Catalogne: gouvernement et séparatistes font monter la pression

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Alors que le Sénat s’apprête à voter, vendredi, la mise sous tutelle de la Catalogne, le président de la région, Carles Puigdemont, s’est dit prêt à se rendre à Madrid pour empêcher cette éventualité. Dans le cas contraire, ce dernier n’exclut pas de déclarer l’indépendance unilatéralement.

L’espoir d’une solution à la crise entre Barcelone et Madrid semblait ténu ce mardi, le président séparatiste catalan envisageant toutefois d’aller plaider devant le Sénat pour éviter une prise de contrôle directe de la Catalogne par le gouvernement espagnol. Une semaine après avoir laissé entendre que l’organisation d’élections régionales anticipées pourrait éviter une mise sous tutelle sans précédent depuis que l’Espagne a retrouvé la démocratie en 1977, le gouvernement a réduit la portée de cette ouverture.

Le gouvernement prêt à en découdre

Vendredi, le Sénat espagnol doit débattre – et certainement approuver – les mesures par lesquelles le gouvernement espagnol pourra prendre le contrôle des institutions catalanes pour freiner leurs velléités indépendantistes. Concrètement, le gouvernement de Mariano Rajoy compte destituer tout l’exécutif catalan et confier ses compétences aux ministères à Madrid, prendre le contrôle de la police catalane, mettre sous tutelle le parlement et les médias publics régionaux.

« La violation par Carles Puigdemont (le président séparatiste de la Catalogne, NDLR) de ses obligations ne se règle pas exclusivement en convoquant des élections », a prévenu Rafael Catala, le ministre de la Justice. Il devrait par exemple «déclarer expressément si cette déclaration d’indépendance qu’il manifeste avec tant d’ambiguïté a eu lieu ou non », a-t-il précisé. Mais, il « ne l’a pas fait jusqu’ici, donc ne croyez pas que je m’attende à grand-chose », a ajouté le ministre conservateur espagnol.

 Le dilemme de Carles Puigdemont

Pendant ce temps, Carles Puigdemont, silencieux, étudiait toujours, ce mardi, la possibilité de se rendre devant le Sénat à Madrid pour présenter directement ses arguments contre le déclenchement de l’article 155 de la Constitution qui permet cette prise de contrôle. « Sa volonté est d’y aller pour pouvoir s’expliquer, contester cette action de l’État espagnol mais (…) je ne peux pas vous assurer que ce soit matériellement possible », a déclaré un porte-parole de Carles Puigdemont.

Les séparatistes campent sur leur position

Si les séparatistes ne font pas marche arrière, les mesures demandées par Madrid seront entérinées par le Sénat sans l’ombre d’un doute, puisque le Parti populaire (conservateur) du chef du gouvernement Mariano Rajoy y dispose d’une confortable majorité absolue. Leur entrée en vigueur est prévue samedi. Leur application réveillerait des souvenirs douloureux pour la région de 7,5 millions d’habitants dont l’autonomie avait été abolie pendant la dictature de Francisco Franco (1939-1975).

Carles Puigdemont a menacé de donner son feu vert à une proclamation unilatérale d’indépendance de la «République de Catalogne» au Parlement régional si ces mesures sont appliquées. Et deux des trois formations qui soutiennent son gouvernement ne semblaient pas disposées à reculer ce mardi. «Il n’y a qu’une réponse possible: décider une république de Catalogne», a déclaré une sénatrice de la gauche indépendantiste catalane, Mirella Cortes, après avoir longuement dénoncé la violation des droits des Catalans. La veille, la CUP (Candidature d’unité populaire, extrême gauche), a en outre appelé les citoyens à une «désobéissance massive» en cas de mise sous tutelle de la région.

En Catalogne, les modérés hésitent

Jusqu’ici, chaque mesure de Madrid contre les indépendantistes catalans – actions policières, perquisitions, poursuites judiciaires et incarcérations – a jeté des dizaines voire des centaines de milliers de personnes dans les rues de Barcelone et de Catalogne. Le gouvernement catalan menace de déclarer l’indépendance sur le fondement d’un référendum d’autodétermination interdit organisé en Catalogne le 1er octobre – où le oui à l’indépendance l’a, selon ses chiffres, emporté à 90% avec 43% de participation.

Mais, en Catalogne, les plus modérés hésitent. Les milieux économiques pressent le gouvernement régional de faire marche arrière. Depuis le 1er octobre près de 1300 entreprises ont déplacé leur siège social de Catalogne, craignant pour leur sécurité juridique. Parmi elles, la première banque catalane, CaixaBank, a admis, ce mardi, par la voix de son directeur général, qu’elle avait déplacé le sien à Valence après des retraits de dépôts provoqués par la tension politique. «Nous sommes au bord d’une situation aux conséquences imprévisibles (…) qui peut déboucher sur un conflit très grave», s’est inquiété, ce mardi, le socialiste catalan Josep Borrell, ancien président du Parlement européen.

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