Afghanistan: première exécution publique depuis la prise de pouvoir des talibans

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Afghanistan: première exécution publique depuis la prise de pouvoir des talibans
Un soldat taliban à Kaboul, le 3 janvier 2022. © Reuters

Pour la première fois depuis leur retour au pouvoir en Afghanistan, les talibans ont procédé à une exécution publique mercredi, celle d’un homme condamné pour meurtre, quelques semaines seulement après l’injonction de leur chef suprême d’appliquer la loi islamique jusque dans ses aspects les plus brutaux.

« La cour suprême a reçu l’ordre d’exécuter cet ordre de +qisas+ lors d’un rassemblement public d’habitants » à Farah (Ouest), a déclaré dans un communiqué le porte-parole des talibans, Zabihullah Mujahid, faisant référence à la loi du talion qui figure dans la loi islamique.

Le condamné, prénommé Tajmir, fils de Ghulam Sarwar, était accusé d’avoir assassiné en 2017 un homme et volé sa moto ainsi qu’un téléphone portable, selon le communiqué des talibans.

« Plus tard, cette personne a été reconnue par les héritiers du défunt », indique la même source. L’homme qui résidait dans le district d’Anjil, dans la province d’Hérat, dans l’Ouest de l’Afghanistan, a reconnu sa culpabilité, assure le porte-parole.

Des dizaines de fonctionnaires du tribunal ainsi que des responsables talibans ont assisté à cette exécution. La manière dont il est mort n’a néanmoins pas été précisée.

Sous le premier régime taliban (1996-2001), les condamnés étaient majoritairement tués par balle ou par lapidation selon les crimes reprochés.

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Les nouveaux dirigeants du pays ont assuré que l’affaire avait été examinée de manière approfondie par différents tribunaux (première instance, cour d’appel, et cour suprême), avant que leur chef suprême Hibatullah Akhundzada n’entérine la sentence.

« Cette affaire a été examinée de manière très précise », a déclaré le porte-parole des talibans.

Mi-novembre, Hibatullah Akhundzada avait ordonné aux juges d’appliquer tous les aspects de la loi islamique, notamment les exécutions publiques, les lapidations et les flagellations, ainsi que l’amputation de membres pour les voleurs.

« Examinez soigneusement les dossiers des voleurs, des kidnappeurs et des séditieux », avait indiqué dans un tweet le porte-parole des talibans en citant Akhundzada.

Pour « ces dossiers dans lesquels toutes les conditions de la charia (…) ont été remplies, vous êtes obligés d’appliquer » l’ensemble des sanctions prévues, avait-il poursuivi.

« Avec cette mise en demeure d’appliquer ce qui est écrit, Hibatullah Akhundzada rappelle que la seule loi sur terre est celle de Dieu et que les hommes n’ont pas à l’interpréter », analyse Karim Pakzad chercheur à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris), interrogé par l’AFP.

Alors que les talibans font face aujourd’hui à des résistances au sein même du régime, « la charia, qui est la base idéologique du mouvement, est une manière de rassembler et de créer une unité », observe le chercheur.

Les talibans ont procédé à plusieurs flagellations publiques depuis leur accession au pouvoir en août 2021, mais l’exécution de mercredi est la première qu’ils ont reconnue.

Les réseaux sociaux sont inondés depuis plus d’un an de vidéos et de photos de combattants talibans infligeant des flagellations dans la rue à des personnes accusées de diverses infractions.

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Des rapports font également état de flagellations pour adultère dans les zones rurales après la prière du vendredi, mais il est difficile de les vérifier de source indépendante.

A leur retour au pouvoir, les talibans avaient promis de se montrer plus souples dans l’application de la charia, mais ils sont largement revenus à l’interprétation ultra-rigoriste de l’islam qui avait marqué leur premier passage au pouvoir.

Ils punissaient alors en public les auteurs de vols, d’enlèvements ou d’adultère, de peines telles que l’amputation d’un membre ou la lapidation.

« Ces punitions sont interdites dans le monde entier. C’est inhumain de voir ça », a réagi mercredi auprès de l’AFP, Ogai Amil, militante afghane pour les droits humains.

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