Perturbations à la RAM: 4 clés pour comprendre le malaise des pilotes

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Plusieurs vols de la Royal Air Maroc (RAM) ont été annulés et le trafic aérien perturbé cette semaine. La compagnie aérienne accuse les pilotes de faire grève mais ces derniers s’en défendent et pointent le sous-effectif.
Une trentaine de vols de la Royal Air Maroc a été annulée depuis le début de la discorde entre la compagnie et les pilotes de ligne, représentés par l’Association marocaine des pilotes de ligne (AMPL). Quatre pistes qui expliquent la discorde entre les deux parties.

Formation: pourquoi avoir fermé l’école nationale des pilotes

Le Maroc disposait de sa propre école, dédiée à la formation des pilotes de ligne. D’ailleurs, la majorité des pilotes travaillant actuellement à la RAM ont été formés sur les bancs de l’école nationale des pilotes de ligne. L’école a été fermée en 2014, à cause de la restructuration de la compagnie aérienne et la fermeture qui ne devait durer que deux ans s’est éternisée, jusqu’à nos jours.
L’association marocaine des pilotes de ligne est parvenue à trouver un accord avec la direction pour la réouverture de l’école et la RAM s’est engagée, par le biais de son PDG, à rouvrir l’école. D’ailleurs, le PDG de la RAM, Abdelhamid Addou, a envoyé une promesse de réouverture de l’école le 17 Mars à l’AMPL. Entretemps, RAM a envoyé des étudiants à l’école de pilotage de Toulouse (ENAC). RAM paye le tiers des coûts de la formation, l’état un tiers tandis et l’élève le tiers restant. La réouverture de l’école ne sera pas programmée dans un avenir proche malgré la promesse du PDG car la première promotion de pilotes coûtera au moins 300 millions de DH soit 3 MDH par étudiant, ce coût devrait baisser lors des années à venir.

Pilotes étrangers en CDD, la piste qui a fait pshitt

Avec l’ouverture de nouvelles lignes, l’augmentation de nombre de vols, les 540 pilotes de la RAM ne sont plus suffisants. Actuellement, la compagnie aérienne souffre d’un déficit de 86 pilotes. En manque de main d’œuvre marocaine, la compagnie a lancé une offre de recrutement pour des pilotes étrangers. Le protocole d’accord fixant les conditions a été scellé avec l’AMPL, le 3 juillet 2017. Chaque pilote devait avoir mille heures de vol (un an et demi de service) mais face au marché, la compagnie a dû revoir à la baisse ses attentes et s’est contentée de 500 heures avant de supprimer finalement cette condition.
RAM propose un salaire de 7500 euros et offre cinq jours de repos consécutifs aux pilotes étrangers en plus des 48 heures de repos hebdomadaires. Des faveurs qui ont rendu jaloux les pilotes marocains de la RAM, mais n’ont pas convaincu les pilotes étrangers à venir au Maroc. En effet, seulement 24 pilotes ont postulé, dont 17 en provenance d’une compagnie turque qui venait de faire faillite. Au pic des recrutements, la RAM n’a pu embaucher que 46 pilotes dont la majorité a quitté la RAM après trois mois de travail.
 

Les négociations sur une voie de garage

Le dialogue entre les pilotes et la direction de Royal Air Maroc dure depuis plusieurs mois. En janvier dernier, les pilotes ont entamé des pourparlers avec la direction de l’entreprise, en vain. Les pilotes ont présenté leur liste de revendications et l’administration leur a promis de nouvelles réunions pour détailler et trancher sur les requêtes proposées, point par point. Trois réunions plus tard, le dialogue s’est arrêté sans qu’aucun accord ne soit scellé entre les deux parties.
Voulant faire pression sur l’entreprise, les pilotes ont été confrontés à un problème de timing: «Nous voulions faire un grève ou une protestation mais le Maroc faisait campagne pour l’organisation de la Coupe du monde 2026. On avait peur que notre acte ne soit repris par les médias internationaux et perturbe ainsi la candidature marocaine», nous assure une source au sein de l’AMPL.
Après la défaite du Maroc, les pilotes ont porté des brassards durant trois jours, entre le  21 et le 23 juin dernier, conformément à la décision de l’assemblée générale de l’association marocaine des pilotes de ligne. Face à la sourde oreille de RAM, les pilotes ont décidé de lancer un mouvement en refusant de travailler en dehors des heures fixées dans leurs plannings mensuels et de ne plus être flexible. La suite, on la connaît: une trentaine de vols annulés en l’espace d’une semaine.
 

Les avions affrétés hors piste

Chaque département de RAM travaille indépendamment des autres. Le service commercial programme des vols pour répondre aux besoins du marchés mais ne se soucie pas de la programmation des vols, ni la disponibilité des pilotes et des avions. Pour honorer les engagements de l’entreprise, certains pilotes volent jusqu’à 105 heures par mois, la limite fixée par la réglementation internationale. Mais malgré la flexibilité des pilotes, RAM affrétait des avions qu’elle louait.
Le besoin actuel en avion est de 15 aéronefs mais la compagnie n’a pu en trouver que cinq, dont trois sans équipage. L’année dernière, RAM a pu affréter plusieurs avions avec des équipages de la compagnie Qatar Airways dont le pays souffrait de l’embargo imposé par l’Arabie Saoudite. Cette année les Qatariens ont affrété leurs avions à British Airlines, ce qui a mis la RAM dans une mauvaise posture, car le marché mondial ne propose que des avions sans équipages. Cet état de fait repose le débat sur le sous-effectif en pilotes dont souffre Royal Air Maroc.

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