Cinq ans de prison pour la chercheuse franco-iranienne Fariba Adelkhah

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L'anthropologue franco-iranienne Fariba Adelkhah a été condamnée à cinq ans de prison pour "collusion en vue d'attenter à la sûreté nationale". DR

Détenue en Iran depuis près d’un an, l’anthropologue franco-iranienne Fariba Adelkhah a été condamnée à cinq ans de prison pour « collusion en vue d’attenter à la sûreté nationale », a annoncé samedi son avocat.

Détenue dans la prison d’Evine à Téhéran, cette spécialiste du chiisme âgée de 61 ans a toujours clamé son innocence.

Son arrestation en juin 2019, comme celle d’un autre chercheur français Roland Marchal –libéré récemment–, avait été dénoncée par la France qui réclame sa libération. Mais l’Iran ne reconnaît pas la double nationalité.

Son comité de soutien à Paris a dénoncé samedi le « processus opaque » dans lequel s’est déroulée la procédure judiciaire, l’apparentant au « procès de Kafka ».

La chercheuse a été condamnée à cinq ans de prison pour « collusion en vue d’attenter à la sûreté nationale » ainsi qu’à un an pour « propagande contre le système » politique de la République islamique, mais elle doit purger seulement la peine la plus longue, a indiqué Me Saïd Dehghan. Ces condamnations peuvent néanmoins faire l’objet d’un appel, selon lui.

« Collusion »

Le procès de la chercheuse s’était ouvert le 3 mars devant la 15e chambre du tribunal révolutionnaire de Téhéran. A l’issue de la deuxième audience le 19 avril, son avocat avait dit espérer une relaxe.

La chercheuse avait été très affaiblie par une grève de la faim de 49 jours entre fin décembre et février, selon Me Dehghan.

Son collègue et compagnon, Roland Marchal, avait été arrêté comme elle en juin 2019 alors qu’il venait lui rendre visite à Téhéran.

Accusé aussi de « collusion en vue d’attenter à la sûreté nationale », il a fini par être relâché fin mars. Téhéran avait alors évoqué un échange avec un ingénieur iranien détenu en France et menacé d’extradition vers les Etats-Unis.

 

Lire aussi : Téhéran dénonce « l’ingérence » de Paris dans l’affaire d’une chercheuse détenue

 

Spécialiste de l’Afrique subsaharienne, Marchal est, comme Adelkhah, chercheur au Centre de recherches internationales (CERI) de Sciences Po Paris.

Vu qu' »au moins deux personnes doivent être impliquées » dans l’accusation de « collusion en vue d’attenter à la sûreté nationale », il se peut que la seconde soit Marchal, dont l’affaire n’a pas été classée même s’il a été libéré, a estimé samedi Dehghan.

Selon l’avocat, l’accusation de « propagande contre le système politique » se réfère à des propos de la chercheuse sur le port du voile en Iran mais selon lui il s’agit de remarques d’une universitaire avant tout plus que d’un jugement de valeur.

Après sa grève de la faim, le comité de soutien d’Adelkhah s’était alarmé des risques de propagation de l’épidémie de Covid-19 dans les prisons d’Iran, un des pays les plus touchés au monde avec près de 7.000 morts.

« Billard à trois bandes »

Me Dehghan avait indiqué récemment que la chercheuse souffrait d’une « maladie rénale, conséquence de (sa) grève de la faim ».

Les arrestations d’étrangers en Iran, notamment binationaux, souvent accusés d’espionnage, se sont multipliées depuis le retrait unilatéral en 2018 des Etats-Unis de l’accord international sur le nucléaire iranien et le rétablissement de dures sanctions américaines contre Téhéran.

Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, avait qualifié début février d' »insupportables » les détentions de Fariba Adelkhah et Roland Marchal.

 

Lire aussi : Iran: arrestation d’un nouveau chercheur en anthropologie

 

« Il ne s’agit pas d’un processus juridique en bonne et due forme, il n’y a évidemment aucun débat contradictoire », a estimé samedi Jean-François Bayart, professeur à l’Institut de Hautes Etudes Internationales et du Développement (IHEID) de Genève et membre du comité de soutien.

L’anthropologue est prise dans un « billard à trois bandes », a-t-il ajouté, soulignant cependant qu’elle demeurait « extrêmement combative, lucide et déterminée ».

Au cours des derniers mois, l’Iran a procédé à plusieurs échanges de prisonniers avec des pays détenant des ressortissants iraniens condamnés, en attente de procès, ou menacés d’extradition vers les États-Unis.

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