Vidéo. Italie: manifestation antiraciste après la fusillade de Macerata

Publié le
Figaro

Un rassemblement a été organisé samedi une semaine après une fusillade à caractère raciste. Cette ville du centre du pays redoutait toutefois des débordements ou des affrontements avec d’éventuels contre-manifestants.

Des centaines de manifestants antifascistes étaient réunis dans le calme samedi après-midi à Macerata, une semaine après la fusillade à caractère raciste qui a bouleversé le pays. Tout au long de la journée, la petite ville du centre de l’Italie a redouté des débordements comme cela a été le cas jeudi soir lors d’une action menée par l’extrême droite. De nombreux manifestants d’origine africaine ont défilé, des migrants réclamant une régularisation mais aussi des personnes installées en Italie depuis des années et dénonçant un racisme diffus.

Dans le froid et sous un soleil perçant à travers les nuages, les manifestants de ce samedi – venus parfois de loin – se sont rassemblés à l’appel d’associations antifascistes, d’ONG, de syndicats mais aussi de quelques formations politiques de gauche. Beaucoup agitaient des drapeaux de leur mouvement, mais certains avaient aussi apporté des drapeaux italiens.

«L’ambiance est lourde en Italie en ce moment et ces dernières années nous avons permis à la droite de se développer. J’ai toujours manifesté mais maintenant nous en avons plus besoin que jamais», a déclaré à l’AFP Mafalda Quartu, une retraitée venue de Florence.


Le maire de Macerata, Romano Carancini (centre-gauche), avait demandé l’annulation de tous les rassemblements pour laisser la ville souffler mais la préfecture a donné son feu vert vendredi soir pour celui de samedi. Par crainte de débordements, les écoles sont restées fermées, la messe du samedi soir a été annulée et la plupart des commerces ont fermé à la mi-journée.
D’autres rassemblements plus petits ont eu lieu à travers le pays, comme à Milan, où une manifestante a brandi une pancarte implorant: «Etrangers, ne nous laissez pas seuls avec les fascistes». A Piacenza (nord), de brèves violences ont éclaté entre plusieurs dizaines de manifestants antifascistes et les forces de l’ordre.
Jeudi soir, des heurts ont éclaté quand plusieurs dizaines de militants du groupuscule d’extrême droite Forza Nuova ont manifesté contre l’immigration et adressé le salut fasciste à la police.

Giuliano Denti, un jardinier de 40 ans venu de Pise avec une centaine de militants antifascistes pour manifester samedi, s’est emporté contre l’incident. «Nous avons une Constitution antifasciste par excellence et je voudrais que cette Constitution soit défendue et que les lois contre l’apologie du fascisme soient appliquées», a-t-il déclaré.
«Nous condamnons ce que Luca Traini [le tireur, ndlr] a fait mais nous ne voulons pas qu’il soit transformé en monstre», a déclaré jeudi soir à Macerata Roberto Fiore, du groupuscule d’extrême droite Forza Nuova, estimant que le tireur «est aussi une victime de cette situation d’immigration incontrôlée, avec la mafia nigériane qui gère le trafic de drogue».

Élan de solidarité envers le tireur

Le 3 février, Luca Traini, jeune homme au crâne rasé et aux tatouages d’inspiration fasciste, a tiré sur une dizaine d’Africains à travers la ville, faisant au moins six blessés. Cet agent de sécurité de 28 ans a expliqué avoir agi pour venger la mort de Pamela Matropietro, une jeune fille de 18 ans dont le corps a été retrouvé découpé en morceaux, après l’annonce de l’arrestation d’un dealer nigérian soupçonné d’être impliqué dans ce crime. L’enquête dans cette affaire qui fait la une des médias italiens depuis 10 jours va prendre du temps: des analyses sont en cours pour déterminer si cette jeune toxicomane a succombé à une overdose et si les coups qu’elle a reçu à l’abdomen ont eu lieu avant ou après le décès.
Mercredi, son avocat Me Giancarlo Giulianelli a indiqué qu’il recevait un flot de messages de solidarité pour son client. «La plupart du temps, les gens disent qu’ils veulent donner de l’argent», a-t-il ajouté. «Mais mon client, même s’il remercie tout le monde pour les messages, ne veut pas de soutien financier et demande que cet argent évoqué pour sa défense soit envoyé à des familles italiennes en difficulté». Pour Me Giulianelli, l’élan de solidarité autour de son client «donne une idée de la situation» après la gestion de la question migratoire ces dernières années.

«On a l’impression que c’était un accident de la route»

A trois semaines des élections législatives du 4 mars, ce fait divers et la fusillade raciste ont remis l’immigration au coeur d’une campagne désormais dominée par des discours très à droite.
Matteo Salvini, le chef de la Ligue du Nord, un parti d’extrême droite proche du Front national sous l’étiquette duquel Luca Traini s’était présenté aux municipales l’an dernier, a dénoncé «l’invasion migratoire» source d’»affrontement social». Et Silvio Berlusconi, le chef de file du centre droit et allié de M. Salvini, a renchéri en évoquant «une bombe sociale prête à exploser».
Aucun responsable politique ne s’est rendu au chevet des six blessés – cinq hommes et une femme -, à l’exception du ministre de la Justice, Andrea Orlando, mercredi, cinq jours après les faits. «Merkel ou Macron seraient allés voir les blessés du fou (fasciste). En Italie, on a l’impression que c’était un accident de la route», a dénoncé dans un éditorial le journal de gauche Il Fatto Quotidiano.

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