“Paroles d’Experts” de Faïçal Tadlaoui. Fnideq: le “sauve qui peut” de nos jeunes…

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pde hrig

Le Maroc sous le choc ce 15 septembre quand le pays découvre ces images de centaines de jeunes, dont de nombreux mineurs et des femmes accompagnées de leurs enfants, tenter de rejoindre à tout prix la frontière de  Sebta. Certains prendront même  le risque de rejoindre à la nage le préside occupé au péril de leur vie. Dans cet épisode de « Paroles d’Experts », retour sur les causes profondes de ce malaise avec Sabrina Nassih, chercheuse et militante de terrain, et Samira Mzibar, socio-économiste.

 

Tout est parti par des appels sur les réseaux sociaux pour un rassemblement à Fnideq et tenter de passer en force la frontière de Sebta. Et le résultat fut impressionnant : des hordes de jeunes faisant fi du  dispositif sécuritaire  pour tenter de fuir à tout prix le pays et changer leurs conditions de vie.

L’Espagne est devenue la porte de sortie pour eux,  d’autant que le pays n’expulse pas les enfants mineurs. Résultat : près de 10.000 enfants sans papiers vivent actuellement en France.

Mais pourquoi donc nos jeunes fuient-ils leur pays alors que les conditions économiques sont correctes et les projets de développement ne manquent pas ? Comment leur redonner des raisons d’espérer pour assurer leur avenir ?

C’est tout le paradoxe actuel : en pleine croissance économique, avec des projets d’envergure comme la Coupe du Monde 2030, le Maroc semble laisser une partie de sa population, notamment les jeunes, en marge de ses avancées


Pour la sociologue Samira Mzibar, la véritable surprise réside dans l’âge de ces jeunes migrants, souvent des adolescents. « L’immigration illégale a toujours existé, mais l’extrême jeunesse de ces candidats choque, car c’est un problème qui a été occulté », note-t-elle.

Selon elle, la migration n’est plus seulement un acte de désespoir, elle devient une véritable « culture » chez les jeunes. « Ils ne parlent plus seulement de conditions de vie difficiles, ils parlent de “se sauver”. C’est devenu une aventure, une quête », explique-t-elle.

Les réseaux sociaux, notamment YouTube et Instagram, jouent un rôle clé dans la diffusion de cette culture, en fournissant des tutoriels et récits de voyages clandestins qui transforment cette dangereuse entreprise en un récit épique et excitant. Les jeunes sont attirés par cette perspective, oubliant les risques encourus.

Les NEETs : une génération sans repères
Le phénomène migratoire touche particulièrement les jeunes NEET (Not in Education, Employment, or Training). Cette catégorie, qui représente 35 % des jeunes Marocains, est caractérisée par un manque d’opportunités et d’accompagnement, souvent en échec scolaire, sans emploi, ni formation. Samira Mzibar rappelle que cette situation est encore plus critique chez les femmes dont 37 % d’entre elles appartiennent à cette catégorie et souvent contraintes de devenir mères au foyer par défaut d’opportunités professionnelles. Ce contexte socio-économique, couplé à l’absence de politiques publiques efficaces, alimente le désespoir des jeunes.

Tanger, ville emblématique du développement marocain avec ses infrastructures modernes et son pôle automobile, incarne bien cette contradiction. Malgré ces progrès, « les jeunes de certains quartiers n’en bénéficient pas », souligne Sabrina Nassih. Les disparités régionales et sociales accentuent ce sentiment d’exclusion, amplifiant le désir de fuir le pays par tous les moyens possibles. Les grands projets nationaux, bien que créateurs d’emplois, ne semblent pas profiter à toute la population, laissant une partie de la jeunesse livrée à elle-même. 

Un fossé entre développement et inclusion

Face à cette situation, Samira Mzibar pointe du doigt le manque d’interventions publiques adaptées. Bien que de nombreuses initiatives aient été lancées, comme le Centre des Métiers et des Compétences (CMC), elles restent insuffisamment connues ou accessibles pour la jeunesse marginalisée. « Les jeunes ne savent pas où chercher l’information », regrette Sabrina Nassih, mettant en avant la nécessité de créer des espaces plus attractifs et connectés pour les jeunes

des quartiers populaires.Au-delà des solutions économiques, Sabrina Nassih, qui travaille sur le terrain à Tanger, insiste sur l’importance de diversifier les offres culturelles et sportives pour permettre aux jeunes de se sentir uniques et valorisés. « On a fait beaucoup d’investissements dans le sport, mais tous les jeunes ne veulent pas faire du foot. Il faut leur offrir des alternatives qui correspondent à leurs aspirations », souligne-t-elle. Créer un sentiment d’appartenance et offrir des opportunités pour se démarquer pourraient être des solutions pour éloigner la jeunesse de l’illusion migratoire.

 

emission thirrey

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