Les conservateurs britanniques accusés d’islamophobie

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Après avoir longtemps exploité les accusations d’antisémitisme visant l’opposition travailliste, les conservateurs britanniques du Premier ministre Boris Johnson se retrouvent à leur tout au cœur de la tourmente, accusés de laisser prospérer l’islamophobie dans leurs rangs.

Le parti au pouvoir a annoncé mardi soir avoir confié au professeur en psychologie Swaran Singh, ancien membre d’une commission nationale sur l’égalité, une très attendue étude sur la discrimination en son sein.

Sa mission est déjà critiquée pour son spectre, jugé trop large pour répondre au problème très spécifique de l’islamophobie, qui sévirait dans le parti de Boris Johnson.

« En élargissant le sujet à la discrimination de façon plus générale, il est probable que l’étude soit pensée pour ignorer les preuves croissantes d’islamophobie au sein du Parti conservateur », a dénoncé le Conseil musulman britannique (MBC), qui représente des centaines de mosquées et d’associations musulmanes.

Le MBC avait déjà mis en garde contre « la peur palpable » qui agite les musulmans britanniques face à l’intolérance présente dans la vie politique anglaise.

Le rapport attendu à l’issue des travaux ne s’intéressera pas à « ce qui s’est réellement passé », ni à « l’ampleur » du problème, a accusé sur la BBC l’ancienne députée conservatrice Sayeeda Warsi, première femme musulmane à être devenue ministre.

Celle qui alerte depuis des années sur ce problème a critiqué le choix de M. Singh pour conduire l’étude, affirmant que celui-ci « estime que le terme même de +racisme+ est un terme contesté ». Interrogé par l’AFP, l’intéressé n’a pas souhaité commenter ces propos.

« Boîtes aux lettres »

Ces dernières années, l’opposition travailliste a été accusée de laisser l’antisémitisme prospérer dans ses rangs. Ces critiques ont miné sa campagne pour les législatives du 12 décembre, où elle a enregistré sa pire défaite en 80 ans. L’attention se porte désormais plus sur les conservateurs, grands gagnants de ces élections.

Le quotidien The Guardian a publié le mois dernier une enquête visant 25 conseillers locaux conservateurs, anciens ou encore en fonction, accusés d’avoir publié des contenus racistes ou islamophobes sur les réseaux sociaux.

Parmi les publications incriminées, on peut trouver des appels à interdire les mosquées ou des textes qui désignent les musulmans comme des « barbares » ou des « ennemis de l’intérieur ».

Le Premier ministre Boris Johnson est accusé de faire lui-même partie du problème, après avoir écrit l’année dernière, lorsqu’il était encore ministre des Affaires étrangères, un article dans lequel il comparait les musulmanes portant le voile intégral à des « boîtes aux lettres ».

Si le but était de défendre le droit des femmes à porter ce qu’elles veulent, il a entraîné une « hausse significative » des actes islamophobes, avait alors alerté l’association antiraciste Tell MAMA.

Selon un sondage de l’institut YouGov réalisé en début d’année pour le groupe antiraciste Hope Not Hate, 40% des conservateurs souhaitent que la politique migratoire du Royaume-Uni après le Brexit accepte moins de musulmans.

Un tiers d’entre eux pensaient que les « terroristes islamiques » reflétaient une supposée hostilité généralisée de la communauté musulmane à l’égard de Royaume-Uni. Ils étaient aussi 43% à déclarer préférer ne pas avoir de Premier ministre musulman.

Tolérance zéro

Le Parti conservateur avait déjà fait l’objet de vives critiques lors des élections municipales londoniennes, en 2016, pour avoir essayé d’associer le candidat travailliste Sadiq Khan, aujourd’hui premier maire musulman de la capitale, à l’extrémisme islamique.

La Commission britannique pour l’égalité et les droits de l’homme examine actuellement plusieurs plaintes à l’encontre des « Tories », mais n’a pas encore diligenté d’enquête officielle, comme cela a été le cas pour les accusations d’antisémitisme au sein du Labour.

Pendant la campagne législative, le leader conservateur Boris Johnson a insisté sur le fait que son parti avait adopté une « tolérance zéro » à l’égard des incidents antisémites, islamophobes ou relevant de toute autre forme de préjugés.

Il s’est aussi excusé pour « tout le mal qui avait été causé » par de précédents incidents, les qualifiant d' »intolérables », et promettant l’enquête indépendante désormais sur les rails.

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