La fermeture des écoles est « vécue par l’enfant comme une trahison » (psychologue)

Publié le
trahison,enfants,écoles fermées,Casablanca,psychologue,coronavirus
DR.

Le gouvernement a finalement décidé la fermeture impromptue des écoles casablancaises, tout juste la veille de la rentrée scolaire, alors prévue ce lundi 7 septembre. Quelles conséquences psychologiques sur les enfants? Eléments de réponse avec Wiam et Btissame Benjelloun, psychologues cliniciennes spécialisées dans l’accompagnement thérapeutique de l’enfant, l’adolescent, l’adulte et famille.

 

H24Info. Comment les enfants ont-il pu réagir face à cette annonce soudaine?

Wiam et Btissame Benjelloun: L’annonce de ce matin a pu être vécue comme un choc par beaucoup d’enfants qui se préparaient à rejoindre leurs camarades et retrouver un rythme de vie ‘normal’. Comme tout choc, l’enfant comme l’adulte peut passer par plusieurs états émotionnels avant de retourner vers la résilience et un état de calme intérieur. La première réaction est la sidération et l’incapacité à pouvoir intégrer une telle nouvelle. Une fois intégrée, cette nouvelle peut susciter de la colère due à un fort sentiment d’injustice et de frustration. Cette nouvelle difficilement acceptable peut engendrer un comportement inhabituel: colère, agressivité, sautes d’humeurs, irritabilité, ou a contrario isolement, retrait, pleurs…

Après l’intégration de l’information, vient une phase d’adaptation qui sera facilitée si l’enfant est aidé par un entourage calme et confiant. S’il accepte cette situation, il pourra s’adapter facilement à de nouveaux repères et une nouvelle organisation scolaire.

Autre conséquence de cette annonce, la perte de confiance en l’adulte qui est censé être garant d’une décision et d’une parole. Dans l’immédiat, l’enfant ne peut comprendre un changement de situation aussi soudain et aussi lourd de conséquences pour lui car cela change tous ses scénarios. Lui qui était dans l’excitation et l’enjouement se retrouve parachuté dans un sentiment inverse de frustration, colère et injustice.

Après autant d’effort et de résilience pendant le dernier confinement, l’enfant vivait ce retour à l’école comme une récompense. Or, l’annonce d’hier soudaine et tardive est vécue comme une trahison et un manque de reconnaissance qui peut engendrer un sentiment d’échec. L’enfant à besoin d’être préparé psychologiquement, une annonce soudaine peut être souvent vécue comme un choc traumatisant.

Pour les plus fragiles, cela peu engendrer également, dans l’immédiat, un sentiment d’insécurité et de danger, car une annonce aussi soudaine est chargée d’informations et d’émotions anxiogènes. Même s’il savait qu’il fallait rester vigilant, le choc de l’annonce peut le laisser croire que la situation s’est aggravée, et engendrer chez lui un retour aux fortes angoisses comme la peur de mourir.

Cependant, les explications et les discussions peuvent apaiser l’enfant et l’aider à retrouver un état de calme intérieur. Prenez le temps de parler, discuter et écouter vos enfants pour répondre à leur besoins de manières adaptée.

 

Comment s’adapter sur le long terme?

Comme tout humain, un enfant comme un adulte a besoin de rapport sociaux et de liberté. Une déscolarisation à long terme peut créer chez lui un vide affectif et social très important. Il va devoir gérer un sentiment de solitude avec les moyens qu’il possède et dont il use depuis déjà six mois et qui commencent à montrer leurs limites: les groupes sociaux, les jeux…

L’enfant est capable de se résilier et de s’adapter à  un nouveau fonctionnement et une nouvelle normalité de vie en restant à la maison mais les liens sociaux qu’il crée à l’école restent irremplaçables malgré tout. Il est important de les maintenir en action, avec des échanges sociaux et des loisirs.

 

Lire aussi : Micro-trottoir. Ville bouclée, écoles fermées, couvre-feu…les Casablancais désemparés

 

Les enfants vivent des ruptures avec leurs repères depuis six mois, l’annonce de ce matin les a replonger violemment dans cet état d’emprisonnement. Il faut les aider à retrouver un rythme stable et une routine de vie. Ces changements répétés sont nocifs psychologiquement, il est impératifs de stabiliser définitivement leur rythme et repères.

Si les choses lui sont bien expliquées, sans angoisse, l’enfant sortira grandi de tous ces événements. Il gagnera en confiance, en autonomie, et aura appris la résilience et la patience.

 

Quelques conseils aux parents pour faire face à cette situation:

  1. Nous encourageons les parents à retrouver leur confiance et leur calme même si le contexte actuel n’y aide pas. Ainsi, une discussion avec les enfants sera possible, constructive et installera l’enfant dans un climat confiant;
  2. Il faut ouvrir les espaces de discussions car il est primordial de vérifier ce que les enfants ont compris et de les laisser mettre des mots sur leur émotions, angoisses…;
  3. Nous les avons félicités de leur capacités de résilience lors du confinement, il faut continuer et les encourager en leur montrant le chemin et l’exemple à suivre;
  4. Il faut leur expliquer l’utilité de cette décision pour nous tous même si elle engendre encore des frustrations;
  5. L’autoriser à exprimer ses plaintes et l’aider à mettre des mots dessus;
  6. Perdurer les actions de bien-être pratiquées lors du confinement: sorties, jeux, activités physiques, respecter de  leur espace et de leur besoin de s’isoler.

 

La rédaction vous conseille

Les titres du matinNewsletter

Tous les jours

Recevez chaque matin, l'actualité du jour : politique, international, société...

La fermeture des écoles est « vécue par l’enfant comme une trahison » (psychologue)

S'ABONNER
Partager
S'abonner