Comprendre le malaise socio-économique des Iraniens

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Bien que la croissance du pays soit repartie à la hausse depuis l’accord sur le nucléaire de 2015, les Iraniens qui ont manifesté ces derniers jours ne voient pas leur quotidien s’améliorer.
Malgré le relatif retour au calme en Iran, les raisons qui ont poussé des milliers de personnes à descendre dans la rue ces derniers jours sont toujours présentes. À la différence de la «vague verte» de 2009 née d’une contestation politique, la colère qui s’est emparée le 28 décembre de la rue iranienne est avant tout l’expression d’un malaise socio-économique qui ne date pas d’hier et exacerbé par des espoirs déçus nés de l’accord sur le nucléaire de 2015.
Pour les Iraniens, cet accord marque la fin de dix ans de gel économique et signe le retour de l’Iran dans le système économique mondial. À l’époque, il soulève beaucoup d’espoirs. «Avec la levée des sanctions économiques, les Iraniens ont cru que leur sort allait s’améliorer. Mais aujourd’hui, huit mois après avoir reconduit Hassan Rohani au pouvoir, ils ont le sentiment que rien ne change» explique au Figaro Thierry Coville, chercheur à l’Iris et spécialiste de l’Iran.
D’après un sondage publié au mois de juin par l’Université du Maryland et l’institut de sondage IranPoll basé à Toronto, et cité par Slate, 64 % de la population iranienne juge la situation économique du pays comme mauvaise et 34 % très mauvaise. Preuve du pessimisme ambiant, en mai dernier, 77 % des personnes interrogées estimaient que leur situation économique s’était détériorée ou n’avait pas évoluée depuis quatre ans. «Malgré l’accord sur le nucléaire qui a permis d’améliorer la situation macroéconomique du pays, une partie de la population, parmi les plus modestes, se sent délaissée», souligne Thierry Coville.
Une croissance en hausse et une inflation en baisse
Pourtant, plusieurs indicateurs sont au vert. Avant la levée des sanctions, la République islamique connaissait une croissance proche de zéro. Aujourd’hui, le Fonds monétaire international (FMI) estime que l’économie iranienne, fortement dépendante du pétrole, devrait croître de 3,5 % en 2017 et que la croissance devrait s’accélérer légèrement en 2018 et 2019 pour atteindre respectivement 3,8 % et 4 % du PIB.
Autre indicateur positif, selon les estimations de la Banque mondiale, le taux d’inflation pour 2016 est passé sous la barre des 10 % sous l’effet du durcissement de la politique monétaire. Un chiffre inédit depuis 25 ans, alors qu’il a frôlé les 40 % en 2013. «L’environnement macro-économique s’améliore depuis 2016 du fait de l’accord sur le nucléaire. L’Iran peut exporter maintenant tout son pétrole alors qu’avant elle n’en exportaient que 50 %, souligne Thierry Coville. Mais parallèlement les tensions sociales, sont fortes» ajoute-t-il.

Chômage endémique
En Iran, le chômage est en effet très élevé. Il touche officiellement 12 % de la population active selon le FMI. «Mais selon d’autres indicateurs, ce serait plus autour de 16 à 18 %» selon Thierry Coville qui précise que «chaque année 800.000 personnes arrivent sur le marché du travail, contre 150.000 en France». Le chômage concerne surtout les jeunes diplômés. Et il y en a beaucoup en Iran. «Chaque année, ce sont 700.000 nouveaux diplômés qui ne trouvent pas de travail», ajoute le spécialiste.
Autre raison du mécontentement qui s’est manifesté dans les rues iraniennes début janvier: le sentiment de corruption. «Les gens ne font confiance aux institutions publiques. Ils ont l’impression qu’elles ne travaillent que pour certains groupes privilégiés, et donc ne sont pas justes, et ne font pas véritablement leur travail» explique Thierry Coville.

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