Espagne: le sort de Mariano Rajoy devant le Parlement

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Les députés espagnols ont commencé jeudi à débattre d’une motion de censure déposée par l’opposition socialiste pour renverser le chef du gouvernement conservateur espagnol Mariano Rajoy, affaibli par la condamnation de son parti dans un procès pour corruption.
Commencés à 07H00 GMT aux Cortes, les débats, qui s’annoncent agressifs, doivent se poursuivre jusqu’à vendredi matin avant un vote prévu en début d’après-midi.
Mais alors que les analystes politiques donnaient en début de semaine très peu de chances à cette motion, le vent semble avoir tourné à Madrid, le quotidien El Mundo parlant jeudi de « la première motion de censure de la démocratie ayant une probabilité d’aboutir ».
« Les chances que la motion réussissent ont augmenté », confirme Antonio Barroso, analyste au cabinet Teneo Intelligence en citant le chiffre de 65% de probabilité.
Cette motion a été déposée vendredi dernier par le Parti Socialiste (PSOE) au lendemain de l’annonce de la condamnation du Parti Populaire (PP) de Rajoy dans un procès pour corruption, une affaire appelée « Gürtel » en Espagne.
Selon les juges, qui ont condamné 29 personnes dont une douzaine d’anciens cadres ou élus du PP à un total de 351 ans de prison, la formation a bénéficié de fonds obtenus par des maires PP dans le cadre d’« un authentique et efficace système de corruption institutionnel » via la « manipulation de marchés publics ».
La justice a conclu en outre à l’existence d’une « caisse noire » au sein du PP et mis en doute la « crédibilité » du témoignage de Rajoy qui avait nié l’existence de cette comptabilité parallèle devant le tribunal. Elle a condamné le parti à rembourser 250.000 euros.
« Depuis que nous connaissons la sentence de l’affaire Gürtel, il n’y a plus de suppositions mais des certitudes. La certitude juridique que Gürtel était le PP et que le PP était Gürtel », a dénoncé José Luis Abalos, secrétaire d’organisation du PSOE, qui a été le premier à prendre la parole à la chambre.
« Cela affecte gravement la crédibilité de la présidence du gouvernement et la dignité de notre démocratie », a-t-il ajouté.
« Vous mentez », a répliqué Rajoy en accusant ses adversaires d’exagérer la portée de la sentence, « qui ne concerne pas les membres du gouvernement« .
Il a qualifié la motion de censure qui en cas de succès porterait au pouvoir le patron des socialistes Pedro Sanchez « d’exercice d’opportunisme au service d’une ambition personnelle ».
Sanchez futur chef du gouvernement ?
Concrètement, si la motion réussit, Rajoy, qui est au pouvoir depuis 2011 mais en minorité depuis 2015, sera automatiquement destitué et Sanchez immédiatement investi chef du gouvernement.
Si Rajoy, qui écarte toute idée d’une démission, survit au contraire à la motion de censure, il en ressortirait de toutes façons très affaibli, soulignent les analystes.
Hormis son propre parti (84 députés), Sanchez pourrait compter jusqu’à 175 voix, entre l’appui garanti ou probable de la gauche radicale de Podemos, des indépendantistes catalans et de plusieurs autres partis régionalistes, selon les calculs de la presse. Soit une voix de moins que le seuil de majorité absolue (176 voix).
Comme sur le budget la semaine dernière, le sort de Rajoy devrait encore une fois être suspendu à la décision du Parti Nationaliste Basque (PNV, cinq députés) qui n’a pas encore révélé sa position mais pourrait donner ses voix au PSOE de Sanchez avec qui il gouverne le Pays basque.
Tous les alliés potentiels de Sanchez ont en commun leur refus d’élections immédiates, réclamées par le parti libéral Ciudadanos (32 députés), en tête dans les sondages. Fervent opposant aux privilèges du Pays basque et à l’indépendance de la Catalogne, il a lâché Rajoy dont il était l’allié mais a refusé jusqu’ici d’appuyer le PSOE.

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