Beaux Livres. L'Amour très Salé de Rita Aouad

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Rues, belles demeures, remparts, savoir-faire, traditions, coutumes et autres merveilles…  Rita Aouad nous dévoile son parcours haut en émotions dans la ville de ses origines : Salé.
L’historienne Rita Aouad a publié aux éditions Bouillon de Culture, Parcours amoureux de Salé, un guide de la ville de ses origines. à travers ces pages, on découvre le riche passé de celle qui fut jadis la capitale de l’Andalousie atlantique, mais aussi un port corsaire renommé. Dans se livre, la cité dévoile son passé, sa civilisation raffinée et sa forte identité à la lumière des riches documents, souvent inédits, qui jalonnent ce parcours. à découvrir sans tarder.
Quelle a été l’idée directrice de ce livre ?
À l’origine, l’idée était de proposer un portrait différent et inattendu de la ville de Salé qui rompt avec les approches académiques ou touristiques en empruntant des itinéraires sensibles qui restituent « l’âme » de ces lieux.
Au-delà du fait que vous soyez originaire de Salé, qu’est-ce qui vous a poussée à réaliser un livre sur votre ville ?
Le fait est que cette ville, forte aujourd’hui de près d’un million d’habitants, est largement méconnue. Or, il s’agit d’une des capitales historiques du Maroc, d’une de ses principales cités héritière d’une civilisation urbaine raffinée. Il y a en effet un contraste entre la renommée ancienne de Salé, sa notoriété d’hier et sa méconnaissance et sa mise à l’écart aujourd’hui. En tant qu’historienne, je pense que restituer le passé est un élément indispensable à l’image et au rayonnement d’une ville.
Combien de temps vous a-t-il fallu pour préparer et réaliser ce livre ?
Deux ans environ. Il y a d’abord eu le temps de la conception du livre, avec ses trois « temporalités », le temps long de l’histoire restitué par un parcours cartographique, le passé proche de la mémoire rendu par les cinquante « mots-mémoire » et enfin Salé d’aujourd’hui, visité la veille du Mouloud, au moment de la procession des cierges. Puis vint le temps de la rédaction, de la mise en forme, de la recherche documentaire. L’équipe de la maison d’édition Bouillon de Culture a été présente à toutes les étapes et ce livre est le résultat d’un travail et d’une volonté communs. La direction artistique de la maquette a été confiée à Zahra Sebti. Cet aspect a également nécessité du temps et de la maturation.
Comment avez-vous fait pour collecter tous les documents, photos, manuscrits… très présents dans le livre ?
En procédant à des recherches systématiques dans les fonds d’archives nationaux et internationaux, publics et privés. Il est vrai qu’aujourd’hui la mise en ligne de fonds iconographiques et documentaires facilite grandement la recherche. Mais tout n’est pas en ligne, loin de là, et les déplacements sont parfois nécessaires. Pour Salé, nous avons eu la chance que familles, fondations et bibliothèques de la ville nous ouvrent leurs portes et leurs “boîtes d’archives” pour nous faire partager leurs trésors, souvent inédits. Je signale au passage que les éditions Bouillon de Culture s’acquittent de l’ensemble des droits à la reproduction et que nous avons regretté, lors de nos recherches, qu’une institution prestigieuse comme le musée du quai Branly, à Paris, qui possède des collections extraordinaires, n’ait pas de dispositions légales pour permettre la reproduction de celles-ci. Il y a là tout un pan du patrimoine historique du Maroc – et de nombreux autres pays – qui n’est pas valorisé.
Vous avez choisi un titre très évocateur : “Parcours amoureux de Salé”. Comment fait-on pour tomber amoureux de cette ville ?
Le titre est celui d’une collection dont le but est de faire connaissance avec une ville de manière sensible, en accordant plus de place à l’émotion, notamment, ici, en restituant le passé par la voix des Slaouis. Il est vrai que l’image de cette ville n’est pas aujourd’hui très valorisée. On ne peut l’aimer au premier regard, elle ne se livre pas au premier venu, mais c’est une ville qui a beaucoup de charme : avec de la curiosité, de l’attention portée à son patrimoine et à ses habitants, on peut en tomber amoureux !
On dit souvent que Salé est une ville-dortoir qui vit dans l’ombre de Rabat…
C’est l’image dans laquelle la ville a été enfermée dans la deuxième moitié du XXe siècle. Mais cette image correspond à la réalité : alors que Rabat a été érigée en capitale et a concentré le pouvoir politique et administratif, Salé a été déclassée et s’est gonflée démographiquement d’un exode rural qui a fragmenté son urbanisme. La médina de Salé s’est paupérisée et la ville s’est étendue hors les murs de manière chaotique. Les relations entre les deux villes sont devenues asymétriques : d’un côté, une métropole, de l’autre une ville-dortoir… Mais les choses changent. L’aménagement des berges du Bou-Regreg et notamment celui de la rive droite, la requalification de certains espaces comme la corniche, les activités culturelles et artistiques comme le festival de l’école du cirque Shems’y rendent la ville de plus en plus attractive.
Qu’est-ce que vous aimez (ou pas) à Salé ?
J’aime son ambiance si particulière, faite d’un profond enracinement dans le passé et d’une énergie où se mêlent encore aujourd’hui une intense activité commerciale et une rencontre des populations. Salé, malgré des décennies de difficile développement, a su préserver une identité. Mais il est vrai que la pauvreté est visible et présente et qu’il y a urgence à s’attaquer, en même temps que la préservation du patrimoine, aux problèmes sociaux de la ville.
Votre prochain “parcours amoureux”?
Agadir et la ville disparue de Sijilmassa. J’y participe en temps que directrice de collection et co-auteure pour le premier. Vu le succès du premier, nous espérons offrir encore plein d’autres parcours amoureux.
« Parcours amoureux de Salé », de Rita Aouad.
Editions Bouillon de Culture, 820 DH.

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