Bouteflika de retour en Algérie, où la contestation ne faiblit pas

Publié le

Le président algérien Abdelaziz Bouteflika a regagné dimanche l’Algérie, où il fait face à une contestation inédite en 20 ans de pouvoir, à l’issue de deux semaines d’hospitalisation en Suisse pour des « examens médicaux ».

Son retour – que laissait supposer l’atterrissage sur une base militaire au sud d’Alger d’un appareil aux couleurs algériennes ayant décollé de Genève – a été confirmé officiellement par la présidence algérienne.

Dimanche, des milliers de lycéens ont à leur tour défilé à travers le pays contre la candidature à un cinquième mandat que brigue M. Bouteflika, le 18 avril, et une partie du pays a suivi un appel à la grève générale lancé sur les réseaux sociaux.

Depuis le 22 février, les Algériens descendent massivement dans la rue pour demander au chef de l’Etat, qui a fêté ses 82 ans durant son séjour suisse, de renoncer à briguer un 5e mandat.

Les séquelles d’un AVC ont empêché M. Bouteflika de s’adresser de vive voix à ses concitoyens depuis 2013 et ont rendu rares ses apparitions publiques.

L’armée « partage » avec le peuple algérien « les mêmes valeurs et principes », a déclaré dimanche devant les élèves de plusieurs écoles militaires le général Ahmed Gaïd Salah, chef d’état-major de l’armée algérienne et vice-ministre de la Défense.

L’Algérie et l’armée « sont certainement chanceuses d’avoir ce peuple », a estimé le général, dans un discours apparemment plus conciliant que ceux qu’il avait prononcés depuis le début de la contestation.

Dimanche, dans le centre d’Alger, où les klaxons –expression de contestation– ont résonné toute la journée, un millier de lycéens, drapeaux algériens à la main ou noués autour du cou, se sont rassemblés durant plusieurs heures en scandant notamment « Hé, Bouteflika, pas de 5e mandat » avant de se disperser dans le calme en fin d’après-midi.

 

Universités occupées

 Des défilés lycéens ont été signalés dans divers quartiers de la capitale et dans plusieurs villes du pays, où de nombreux lycées sont fermés ce dimanche, premier jour de semaine en Algérie.

Etudiants et enseignants occupent également plusieurs universités du pays, refusant de se plier à la décision des autorités, la veille, d’avancer d’une dizaine de jours à dimanche les vacances universitaires et de les allonger de fait d’autant.

Ils sont en grève dans plusieurs universités depuis plusieurs jours. Une décision de fermer les cités universitaires durant ces vacances avancées –ce qui aurait contraint les étudiants, nombreux dans les manifestations contre le 5e mandat, à rentrer chez eux– a été rapidement annulée face au tollé.

Une nouvelle marche estudiantine est prévue mardi pour la 3e semaine consécutive.

L’appel à la grève générale a été diversement suivi dans le pays et dans la capitale. A Alger, aucun train – de banlieue ou grande ligne – ne partait des gares et aucun métro, tramway ou bus ne circulait.

Une majorité de magasins du centre commerçant de la capitale n’ont pas ouvert. Le marché Reda Houhou, ex-Clauzel, dans le centre, a fonctionné, mais une partie des commerçants n’ont pas rejoint leur étal.

De nombreuses boutiques du quartier populaire de Bab el Oued ou de Zéralda, en banlieue, sont aussi restées fermées, ont témoigné des habitants.

Dans le quartier de Belouizdad, à cinq kilomètres du centre-ville, quelques magasins de l’artère principale sont restés fermés, mais les supérettes, cafés et boulangeries étaient ouverts, selon un habitant. La situation était similaire à Saoula, dans la banlieue sud d’Alger.

La plupart des administrations ont semblé fonctionner, de même que les entreprises privées.

En revanche, « tout le monde » s’est mis « en grève », au siège de la Société nationale des Véhicules industriels (SNVI) dans la banlieue est d’Alger, selon un des 6.000 employés de cette entreprise publique de fabrication de camions, bus, véhicules de secours etc…

Les employés du fournisseur national d’électricité et de gaz Sonelgaz ont fait grève une heure dans la matinée et recommenceront toute la semaine, a indiqué un salarié. Aucun vol de la compagnie aérienne nationale Air Algérie n’était en revanche annoncé annulé.

Hors de la capitale, la situation a été également contrastée, selon les témoignages recueillis par l’AFP.

 

Débrayages

A Oran (nord-ouest), deuxième ville du pays, « on n’a pas l’impression qu’il y a une grève générale », a indiqué un journaliste local en affirmant que de nombreux commerces étaient ouverts.

A Constantine (nord-est), troisième ville du pays, commerces ouverts et fermés sont à parité, a rapporté un journaliste local.

A Annaba, quatrième ville du pays, en revanche, tous les marchés, commerces et administrations sont fermés, selon un journaliste de la ville.

A Béjaia, dans la région de Kabylie (nord) « tout est fermé »: lycées, collèges, administrations et entreprises, affirme à l’AFP Achour Idir, un syndicaliste du secteur de l’Education, qui décrit une « paralysie totale de la ville ».

Dans un tweet, le conglomérat Cevital (agroalimentaire, grande distribution, industrie et services), plus important groupe privé algérien, s’est déclaré « solidaire avec le mouvement de grève générale (…) pour réclamer un changement de système » en Algérie.

Cevital a été fondé et est la propriété d’Issad Rebrab, considéré comme la première fortune du pays, qui accuse depuis plusieurs années le gouvernement de bloquer ses investissements en Algérie.

Le site d’information TSA (Tout sur l’Algérie) signale aussi des grèves dans « plusieurs structures » de Sonatrach, l’entreprise nationale des hydrocarbures, sans préciser s’il s’agit de sites administratifs ou de production.

Des milliers de personnes ont également une nouvelle fois manifesté dimanche dans plusieurs villes de France contre la candidature de M. Bouteflika.

La rédaction vous conseille

Les titres du matinNewsletter

Tous les jours

Recevez chaque matin, l'actualité du jour : politique, international, société...

Bouteflika de retour en Algérie, où la contestation ne faiblit pas

S'ABONNER
Partager
S'abonner