Fouad Amraoui, expert en eau: «Le dessalement est une obligation, ce n’est plus un choix»

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Face au déficit hydrique des bassins de la Moulouya, de l’Oum Er Rbia et du Tensift, le ministre de l’Equipement et de l’eau, Nizar Baraka, vient de lancer un plan d’urgence 2021-2022 budgétisé à 2,42 milliards de dirhams (MMDH). Fouad Amraoui, expert en eau, revient sur le pourquoi du comment de la situation actuelle. 
« L’arrivée en eau dépend des pluies et nous vivons actuellement une troisième année consécutive de sécheresse. Il y a moins d’apport en eau et le taux de remplissage des barrages est au plus bas. Au Maroc, on manque de pluie chaque année pendant une période de quatre à sept mois. Pourtant, il faut toujours de la réserve pour répondre aux besoins de la population, que ce soit en eau potable ou en irrigation », nous dit Fouad Amraoui, professeur-chercheur en hydrologie à l’université Hassan-II de Casablanca et président de l’Association de Recherche Action pour le Développement Durable.
Et d’ajouter: « On a 1,5 millions d’hectares irrigués à partir des barrages et quand ces derniers manquent d’eau, les gens vont s’approvisionner au niveau des nappes. Cela provoque une surexploitation des nappes qui souffrent ainsi d’un déficit important, donc c’est une situation qui est un peu critique ».
Généralement, les zones les plus touchées par le manque d’eau sont toujours celles situées entre Casablanca et le Sud, explique le spécialiste. « Au niveau du Nord, ils ont souvent beaucoup plus de pluie. La répartition inégale de l’eau à échelle nationale pose problème. Quand on veut développer un pays, il faut avoir de l’eau partout car il s’agit d’un facteur limitant de développement. Le manque d’eau implique des conséquences socio-économiques importantes telles que des tensions sociales, une production agricole faible, un exode vers les villes, etc. » poursuit Amraoui.
Le Maroc a connu une baisse de 59% des apports en eau en 2020-2021. Le bassin de la Moulouya (Oujda et L’Oriental) enregistre un taux de remplissage de seulement 11 % et celui de Tensift 34 %. Face à ce constat alarmant, le ministre de l’Equipement et de l’eau, Nizar Baraka, vient de lancer un plan d’urgence 2021-2022 budgétisé à 2,42 milliards de dirhams (MMDH).

« S’il n’y a pas de pluie, le problème persistera malgré le plan d’urgence »

Objectif: garantir l’approvisionnement en eau potable dans les bassins hydrauliques précités et de l’Oum Er Rbia. Ce plan d’urgence inclut notamment la construction de 120 barrages collinaires d’ici 2024. « Cet investissement est une condition nécessaire mais pas suffisante. Il faut certes des fonds mais même si on construit tous ces édifices, s’il n’y a pas de pluie, le problème persistera », réagit notre interlocuteur.

Cette situation est due d’une part aux changements climatiques et à la baisse des précipitations et d’autre part au retard dans la mise en œuvre de la stratégie nationale de l’eau, a expliqué le ministre, précisant qu’une station de dessalement de l’eau à Saidia devait être réalisée à fin 2018, en vue de garantir l’approvisionnement en eau pour la population de Nador Driouch et Saidia.

Dans le même sens, il a annoncé le lancement dans les semaines à venir du grand projet de dessalement de l’eau à Casablanca de 300 Mm3.

Le dessalement de l’eau est une solution à privilégier, notamment pour le Maroc dont la côte s’étend sur 3.500 km. « Le dessalement est une obligation, ce n’est plus un choix. Toutes les villes côtières doivent être desservies à partir du dessalement d’eau de mer surtout que la technologie a beaucoup évolué et les prix un peu baissé. Le problème, c’est que cela prend du temps », souligne Fouad Amraoui. « L’usine de dessalement de Casablanca ne sera prête qu’en 2027. Aujourd’hui, il n’y a pas le feu mais disons qu’il faut accélérer le processus ».

La réutilisation des eaux usées est également une composante importante de la stratégie. « Aujourd’hui, pratiquement toutes les grandes villes du Maroc disposent de stations de traitement des eaux usées mais il ne suffit pas de traiter cette eau, il faut aussi la réutiliser pour l’arrosage des espaces verts, parfois pour l’industrie comme c’est le cas à Khouribga par l’OCP. Tout ce qui est possible de faire est contenu dans le plan national 2020-2027 », détaille Amraoui.

L’expert souligne également l’importance de sensibiliser la population au principe d’économie de l’eau, du citoyen à l’agriculteur, l’industriel, etc., surtout en période de pénurie. « Tout ce qui est possible de faire, il faut le faire parce qu’on risque d’avoir une année difficile », prévient-t-il. 

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