Qui sont les soufis tués dans l’attentat en Égypte?

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L’attaque, qui a fait au moins 305 morts, a visé vendredi une mosquée fréquentée par des musulmans soufis, un courant de l’islam rejeté par les djihadistes du groupe État islamique pour son côté mystique.

C’est l’attaque la plus meurtrière de l’histoire récente de l’Égypte. Vendredi, 305 personnes dont 27 enfants, ont été tuées lors d’un attentat visant la mosquée al-Rawda de Bir al-Abd, située à l’ouest d’Al-Arich, capitale de la province du Nord-Sinaï. Un lieu de prière fréquenté par des musulmans soufis. Même si l’État islamique apparaît comme le principal suspect, le groupe n’a pas revendiqué cette attaque et il n’est pas possible d’affirmer avec certitude que la mosquée a été visée à cause de ses liens avec le soufisme. Toutefois, cette minorité de l’islam a été attaquée partout où l’EI opère, que ce soit en Égypte mais aussi au Pakistan où des dizaines de soufis ont été tués par les djihadistes. L’an dernier, le groupe terroriste avait ainsi enlevé puis décapité un vieux chef soufi, accusé de pratiquer la sorcellerie.

Le soufisme, honni par les terroristes de l’EI, est un courant transversal au sein de l’islam, présent aussi bien chez les chiites que chez les sunnites, et qui se caractérise par son mysticisme. Inspirés par certains compagnons du Prophète et par les premières générations d’ascètes, les soufis disent vouloir se concentrer sur l’obtention d’un état de pureté pour témoigner de la présence de Dieu dans leurs vies. Leur pratique de l’islam passe notamment par des rites d’invitation pendant lesquels des maîtres livrent à des élèves leur enseignement spirituel. Lors de leurs prières, certains soufis intègrent de la musique ou des danses (derviches).

Accusés de polythéisme

Cette dimension ésotérique de l’islam soufi est rejetée par les djihadistes de l’EI qui, eux, adhèrent à une version extrême du salafisme, courant rigoriste de l’islam. L’EI considère les soufis comme des hérétiques. Il les accuse également du plus grand péché de l’islam, le polythéisme, en raison de leur recours à l’intercession des saints morts. Les salafistes condamnent aussi les rites et prières adoptés par les soufis sans que le prophète Mohamed lui-même ne les ait jamais prescrits. Dans une interview publiée suite à la décapitation du chef soufi dans la lettre d’information de l’EI, al-Nabaa, le commandant de la «police de la moralité» de l’organisation au Sinaï avait déclaré que la «priorité absolue était de combattre les manifestations du polythéisme, y compris le soufisme».

Cette haine du soufisme ne transparaît pas dans une grande partie du monde musulman. Le soufisme a été accepté et pratiqué pendant des siècles de manière courante, aussi bien par les fidèles que par les théologiens les plus influents de l’islam sunnite. Le cheikh Ahmed el-Tayeb, actuel grand imam d’Al-Azhar, plus haute autorité de l’islam sunnite en Égypte, est lui-même d’obédience soufie, tout comme de nombreux hauts dignitaires religieux musulmans. Réagissant à l’attaque de vendredi dans un discours télévisé, Ahmed el-Tayeb a d’ailleurs condamné «un terrorisme noir et brutal».

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