Alger et Washington, un couple aux intérêts communs dans une région en crise

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Lors d'une récente visite à Alger, le chef de l’Africom, le général Stephen Townsend, a salué le rôle de l'Algérie comme "partenaire engagé dans la lutte contre le terrorisme".

La visite du ministre américain de la Défense jeudi à Alger, la première depuis 2006, pourrait marquer un renouveau de l’alliance entre deux pays aux intérêts stratégiques communs face aux jihadistes au Sahel et au conflit en Libye.

Mark Esper entend « approfondir la coopération avec l’Algérie sur des questions clés de sécurité régionale, comme la menace posée par les groupes extrémistes », selon un haut responsable militaire américain.

Entre deux escales à Tunis et Rabat, le chef du Pentagone sera reçu par le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, aussi chef des armées et ministre de la Défense, et le chef d’état-major, le général Saïd Chanegriha.

Si les responsables militaires américains se rendent fréquemment en Tunisie et au Maroc, où la coopération en matière de défense avec les Etats-Unis est bien rodée, M. Esper sera le premier secrétaire à la Défense à se rendre en Algérie -alliée de la Russie et de la Chine- depuis Donald Rumsfeld en février 2006.

Lors d’une récente visite à Alger, le chef du commandement militaire américain en Afrique (Africom), le général Stephen Townsend, a salué le rôle de l’Algérie comme « partenaire engagé dans la lutte contre le terrorisme ».

« Renforcer cette relation est très important pour nous (…) Renforcer la stabilité régionale est une nécessité mutuelle », a-t-il plaidé.

L’Algérie, qui craint les risques d’instabilité à ses frontières, s’efforce de réactiver son rôle sur la scène diplomatique régionale et tente d’endosser un rôle de médiateur dans les crises au Mali et en Libye.

– « Nouveaux acteurs » –

« Les Américains veulent se repositionner dans la région qui a vu arriver de nouveaux acteurs comme la Turquie. Ils veulent connaître le point de vue algérien sur la situation sécuritaire », explique le politologue Mansour Kedidir.

« L’Algérie a toujours été considérée par les Américains comme un +Etat pivot+ dont la vulnérabilité peut embraser toute la région si elle est affectée par les jihadistes », ajoute M. Kedidir.

Côté algérien, « il y a une proximité de points de vue sur beaucoup de questions comme la Libye et le Sahel », abonde Akram Kharief, directeur du site spécialisé menadefense.net.

Le partenariat entre Alger et Washington est loin d’être nouveau.

Le dey d’Alger et les jeunes Etats-Unis signèrent un Traité d’amitié et de paix dès 1795, bien avant le début de la colonisation française (1830).

Pendant la Guerre d’Algérie (1954-1962), dans un contexte mondial de décolonisation, les Etats-Unis furent favorables à un dialogue avec le Front de libération national (FLN) en vue de l’indépendance. Selon certains historiens américains, le général de Gaulle aurait même négocié avec les nationalistes algériens sous la pression de Washington.

Plus récemment, « les Etats-Unis ont de fortes relations sécuritaires bilatérales avec l’Algérie qui remontent au moins au début de la Guerre contre la terreur » après les attentats du 11 septembre 2001, relève Michael Shurkin, analyste de la Rand Corporation, institut de stratégie militaire américain.

L’Algérie fut parmi les premiers pays à notifier son soutien à la Maison Blanche pour lancer une offensive internationale contre le terrorisme, rappelait l’ex-président Abdelaziz Bouteflika.

« Notre pays a compris, peut-être mieux et plus tôt que d’autres, la douleur de l’Amérique  », a-t-il dit en référence à la guerre civile qui opposa forces armées et maquis jihadistes pendant la « décennie noire » (1992-2002).

– « Pré carré français » –

« Le rôle des Etats-Unis doit être vu dans le contexte de la réticence de l’Algérie à travailler avec la France », ancienne puissance coloniale, observe M. Shurkin.

« C’est un autre exemple qui prouve que le temps où la France était jalouse de l’implication des Etats-Unis dans son pré carré est révolu, et que la France se félicite de l’engagement américain », opine ce spécialiste du Sahel.

Quelque 5.000 militaires français sont déployés au Sahel dans le cadre de l’opération « Barkhane » depuis août 2014.

Au delà des enjeux géopolitiques régionaux, les Etats-Unis seraient aussi intéressés à vendre davantage d’armement à l’Algérie, dont 90% du matériel provient de Russie.

A la veille de la visite de M. Esper, le chef de l’armée algérienne — la deuxième d’Afrique — a reçu le directeur du Service fédéral pour la coopération militaire et technique russe, Dimitrii Chougaev, pour discuter « de la coopération militaire entre les deux pays ».

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