Election de Biden: la fin de la lune de miel entre Pyongyang et Washington

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L’alternance à la Maison blanche signale probablement la fin de la lune de miel entre Pyongyang et Washington, observent des analystes, qui rappellent que le président américain élu Joe Biden qualifiait récemment de « voyou » le leader nord-coréen.

Le mandat du président américain sortant Donald Trump a été marqué par un virage à 180 degrés vis-à-vis de Pyongyang. Alors que le bouillant milliardaire et le leader nord-coréen Kim Jong Un échangeaient initialement des insultes, ils s’étaient retrouvés à partir de 2018 lors de trois rencontres historiques, M. Trump louant depuis sa « très bonne relation » avec le maître de Pyongyang.

La mise en scène de cette entente n’a cependant jamais masqué le fait qu’aucun progrès n’a été réalisé sur leur contentieux fondamental: les programmes nucléaire et balistique de Pyongyang.

La victoire de M. Biden laisse entrevoir un retour à une situation plus classique, selon les experts, qui pensent que son administration exigera de réelles avancées sur la dénucléarisation avant même d’imaginer un nouveau sommet.

Pendant sa campagne, M. Biden avait affirmé qu’il ne rencontrerait pas M. Kim sans qu’un certain nombre de conditions soient réunies, accusant M. Trump d’être allé trop loin dans le rapprochement avec le leader nord-coréen.

M. Trump « a parlé de ce bon copain qui est un voyou », avait déclaré M. Biden au sujet de M. Kim. « C’est comme dire que nous avions une bonne relation avec Hitler avant qu’il n’envahisse l’Europe ».

 

– Pyongyang voulait Trump –

 

Les médias officiels nord-coréens n’ont toujours pas mentionné le résultat de l’élection américaine. L’an dernier, l’agence officielle KCNA avait présenté le candidat démocrate comme un « chien enragé » qu’il convenait de « battre à mort ».

Certains experts jugent que le Nord voyait dans l’approche peu orthodoxe de M. Trump sa meilleure chance d’arracher un accord qui lui aurait permis de garder une partie de ses armes nucléaires et balistiques.

Dans ce contexte, Pyongyang sera « légèrement irrité par l’alternance », estime Soo Kim, ex-analyste à la CIA: « Le régime est conscient du fait que les chances d’une rencontre de haut niveau avec un dirigeant américain vont désormais se réduire ».

 

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Malgré les négociations avec l’administration Trump, Pyongyang n’a vraisemblablement jamais cessé de poursuivre ses programmes militaires interdits – jusqu’à exhiber début octobre un missile balistique intercontinental géant lors d’un défilé.

Le régime nord-coréen a réalisé des dizaines d’essais de missiles depuis le fiasco du deuxième sommet Trump-Kim en février 2019 à Hanoï, mais il a soigneusement évité de tester un missile intercontinental ou une bombe nucléaire, ce qui aurait pu être une ligne rouge pour Washington.

Et il se peut que ce soit « par respect pour M. Trump », explique Shin Beom-chul, chercheur à l’Institut de recherche coréen pour la stratégie nationale: « La Corée du Nord espérait la réélection de Trump. »

 

– « Cibler la Corée du Sud » –

 

Aujourd’hui, la victoire de M. Biden « complique considérablement les calculs de Pyongyang », selon Park Won-gon, professeur de relations internationales à la Handong Global University de Pohang (Corée du Sud).

Le régime reclus nourrit une rancoeur tenace à l’égard de Joe Biden pour son rôle au sein de l’administration de l’ex-président américain Barack Obama (2009-2017), dont il était le vice-président, et sa doctrine de « patience stratégique » vis-à-vis de Pyongyang. L’idée était de refuser tout dialogue si le régime nord-coréen ne faisait pas d’abord des concessions.

 

Lire aussi: Mahmoud Abbas appelle Biden à « renforcer » les liens américano-palestiniens

 

Le Nord avait attendu quatre mois après l’entrée de Barack Obama à la Maison blanche pour réaliser en mai 2009 son deuxième essai nucléaire. Il est probable qu’il patiente davantage pour évaluer la présidence Biden, afin de « garder la main », estime Soo Kim.

« Kim Jong Un comprend peut-être qu’un essai mal calculé pourrait déclencher une réaction négative des Etats-Unis et de ses alliés », dit l’ancienne analyste à la CIA.

Pour M. Park, Pyongyang pourrait opter pour une stratégie moins voyante pour attirer l’attention du nouveau leader américain.

« Il est fort possible que Pyongyang cible la Corée du Sud, » croit-il. « Le Nord pourrait juger plus sûr de créer des tensions sur la péninsule coréenne. »

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