Vidéo. Vingt ans après, les adolescents tueurs de Columbine hantent toujours les États-Unis

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Eric Harris et Dylan Kebold exercent toujours une forme de fascination morbide auprès des «Columbiners», passionnés par les auteurs du massacre de Littleton, au cours duquel 13 personnes ont perdu la vie, en 1999.

Le 20 avril 1999, Eric Harris et Dylan Kebold, 18 et 17 ans, tuaient douze de leurs camarades et un professeur avant de se suicider dans la bibliothèque du lycée de Littleton, près de Denver (Colorado). La tuerie de Columbine a durablement traumatisé les États-Unis, faisant des alertes de sécurité et autres exercices d’évacuation le quotidien de toute une génération de jeunes Américains. Même vingt ans après, ses deux auteurs exercent toujours une forme de fascination morbide après de certains. Leurs fans sont connus sous le nom de «Columbiners». La plupart connaissent jusqu’aux moindres détails la fusillade et vouent au duo un culte malsain sur Internet. D’autres vont plus loin, cherchant à suivre leur macabre destinée. Vingt ans après le drame, les deux adolescents continuent ainsi de semer la mort derrière eux.

La menace est prise très au sérieux à Littleton. Dans la semaine, le lycée de Columbine et une centaine d’établissements du Colorado ont dû être fermés, une adolescente armée et «fascinée», selon le FBI, par le massacre menaçait de commettre un acte violent. Le lycée est devenu un lieu de pèlerinage pour certains. En 2012, un adolescent de 16 ans, venu sous prétexte d’un article pour le journal de son lycée, sera arrêté quelque temps plus tard dans l’Utah, où il allait reproduire le scénario. Elizabeth Lecron, 23 ans, projetait, elle, de s’en prendre à un bar dans l’Ohio. «Aller au lycée de Columbine était absolument surréaliste. (…) J’ai même eu la chance de me faire repousser par un agent de la sécurité», se réjouissait-elle sur Tumblr après un séjour à Littleton.

«Faire un pèlerinage sur le site d’une précédente attaque est une forme extrême d’imitation: l’individu veut réellement être au même endroit que son modèle», reconnaît le psychologue américain Peter Langmann, qui s’intéresse à cette question depuis 20 ans. Parkland, Sandy Hook, Virginia Tech… Eric Harris et Dylan Kebold ont, selon lui, exercé une influence plus ou moins directe sur 43 auteurs de fusillades en milieu scolaire, jusqu’en France. L’esprit troublé d’Adam Lanza avait par exemple nourri une véritable obsession autour de Columbine, avant que lui-même ne tue 20 enfants et six enseignants dans l’école primaire de Sandy Hook en 2012. Il avait passé les trois années précédentes à poster des photomontages à la gloire des deux assassins sur un forum dédié à la tuerie. «La plupart des “Columbiners” ne commettent pas d’attaque», relativise toutefois Peter Langmann.

«Fangirls» et «copycats»

Deux anthropologues finlandais le confirment. Jenni Raitanen et Atte Oksanen se sont intéressés plus largement aux internautes passionnés par les fusillades en milieu scolaire. Dans un article scientifique publié l’an dernier, ils distinguent: les «chercheurs» compilant les détails sur les tueries ; les «fangirls» qui s’entichent des tueurs ; les «Columbiners» focalisés sur la tuerie de Littleton ; les «copycats» cherchant à passer à l’acte. Les membres qui animent cette «sous-culture» en ligne restent peu nombreux. «Lorsque vous êtes dans une communauté comme celle-ci depuis longtemps, ce n’est qu’une question de temps avant que quelqu’un que vous connaissiez, avec qui vous parliez ou même dont vous lisiez seulement les messages tue des gens ou tente de le faire», témoigne l’un des 22 participants de l’étude.

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Aucune des personnes interrogées ne revendique pourtant l’étiquette de «Columbiners», observent les chercheurs. Reste que, à leurs yeux, le massacre de Littleton est la fusillade qui exerce la plus forte attraction auprès de cette communauté. Les auteurs estiment que l’énorme couverture médiatique du drame sert de porte d’entrée à bon nombre d’entre eux. Peter Langmann avance, lui, une autre explication: «Le fait que les gens perçoivent les auteurs de l’attaque comment des enfants harcelés ayant tenu tête à leurs oppresseurs. Ce qui est une méprise totale». Dans les jours qui ont suivi la fusillade, certains médias avaient faussement décrit le duo comme des «gothiques» désirant se venger des «jocks», ces lycéens populaires uniquement intéressés par le sport. Or, les motivations des deux adolescents se sont révélées beaucoup plus complexes.

Dans son journal, Eric Harris nourrissait notamment l’espoir d’entrer dans l’histoire comme celui qui a surpassé Timothy McVeigh, alors auteur de l’attentat le plus meurtrier sur le sol américain, en 1995 à Oklahoma City. L’adolescent de Columbine a depuis été pris en exemple par d’autres tueurs qui sont à leur tour venus nourrir cette spirale infernale. Selon le Washington Post , plus de 226.000 Américains ont vécu une fusillade durant leur scolarité depuis le drame de Littleton.

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