plus prospère », Jouahri a indiqué que cette intégration économique doit être bénéfique pour toutes les parties et ne pas se faire au détriment des pays et des populations les plus vulnérables.

Tout en rappelant que « l’intégration économique favorise la transformation structurelle, les économies d’échelle, l’intensification des échanges et le développement des chaînes de valeur, ainsi que l’émergence de marchés de taille suffisante pour attirer les investissements », il a souligné que le continent africain reste « très peu intégré ». « La part du commerce intrarégional dans le total des échanges internationaux des pays africains reste limitée, ne dépassant pas 12% contre 60% en moyenne pour l’Europe et l’Asie. L’Afrique demeure de ce fait largement dépendante des marchés extérieurs et par conséquent vulnérable aux chocs, comme nous l’avons constaté lors de la pandémie de la Covid-19 ou encore avec la guerre en Ukraine », a-t-il regretté.

Il a déclaré que les pays africains sont pleinement conscients des avantages de l’intégration, soulignant que de nombreuses initiatives ont été lancées dans ce sens, contribuant notamment à la création de plusieurs groupements économiques régionaux. Dans ce contexte, Jouahri a noté que les pays africains ont récemment lancé la Zone de libre-échange continentale africaine, qui constitue une lueur d’espoir compte tenu de ses avantages potentiels. Bien que provisoires, diverses évaluations de son impact indiquent des gains importants.

Il a mentionné que « les simulations effectuées par le FMI indiquent que la mise en place de cette zone, si elle est accompagnée de réformes facilitant les échanges, pourrait augmenter la médiane des échanges commerciaux de l’Afrique avec le reste du monde de 15% et avec les pays africains de 53%, ce qui contribuerait à une hausse du PIB médian par habitant de plus de 10%. Elle permettrait également, selon les mêmes estimations, de sortir plus de 30 millions de personnes de l’extrême pauvreté ».

D’un autre côté, il a considéré que l’Afrique a encore un long chemin à parcourir, car, « malgré la volonté politique », le continent peine à valoriser son capital humain pour tirer parti de son dividende démographique, mettre en œuvre une réforme profonde de ses économies pour mieux exploiter ses ressources et combler le déficit important de ses infrastructures.

« L’intégration à plus grande échelle en Afrique fait face à de nombreux obstacles structurels que le continent est appelé à surmonter. Le premier est sans doute l’énorme déficit en matière de capital humain », a-t-il relevé.

« Les chiffres de la Banque mondiale montrent que chaque année, 2,9 millions d’enfants de moins de 5 ans et 200 mille femmes enceintes décèdent. Sur le plan de l’éducation, 50 millions d’enfants ne sont pas scolarisés, et ceux qui le sont n’apprennent pas suffisamment. Sur le plan économique, les structures productives restent fragiles dominées par l’informel qui représente une grande partie de l’économie africaine », a-t-il détaillé.

Il a expliqué que cela nécessite des ressources importantes dans un contexte de réduction des marges budgétaires et de durcissement des conditions de financement, notant que les besoins de financement non satisfaits dans le domaine des infrastructures varient, selon la Banque africaine de développement, entre 68 milliards et 108 milliards de dollars par an.

En plus des ressources financières, la réussite de ces réformes exige avant tout un environnement de stabilité politique et sécuritaire, ce qui fait défaut aujourd’hui dans certaines régions du continent africain. Jouahri a souligné que l’Afrique dispose néanmoins d’un potentiel de développement énorme, mettant en avant que sa principale richesse réside dans sa population jeune et en pleine croissance.

Il a noté que, malgré le contexte international difficile, l’Afrique doit se lever et prendre sa place sur la scène internationale, ajoutant que l’obtention par l’Union africaine du statut de membre permanent du G20 en 2023, ainsi que la récente décision d’accorder un troisième siège au continent au sein du Conseil d’administration du Fonds monétaire international, ne sont que des indicateurs préliminaires montrant que l’Afrique obtiendra inévitablement la place qui lui revient au niveau international.

Jouahri a souligné que le Roi Mohammed VI « a souvent appelé à un codéveloppement gagnant-gagnant et lancé des chantiers d’envergure à l’instar du Gazoduc Maroc-Nigéria qui devrait contribuer à la diversification de l’approvisionnement énergétique pour de nombreux pays et de sa participation à garantir la sécurité alimentaire au continent ainsi que l’Initiative Atlantique qui vise à faciliter l’intégration commerciale de plusieurs pays enclavés (sans littoral) ».

« Le continent a toujours occupé une place centrale dans les orientations stratégiques du pays, comme il ressort de nombreux discours de Sa Majesté le Roi Mohammed VI depuis un quart de siècle », a-t-il dit. Il a ajouté que les politiques publiques liées aux échanges commerciaux et aux investissements bénéficient généralement d’une position unique par rapport aux autres pays du continent, ce qui facilite l’installation de nombreux groupes marocains opérant dans les services financiers, les secteurs miniers, les télécommunications sans fil, l’immobilier et autres.

Jouahri a indiqué que la Banque du Maroc s’est engagée à encourager et à accompagner la croissance extérieure du secteur bancaire en Afrique, ajoutant que les banques marocaines sont présentes aujourd’hui dans plus de trente pays du continent, où elles réalisent environ 23 % de leur activité.

« En tant que banque centrale, nous entretenons des relations étroites de partage d’expériences et d’expertise avec de nombreux régulateurs sur le continent soit de façon bilatérale ou dans le cadre d’instances telles que l’Association des banques centrales africaines, la Commission économique pour l’Afrique ou encore l’Union Africaine. Les domaines de coopération ne se limitent pas aux missions traditionnelles des banques centrales, mais nous travaillons aussi sur des problématiques transversales comme celles du climat ou du genre», a-t-il conclu.

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