Drame de Melilla: le parquet espagnol classe son enquête

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Drame de Melilla: trois ans de prison en appel pour un groupe de migrants
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L’enquête ouverte par la justice espagnole sur la mort d’au moins 23 migrants africains ayant tenté de pénétrer fin juin dans l’enclave de Melilla depuis le Maroc a été classée sans suite, faute d’éléments suffisants contre les forces de l’ordre espagnoles.

« Le parquet a classé l’enquête » sur ce drame ayant provoqué l’indignation internationale, car il n’a « pas identifié de signes de délit dans les agissements des agents des forces de sécurité » espagnoles, a annoncé vendredi le ministère public.

« On ne peut pas conclure que l’action des agents ait augmenté le risque pesant sur la vie et l’intégrité physique des migrants et on ne peut donc pas les inculper d’homicide involontaire », a-t-il ajouté dans un communiqué.

Selon le parquet, « aucun des agents n’a eu connaissance » de la chute de migrants les uns sur les autres depuis la clôture séparant l’enclave du Maroc « et de ses conséquences fatales », et n’a su « qu’il y avait des personnes en situation de risque qui nécessitaient de l’aide ».

D’après les éléments rassemblés durant les six mois d’enquête, « l’attitude des migrants » a été « constamment hostile et violente, envers les agents marocains et espagnols », souligne-t-il par ailleurs.

Lire aussi: Six personnes arrêtées à Melilla accusées d’avoir introduit des migrants depuis le Maroc

Le parquet précise toutefois avoir transmis aux responsables des forces de sécurité des éléments pour d’éventuelles poursuites disciplinaires contre des agents suspectés d’avoir jeté des pierres sur des migrants.

Il appelle en outre les autorités espagnoles à « mettre en œuvre les mesures nécessaires » afin que les migrants puissent déposer des demandes d’asile en bonne et due forme et n’aient plus à tenter de franchir la frontière illégalement.

« Tuerie de masse »

Le 24 juin, près de 2.000 clandestins, en majorité originaires du Soudan – pays très pauvre miné par les conflits -, avaient tenté de pénétrer dans l’enclave de Melilla, située sur la côte nord du Maroc.

Selon les autorités marocaines, au moins 23 migrants sont morts dans cette tragédie qui représente le bilan humain le plus lourd jamais enregistré lors des tentatives d’intrusion de migrants dans cette enclave ou dans celle de Ceuta, qui constituent les deux seules frontières de l’UE sur le continent africain.

Ce drame a provoqué l’indignation internationale, l’ONU dénonçant un « usage excessif de la force » de la part des autorités marocaines et espagnoles.

Amnesty International a qualifié pour sa part ce drame de « tuerie de masse » et accusé Rabat et Madrid de vouloir « couvrir leurs meurtres » en « dissimulant » la vérité, six mois après les faits.

« Certaines actions des agents espagnols et marocains, comme frapper des personnes immobilisées (…), refuser des soins médicaux d’urgence aux personnes blessées, l’usage répété de gaz lacrymogène contre des personnes se trouvant dans un espace clos dont elles ne pouvaient s’échapper, peuvent constituer une violation du droit à ne pas subir de torture et autres mauvais traitements », avait dénoncé mi-décembre l’ONG.

Amnesty, comme des experts indépendants nommés par le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU, évoquent un bilan d’au moins 37 morts.

Lire aussi: Drame de Melilla: Amnesty dénonce une «tuerie de masse», l’Espagne rejette des «accusations sans preuve»

Plusieurs ONG avaient aussi accusé les forces de l’ordre espagnoles de ne pas avoir prêté assistance aux migrants gravement blessés.

Deux enquêtes publiées en novembre par la BBC et le consortium européen Lighthouse Reports, auxquelles ont notamment participé les quotidiens espagnol El Pais et français Le Monde, avaient dénoncé la brutalité des forces marocaines et questionné l’action des forces espagnoles.

Elles avaient notamment conclu à la mort d’au moins un migrant en territoire espagnol, ce que le ministre de l’Intérieur espagnol a catégoriquement nié à plusieurs reprises.

Le Défenseur des droits espagnol, qui enquête aussi sur ces faits, a toutefois jugé que les explications du ministère de l’Intérieur n’avaient « pas été suffisantes » jusqu’ici.

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