Le retour en force des sacs plastiques sur les marchés signe-t-il la fin de “Zéro Mika”?

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Photo d'illustration.

Malgré des campagnes intensives et des interdictions légales mises en place par le Maroc, les sacs en plastique font un retour en force, menaçant tous les efforts menés jusque-là pour la protection de l’environnement. Que devient l’opération «Zéro Mika» lancée il y a huit ans?

En 2016, le Maroc lance l’initiative Zéro Mika pour lutter contre la pollution plastique qui défigurait ses paysages. Objectif: mettre fin à l’utilisation de sacs en plastique en circulation et réduire l’impact négatif de ces déchets plastiques sur l’environnement. Cette loi, entrée en vigueur en juillet de la même année, s’inscrit dans une stratégie environnementale globale, notamment en prévision de la COP22 à Marrakech, permettant au Maroc de se positionner comme un modèle de protection environnementale au niveau régional et international.

Huit ans plus tard, le bilan reste mitigé. Si la collecte et la destruction de millions de sacs ont bien eu lieu, un retour à leur utilisation illégale est observé dans plusieurs régions, remettant en question l’efficacité et la pérennité du projet “Zéro Mika”.

Obstacles

Un des principaux obstacles à cette initiative est l’absence d’alternatives durables aux sacs en plastique, qu’une grande partie de consommateurs préfèrent. Les sacs en papier, jugés peu solides, et les sacs non tissés, qui contiennent des plastiques, ne semblent pas répondre aux attentes. En plus, le coût des sacs alternatifs représente un défi pour les commerçants, dont les marges bénéficiaires peuvent déjà être très faibles.

La présence des producteurs illégaux et des unités de fabrications informelles complique davantage la réussite de l’initiative «Zéro Mika». Des failles et lacunes dans la surveillance des points de ventes ont, également, exacerbé la situation. Les producteurs informels ont profité de ce laxisme et l’inaction des autorités pour augmenter leur production. A cela s’ajoute, notamment, l’absence des campagnes de sensibilisation auprès des consommateurs Marocains sur les différents risques et effets néfastes de ces sacs sur l’environnement, mais aussi leur santé.

Joint par H24info, Nadir Sinaceur, militant pour la protection de l’environnement et président de l’association «Zero Waste Skhirat», lance un cri d’alarme.

«Malgré l’interdiction instaurée par la loi 77-15 en 2016, les sacs plastiques continuent de poser un problème majeur en terme de pollution. Ils polluent les sols, les eaux et génèrent des microplastiques qui mettent des siècles à se décomposer. Leur production et leur gestion en fin de vie aggravent également les émissions de gaz à effet de serre, contribuant au réchauffement climatique», rappelle-t-il.

La solution selon lui, serait «de proposer des alternatives peu coûteuses ou gratuites non seulement dans les supermarchés, mais surtout dans les souks et marchés traditionnels hebdomadaires, où une grande partie des Marocains effectuent leurs achats». Il est important que ces solutions soient accessibles, que les sacs soient réutilisables et les emballages biodégradables, qui devraient être encouragés et subventionnés pour les commerçants et les consommateurs.

Lire aussi: Zéro Mika: 395 millions de dirhams dédiés à l'accompagnement des acteurs impactés

«Le marché du poisson est particulièrement concerné par l’usage excessif des plastiques», souligne notre interlocuteur.  Pour faire face à cette problématique, il est nécessaire de développer des solutions adaptées, telles que des bacs réutilisables ou des emballages alternatifs, en partenariat avec les producteurs locaux, les coopératives et les associations. Cela permettrait de réduire la dépendance au plastique à usage unique dans ce secteur clé.

Pour que ces solutions soient efficaces, «il est indispensable de renforcer le tri à la source. Il s’agit d’un élément clé de l’économie circulaire qui permet de maximiser la valeur des déchets en facilitant leur recyclage. En triant les déchets dès leur production, que ce soit à domicile, dans les souks ou dans les entreprises, nous pouvons réduire la quantité de plastiques qui finissent dans les décharges ou dans la nature», propose-t-il.

Il a, dans ce sens, appelé à «la mise en place d’une économie circulaire locale pour induire des changements durables à court, moyen et long terme. Cela nécessite une coopération active entre le gouvernement, les entreprises privées, les coopératives, les associations locales, et les citoyens. Il est impératif de développer des infrastructures locales de recyclage et de sensibiliser la population à l’importance du tri et de la réduction des déchets plastiques».

De plus, cette économie circulaire locale peut devenir une source de revenus pour les populations. En créant des emplois dans le recyclage, la réutilisation des matériaux et d’autres activités durables, cela peut non seulement améliorer notre environnement, mais aussi offrir des perspectives économiques qui motiveraient l’accélération et l’adoption de ces pratiques à plus grande échelle.

Projets de souks pilotes

Selon notre source, une approche innovante serait de lancer des projets de souks pilotes, où des solutions durables seraient testées et mises en œuvre ensuite à grande échelle. Ces projets pourraient s’inspirer des anciens modes d’achat, comme l’utilisation de paniers réutilisables, ce qui permettrait de réduire considérablement l’utilisation de plastiques à usage unique.

«Je souhaite également souligner les efforts de la Fondation Mohammed VI pour la Protection de l’Environnement, qui œuvre pour la protection des océans et du littoral à travers des programmes comme Littoral durable et Plages propres. La campagne #b7arblaplastic est un excellent exemple de sensibilisation au problème des déchets plastiques dans les environnements côtiers, un enjeu crucial pour notre pays», affirme-t-il.

Le ministère de l’Environnement, à travers sa stratégie nationale et son plan national pour l’économie circulaire, est également un acteur clé dans cette transition. Cette stratégie doit mobiliser toutes les parties prenantes pour trouver des alternatives viables afin que le Maroc puisse honorer ses engagements internationaux, notamment en vue de la Coupe du monde 2030, des Objectifs de développement durable (ODD), et des traités internationaux signés pour la protection de l’environnement.

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