Migrants: la justice italienne désavoue Salvini et ouvre ses bras à l’Open Arms

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Un tribunal administratif italien a suspendu, ce mercredi, un décret du ministre de l’Intérieur italien Matteo Salvini qui interdisait l’accès du navire humanitaire aux eaux territoriales italiennes. L’Open Arms, qui a recueilli quelque 150 migrants au large de la Libye, est bloqué au large de Lampedusa depuis 13 jours.

Une lueur d’espoir pour les quelque 150 migrants bloqués depuis treize jours au large de Lampedusa à bord du navire humanitaire Open Arms. Alors que les pays riverains refusent d’accueillir ces personnes, à commencer par le ministre de l’Intérieur italien Matteo Salvini, un tribunal administratif transalpin a suspendu, ce mercredi, un décret interdisant au navire de pénétrer dans les eaux italiennes. Dans sa décision, le juge administratif déclare que la plainte d’Open Arms «ne semble pas être totalement dénuée de fondement juridique» et que le navire est confronté à une situation «exceptionnellement grave».

L’association humanitaire espagnole Proactiva avait saisi la justice pour demander que son navire soit autorisé à entrer en Italie sur la base du droit maritime international. «Nous avons gagné le recours que nous avions présenté devant un tribunal administratif en Italie, contre le décret de sécurité de (Matteo) Salvini» le ministre italien de l’Intérieur, a déclaré Oscar Camps, fondateur de l’ONG espagnole Proactiva Open Arms, lors d’une conférence de presse à Madrid. Il a assuré que la justice administrative italienne s’était prononcée «pour le débarquement» des 147 migrants actuellement à bord de l’Open Arms, que les pays riverains refusent d’accueillir après leur sauvetage en Méditerranée centrale.

Les magistrats ne précisent toutefois pas si le bateau doit être autorisé à accoster ni si les migrants peuvent débarquer. «La seule chose qui manque, c’est qu’on nous assigne un port» pour débarquer, a dit Oscar Camps, assurant que l’ONG entendait respecter les procédures légales. Ce dernier a expliqué que les ports sûrs les plus proches étaient ceux d’Italie et de Malte: «nous devons exiger qu’ils appliquent le droit» maritime international, a-t-il insisté. Le bateau Open Arms compte à présent «chercher à se mettre à l’abri au sud de l’île» de Lampedusa, a-t-il précisé. Matteo Salvini, qui est également vice-président du Conseil, n’a pour l’heure pas fait de commentaire.

Lire aussi: Sauvetages humanitaires: plus de 400 migrants sur l'Ocean Viking et l'Open Arms

Juste après la première opération de secours de l’Open Arms début août, le patron de la Ligue (extrême droite) avait signé un décret interdisant au navire de pénétrer dans les eaux territoriales italiennes, conformément à une législation adoptée peu auparavant. Selon le ministre, il s’agissait d’une question d’ordre public. En cas d’infraction, l’ONG risquait une amende allant jusqu’à un million d’euros et la confiscation du navire. De leur côté, l’Espagne a déclaré mardi irrecevable une demande d’asile pour 31 migrants mineurs déposée par le capitaine de l’Open Armsauprès de l’ambassade d’Espagne à Malte, et la France a dit être «active sur le sujet». L’Élysée a rappelé ce mercredi la position française, à savoir la «nécessité de débarquer dans le port sûr le plus proche» et «solidarité systématique dans l’accueil des personnes débarquées». L’UNHCR, l’agence des Nations unies pour les réfugiés, a pour sa part demandé aux gouvernements européens de consentir au débarquement des quelque 500 personnes secourues par l’Open Arms et l’Ocean Viking.

Risque de violences sur l’Open Arms

Peu avant l’annonce du tribunal italien, Oscar Camps avait mis en avant le risque que des bagarres éclatent entre les migrants, épuisés et stressés, à bord de l’Open Arms. Dans une interview à la radio Cadena Ser, «il avait évoqué la possibilité qu’il y ait «un conflit et un blessé grave, ou pire quelqu’un qui mourrait à bord à cause de la violence». Selon lui, les 19 membres d’équipage de l’Open Arms ont de plus en plus de mal à gérer les tensions provoquées à bord par la promiscuité, l’incertitude et l’état de «stress post-traumatique très élevé» des personnes secourues. «Imaginez-vous qu’il y a deux lavabos et 180 m² abrités. Il y a des disputes pour un coin d’ombre, pour un coin de soleil, des disputes pour la nourriture, des disputes pour la queue au lavabo», a-t-il raconté.

Les conditions climatiques, difficiles ces derniers jours, accroissent la tension car beaucoup de passagers souffrent de mal de mer et de vomissements. «Il faut se rappeler qu’ils ont subi des tortures, des violences, des abus de toutes sortes, de l’esclavage», et au moindre problème «la situation devient très tendue», a souligné Oscar Camps. Certains migrants ont entamé des grèves de la faim et l’ONG a dû envoyer à bord «une équipe de soutien psychologique et de médiateurs culturels pour tenter de ramener le calme» parmi les passagers, d’une dizaine de nationalités différentes. «Ils sont à bord depuis longtemps (…) Ils ne peuvent pas appeler leurs proches pour dire qu’ils sont vivants, il y a des pères de famille, des enfants. Ils ne savent absolument pas ce qui va se passer, cela génère beaucoup d’anxiété». Deux bébés ainsi que leurs parents ont été hélitreuillés vers Malte mercredi matin pour raisons de santé, a-t-il précisé.

Dans le même temps, l’incertitude demeure toujours pour un autre navire humanitaire, l’Ocean Viking, qui a secouru ces derniers jours 356 personnes au large de la Libye et recherche un port sûr pour débarquer.

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