La gifle, un signal d’alarme encore trop souvent minimisé

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Le député La France Insoumise Adrien Quatennens, le 16 juillet 2019 à l'Assemblée Nationale. Crédits photo: afp.com/Bertrand Guay

« Ça commence par une gifle »: ce geste est un symptôme alarmant de violences conjugales, pointent associations et experts, mais il reste encore trop souvent minimisé par le grand public.

Figure de la jeune garde de La France insoumise (LFI), Adrien Quatennens a reconnu avoir « donné une gifle » à son épouse, « dans un contexte d’extrême tension et d’agressivité mutuelle ». Le député, qui est sous le coup d’une enquête, a été mis cette semaine « en retrait de son travail parlementaire » par le groupe LFI à l’Assemblée.

Depuis, l’affaire est très commentée sur les réseaux sociaux. Pour beaucoup d’internautes, il ne s’agit pas d’un acte grave, comme peut l’être un viol; d’autres estiment qu’une « gifle exceptionnelle », lors d’un conflit entre époux, n’a « rien à voir » avec des violences conjugales. De nombreux internautes toutefois s’indignaient de l’acte et des réactions de soutien au député.

Liliane Daligand, psychiatre, relève qu’une gifle reste « une atteinte essentielle » à la personne. « Les victimes disent souvent que ça commence par une gifle ou une bousculade, puis les violences physiques s’aggravent », détaille à l’AFP cette spécialiste, également présidente d’une association d’aide aux femmes dans l’agglomération lyonnaise.

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Selon le « violentomètre », un outil de sensibilisation aux violences utilisé par des associations et des collectivités, « tu es en danger » quand ton partenaire « te pousse, te tire, te gifle (…) ». Ce violentomètre se présente sous la forme d’une échelle graduée, du vert au rouge, qui permet de repérer les signes d’une relation violente. Les gestes physiques sont classés en rouge.

« Tout acte de violence physique est grave et inadmissible », souligne auprès de l’AFP Françoise Brié, directrice générale de la Fédération nationale solidarités femmes (FNSF), qui gère le service d’accueil téléphonique 3919 pour les femmes victimes de violences.

Rarement un « acte isolé »

Le passage à l’acte de violence physique, qui se produit souvent au moment où une femme décide de quitter son conjoint, « peut la tétaniser » et l’empêcher ainsi d’entamer ses démarches. « Une seule crise de violence physique peut générer une terreur qui pousse les femmes à s’adapter aux injonctions de l’agresseur pour ne pas subir d’autres violences physiques », explique ainsi Françoise Brié.

Cela conduit parfois, au contraire, la victime à demander de l’aide à une association ou à signaler l’acte aux forces de l’ordre.

Car une gifle « est rarement un acte isolé », abonde à l’AFP Magali Mazuy, chercheuse à l’Institut national d’études démographiques (INED), spécialisée dans les violences de genre. Elle « s’inscrit dans un continuum » de violences verbales et psychologiques.

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« Quand il y a des violences physiques, il y a aussi généralement du dénigrement, un contrôle des sorties ou des relations avec les proches, par exemple, voire un climat de peur instauré par les auteurs de violence », décrit la sociologue.

L’absence d’indignation de certains face à des cas comme celui impliquant Adrien Quatennens s’explique, selon elle, par une « banalisation de la violence ».

Même constat pour Fabienne El-Khoury, co-porte-parole de l’association Osez le féminisme: « On voit des gifles dans des films, dans des sketchs humoristiques, cela montre que la société banalise la violence ».

Les violences faites aux femmes en particulier « sont tellement banales qu’on ne les repère plus », déplore Fabienne El-Khoury, bien que le sujet ce soit imposé dans le débat public ces derniers années. En cause notamment selon elle: « la culture pornographique » qui représentent les unes comme « des femmes-objets » et les hommes comme des dominateurs.

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