Vidéo. Que contient l'accord iranien sur le nucléaire ?

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Le président iranien, Hassan Rohani, en visite dans une centrale nucléaire à Bushehr, en janvier 2015. AFP

L’accord sur le nucléaire iranien, dont Donald Trump s’est retiré mardi, avait mis fin en 2015 à 10 ans d’escalade entre Téhéran et la communauté internationale.

L’origine de l’accord
En 2002, on apprend l’existence de deux sites nucléaires iraniens secrets. La communauté internationale soupçonne le pays de vouloir développer plus qu’un programme civil et de tenter de se doter de l’arme atomique, ce qui est rigoureusement interdit par le Traité sur la non-prolifération.
Pour ce faire, il lui est nécessaire d’enrichir très fortement l’uranium. En effet, dans une arme nucléaire, seul l’uranium 235 est susceptible d’être utilisé comme combustible. Or, à l’état naturel, il est très majoritairement composé d’uranium 238 (à 99,3%, contre 0,7% d’uranium 235). À l’époque, on suspecte l’Iran de dissimuler dans ces sites secrets la très complexe opération d’enrichissement, qui doit être réalisée à l’aide de centrifugeuses, reliées en série. Plus elles sont nombreuses, plus on peut enrichir le minerai. Un taux compris entre 3 et 5% suffit pour une utilisation civile. Il doit dépasser les 90% pour un usage militaire.
L’Iran, surtout après l’élection du président Mahmoud Ahmadinejad, se moque des mises en gardes qui lui sont adressées. Elle ne stoppe aucune de ses activités suspectes, augmentant au contraire le nombre de ses centrifugeuses et donc ses chances de produire un uranium destiné à des fins militaires. Si bien qu’en 2006, l’ONU impose des premières sanctions économiques. Celles-ci ne cesseront de se renforcer au fil du temps. L’arrivée au pouvoir du président Hassan Rohani, en 2013, permettra la reprise des négociations qui aboutiront sur l’accord de 2015.
Le Plan d’action conjoint
L’accord finalement trouvé est baptisé JCPOA pour «Joint comprehensive plan of action», en français, «Plan d’action conjoint» (document PDF). Il a été passé entre l’Iran et les cinq puissances nucléaires du Conseil de sécurité (Chine, États-Unis, France, Royaume-Uni et Russie) plus l’Allemagne. Ce n’est pas un traité multilatéral, ce qui aurait nécessité une ratification des Parlements des pays impliqués. C’est simplement un accord. Il est signé le 14 juillet 2015. Quelques jours plus tard, le Conseil de sécurité de l’ONU approuve le Plan d’action avec sa résolution 2231 (document PDF). Il entre officiellement en vigueur le 16 janvier 2016 et est prévu pour durer 10 ans.
Son but est écrit noir sur blanc en préambule: «Garantir que le programme nucléaire de l’Iran sera mené exclusivement à des fins pacifiques.» Il repose sur trois grands principes: la limitation des capacités techniques iraniennes, leur contrôle régulier par l’Agence international de l’énergie atomique (AIEA), le tout en échange d’une levée des sanctions internationales prises sur le volet nucléaire.
Dans les faits, l’accord prévoit de réduire les capacités d’enrichissement de Téhéran, qui doit restreindre le nombre de ses centrifugeuses actives, de 20.000 à 5060. Le niveau d’enrichissement de l’uranium ne doit être que de 3,67%, bien en deçà du seuil nécessaire pour une application militaire. L’Iran doit expédier à l’étranger son combustible usagé afin qu’il soit traité et réaffirmer «qu’il ne cherchera en aucun cas à obtenir, mettre au point ou acquérir des armes nucléaires».
Une remise en cause immédiate
Donald Trump n’a jamais caché son aversion pour cet accord. Avant lui, d’autres Républicains ont fait connaître leur désaccord au précédent locataire de la Maison Blanche, Barack Obama. Comme nous vous l’expliquions, le texte n’étant pas un traité, il n’a pas dû être ratifié par le Congrès américain, dominé par les Républicains. Hostiles, ceux-ci ont fait voter une loi contraignant le président à «certifier» tous les 90 jours que l’accord est bien respecté par l’Iran et ne remet pas en cause la sécurité des États-Unis.
Arrivé au pouvoir, Donald Trump a commencé par certifier l’accord à deux reprises: les 18 avril et 17 juillet 2017. Le 13 octobre de la même année, il refuse cependant de le faire, tout en annonçant pour le moment respecter les engagements pris par les États-Unis. Même schéma le 12 janvier 2018, mais il exige cette fois que les choses changent avant le 12 mai. Avec quelques jours d’avance, il a annoncé mardi que les États-Unis se retiraient de cet accord, le qualifiant de «désastreux».
Donald Trump estime notamment que le Plan d’action ne prévoit pas assez l’avenir, à cause de sa durée trop courte. Il regrette également que la question des missiles Khoramshahr, développés par Téhéran et susceptibles de menacer Israël et l’Arabie Saoudite, les deux grands alliés américains au Proche Orient, n’y soit pas abordée directement.
Des contreparties dans l’accord
En contrepartie de cet accord, les sanctions qui avaient été prononcées par l’ONU, les États-Unis et l’Union européenne contre l’Iran sont levées dès 2006. Depuis janvier 2016, l’Iran est autorisé à vendre son pétrole sur les marchés internationaux et le pays a également accès au système financier international. Le JCPOA s’est aussi traduit par le versement en liquide de 1,5 milliard d’euros à l’Iran, ainsi que le dégel progressif de plus de 84 milliards d’euros d’avoirs iraniens à l’étranger. La somme de 1,5 milliard d’euros correspond au montant qui avait été avancé par l’Iran pour des achats d’armes avant la révolution islamique de 1979. À l’origine, ce montant s’élevait à 337 millions d’euros, mais des intérêts avaient été ajoutés par les États-Unis à la suite de négociations. Le versement effectué par l’administration Obama avait été justifié par le fait que l’Iran restait encore isolé du système financier international en raison des sanctions passées (l’interdiction de vente de pétrole avait notamment fait chuter ses ventes à 900.000 barils par jour).
En revanche, l’embargo des Nations unies sur les ventes d’armes demeure pendant cinq ans, et celui sur l’importation de technologies pour les missiles balistiques, huit ans. En cas de violation par l’Iran des termes de l’accord, les sanctions seront immédiatement remises en vigueur, et cela pour une durée de dix ans.
Par Julien Licourt

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