À Sfax, le décès d’un Tunisien fait craindre une escalade des violences

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Une manifestation contre la présence de migrants subsahariens illégaux, à Sfax, le 25 juin 2023. HOUSSEM ZOUARI / AFP

Un Tunisien a été tué dans des heurts avec des migrants africains dans la ville tunisienne de Sfax où des appels à la vengeance ont été lancés, faisant craindre mardi une escalade des violences dans un contexte de vives tensions suscitées par l’immigration clandestine. 

L’homme, né en 1982, a été mortellement poignardé lors d’affrontements tard lundi entre des habitants et des migrants originaires d’Afrique subsaharienne, a indiqué à l’AFP le porte-parole du Parquet de Sfax, Faouzi Masmoudi.

« Trois migrants soupçonnés d’implication dans ce meurtre et qui seraient de nationalité camerounaise, selon les informations préliminaires, ont été arrêtés », a-t-il ajouté.

La nouvelle de sa mort s’est rapidement répandue via une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux par un député de Sfax, Tarek Mahdi, montrant son corps dans la rue et une traînée de sang.

La vidéo a suscité un torrent de réactions, souvent aux relents racistes, appelant à l’expulsion des migrants africains de Sfax, deuxième ville de Tunisie.

« Nous allons venger sa mort », a lancé un groupe de jeunes lors des funérailles du défunt selon une vidéo publiée par le collectif Syeb Trottoir qui milite contre l’immigration clandestine à Sfax.

Des appels à ne plus employer ou louer des logements aux migrants en situation irrégulière ont été publiés sur la page de ce groupe local.

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Selon des images diffusées sur les réseaux sociaux, des affrontements entre des migrants et des habitants ont éclaté mardi dans plusieurs quartiers de Sfax.

Des hauts responsables de la gendarmerie et de la sûreté nationale se sont déplacés à Sfax où la présence sécuritaire a été renforcée après le meurtre, selon le ministère de l’Intérieur.

Des affrontements à coups de jets de pierres avaient déjà opposé dimanche soir des migrants africains à des habitants de Sfax, lors desquels des véhicules et des logements ont été endommagés.

« Situation tragique »

« Ce soir pour la 3e nuit d’affilée, les rues sont transformées en champ de bataille, des blessés graves aussi bien tunisiens que migrants subsahariens, incendies, agressions, braquages et des forces de police impuissantes! Si le pire était à craindre, alors on y est! », a posté lundi soir sur Facebook Franck Yotedje, directeur de l’association Afrique Intelligence, qui œuvre pour la défense des droits des migrants.

Sfax, dans le centre-est de la Tunisie, est le point de départ d’un grand nombre de traversées illégales vers l’Italie.

Dans les quartiers populaires de la ville où habitent les migrants, les violences verbales et physiques sont fréquentes entre les deux parties.

Ces violences se sont multipliées après un discours, le 21 février, du président Kais Saied pourfendant l’immigration clandestine et la présentant comme une menace démographique pour son pays.

Lors d’une visite mardi au siège du ministère de l’Intérieur à Tunis, M. Saied a évoqué la situation à Sfax « après l’acte criminel qui s’y est produit », selon un communiqué de la présidence.

La Tunisie « n’accepte pas que réside sur son territoire quiconque ne respecte pas ses lois, ni d’être un pays de transit (vers l’Europe) où une terre de réinstallation pour les ressortissants de certains pays africains », a-t-il répété selon la même source.

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La plupart des migrants d’Afrique subsaharienne viennent en effet en Tunisie pour tenter ensuite de rejoindre l’Europe par la mer, en débarquant clandestinement sur les côtes italiennes.

M. Saied a affirmé mardi que des « réseaux criminels » étaient à l’origine de l’immigration illégale et qu’ils avaient pour objectif de troubler « la paix sociale en Tunisie ».

Selon Romdane Ben Amor, responsable au Forum des droits économiques et sociaux (FTDES) , une ONG locale qui suit les questions migratoires en Tunisie, la tension actuelle à Sfax était « attendue ».

Le FTDES « a mis en garde contre la situation tragique et inhumaine des migrants aggravée par un discours de haine à leur encontre, ce qui explique ces violences », a-t-il dit à l’AFP, en appelant à adopter un discours « apaisant ».

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