Inde: la répudiation express interdite pour les musulmans 

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La Cour suprême indienne a interdit mardi le divorce par répudiation express de la femme autorisé dans la communauté musulmane, un dossier brûlant qui touche au coeur de la conception de la laïcité du pays.

« Le triple talaq (divorce instantané, ndlr) enfreint le Coran et la charia. Il ne fait pas partie des pratiques religieuses et va à l’encontre de la moralité constitutionnelle », a déclaré un panel de cinq juges des principales religions d’Inde – hindouisme, islam, christianisme, sikhisme et zoroastrisme – qui a voté son interdiction par trois voix contre deux.

Selon cette pratique jusqu’ici acceptée en Inde, nation pourtant officiellement laïque, il suffit à un homme de prononcer trois fois de suite le mot « je divorce » (« talaq, talaq, talaq ») pour répudier sa femme. Des médias se sont faits écho de cas de divorces par lettre, Skype ou même message Whatsapp en Inde.

Plusieurs femmes musulmanes répudiées de cette manière avaient engagé un recours devant la plus haute instance judiciaire du pays pour obtenir l’abolition de cette procédure.

« Il est manifestement arbitraire d’autoriser un homme à rompre un mariage à sa guise et sur un caprice », ont estimé les juges dans leur avis majoritaire qui ne porte que sur cette pratique spécifique de divorce instantané.

Représentant 180 millions de personnes, soit 14% de la population, les musulmans sont la première minorité religieuse en Inde, peuplée à 80% d’hindous.

La laïcité à l’indienne, telle que définie dans sa Constitution, place toutes les religions sur un pied d’égalité. Les croyances de chaque personne définissent le droit qui prévaudra en matière de mariage, divorce ou héritage. Les mêmes règles ne s’appliqueront ainsi pas à un hindou ou à un musulman, par exemple.

Le gouvernement du Premier ministre Narendra Modi soutenait le recours contre le triple talaq, l’estimant inconstitutionnel et discriminatoire envers les femmes. Les nationaliste hindous militent de longue date pour un code civil uniformisé.

Mais cette prise de position du pouvoir en place était contestée au sein de la communauté musulmane, même parmi des opposants au triple talaq. Leur crainte sous-jacente est de voir à terme les minorités privées de leurs lois religieuses, avec le spectre de la domination de l’hindouisme majoritaire.

« Les mollahs disaient que c’est un péché mais autorisé. Mais maintenant la Cour suprême a clairement établi que c’est un péché et qui n’est pas autorisé », s’est félicité devant la presse Farah Faiz, l’une des plaignantes.

Le Coran prévoit une procédure de divorce en 90 jours à partir de la prononciation du premier talaq, un délai de 30 jours devant être observé entre chaque talaq afin, selon les spécialistes, de laisser le temps à la réflexion et la réconciliation.

La plupart des spécialistes jugeaient donc que le talaq instantané s’écarte des préceptes du Coran.

« Le verdict de la Cour suprême semble raisonnable. C’est le divorce instantané qui est une innovation absurde légitimée en Inde par nombre de religieux », a estimé sur Twitter l’historien S I Habib.

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