La semaine qui a troublé toute une famille non indépendantiste de Barcelone

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Barcelonais opposés à l’indépendance de la Catalogne, les Sanz Cortinas ont les émotions à fleur de peau. Tristesse, colère, chamailleries et incertitudes ont marqué leur semaine, quand la crise politique est venue remuer chacun d’eux. 

Comme des centaines de milliers de personnes, ils ont manifesté dimanche à Barcelone pour rejeter une éventuelle indépendance de la Catalogne (nord-est de l’Espagne). Le désarroi laissé par le référendum d’autodétermination interdit du 1er octobre, émaillé par des violences policières choquantes, les a poussés à sortir pour une fois.

« Ce n’est pas notre genre d’aller manifester mais quant on vu que ça tournait mal, on a dit: ‘on doit sortir se faire entendre' », explique à l’AFP Mercedes Cortinas, femme au foyer de 51 ans.

« Je suis catalane et je me sens espagnole et ça ne veut pas dire que nous sommes des fachos! Ca, ça te met hors de toi et c’est pour ça que nous sommes venus, parce que nous sommes fatigués, indignés! »

La colère se mêle à la crainte face aux nouvelles qui s’enchaînent: manifestations souverainistes, fuite d’entreprises emblématiques de la Catalogne, les autorités séparatistes qui envisagent toujours de déclarer unilatéralement l’indépendance et Madrid qui pourrait suspendre l’autonomie régionale…

« Nous avons peur, nous voyons que ça va être la ruine pour la Catalogne et pour l’Espagne », dit Mercedes, de mère catalane et de père castillan.

« Ici on fait notre vie, j’ai trente ans de cotisations, on a la famille et d’un coup, que va-t-il se passer? », se demande son mari Julio Sanz, employé d’une chaîne de supermarchés, arrivé à l’âge de sept ans depuis Segovie (Castille-et-Léon) quand ses parents venaient chercher une vie meilleure dans la Catalogne plus prospère.

Prises de bec

La question revient tout le temps dans l’appartement de cette famille de Nou Barris (« nouveau quartier »), une zone ouvrière et populaire, moins séparatiste que d’autres quartiers de la capitale catalane.

Avec son fils aîné de 24 ans, Mercedes a eu quelques « prises de bec », rapporte le père, avant de préciser qu’Alejandro – qui n’est pas allé manifester – ne soutient pas les indépendantistes mais ne fait pas non plus confiance au gouvernement espagnol du conservateur Mariano Rajoy.

« Il pense comme moi que la Garde civile n’aurait pas dû donner des coups pareils aux gens » le jour du référendum, dit sa soeur Olga, 21 ans, en référence aux images choquantes d’électeurs pacifiques frappés à coups de matraque, brutalisés ou blessés par des balles en caoutchouc.

Mercedes a aussi surpris sa famille, mercredi, en se joignant à un concert de casseroles de protestation.

Nerfs en pelote

« A l’université, je ne parle qu’avec les amies qui pensent comme moi », dit Olga, qui étudie les Beaux-arts à l’université de Barcelone et assure que presque personne n’est allé en cours cette semaine.

Mercedes et les amies avec lesquelles elle marche chaque semaine – dont une indépendantiste – ont décidé de ne pas aborder la question: « Parce que nous sommes têtues » et que « ce serait triste de se disputer », dit-elle.

Julio, lui, a été troublé dans son quotidien, mardi: il assure n’avoir pu aller à son travail quand les transports publics étaient affectés par une grève générale contre la violence policière.

Puis vendredi, de nouveau, tous ont eu « les nerfs en pelote », à l’annonce du déménagement hors de Catalogne du siège de CaixaBank. La famille a décidé d’y laisser pour l’instant son argent: « ils nous assurent que la priorité, ce sont les clients », lâche Julio.

Toute la famille fait le voeux que le conflit politique s’apaise et qu’on évite toute violence. « Que tout s’arrange pour le bien des simples citoyens, conclut Julio, parce que ce sont eux qui paieraient les pots cassés ».

 

Par Diego URDANETA

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