Réputé marocophobe jusqu'à la moelle, le chef d'état-major algérien de l'Armée nationale populaire (ANP) Saïd…
Histoire: quand l’Armée de Libération a failli libérer le Sahara bien avant la Marche Verte
Publié leIl y a 49 ans, jour pour jour, le Maroc récupérait avec la Marche Verte, son Sahara après une longue lutte qui a duré près d’un siècle – et qui continue encore aujourd’hui. Mais la lutte des Marocains pour libérer les provinces du sud a débuté bien avant la Marche Verte comme le rappellent certains faits historiques.
La Marche Verte, un événement marquant de la lutte du Royaume pour le parachèvement de son intégrité territoriale qui avait été malmenée par les puissances coloniales, et toujours remis en cause par les ennemis du Maroc. Ces derniers ressassent encore leur litanie selon laquelle «le Maroc a attendu le départ des Espagnols en 1975 pour récupérer le Sahara occidental » ou encore : «Le Maroc n’a jamais tiré une balle pour libérer le Sahara?» ; «Si le Sahara est marocain, pourquoi a-t-il attendu le départ des Espagnols pour le récupérer?» ; «Les Sahraouis se sont battus seuls, et les Chlouhs (Amazighs) sont venus cueillir le fruit de leur lutte! »
Ces propos sont encore utilisés par le régime algérien et ses bras médiatiques, notamment sur les réseaux sociaux, dans le but de semer le doute et la méfiance parmi les Marocains et de remettre en cause la légitimité de leur lutte. Force est de constater aujourd’hui que cette politique a eu l’effet inverse avec une mobilisation sans pareil des Marocains pour défendre l’intégrité territoriale.
Mais petit retour en arrière pour rappeler que la lutte de libération du Sahara a débuté bien avant novembre 1975, date du déclenchement de la Marche Verte.
Plusieurs faits historiques sont tombés dans l’oubli, comme la guerre d’Ifni – que les Espagnols appellent «la guerra olvidada» (la guerre oubliée) – et qui s’est terminée avec l’opération Écouvillon, viennent rappeler que le Maroc s’est toujours battu pour son Sahara et les régions faisant partie de ses «frontières authentiques» depuis l’époque du Sultan Hassan Ier (1873-1894).
La résistance de Cheikh Ma El Aïnin
Le Sultan Hassan Ier monte sur le trône en 1873 alors que le Maroc est au centre des convoitises des puissances impérialistes coloniales. L’un des premiers chefs de tribus à lui prêter allégeance fut Cheikh Ma El Aïnin, une figure emblématique des régions sahraouies.
Ma El Aïnin, de son vrai nom Mohammed Mustapha Ould Cheikh Mohammed Fadel, est décrit par l’explorateur français Camille Douls comme une figure vénérée des adeptes de la Tariqa Soufie la Faddiliya, fondée par son père. Au nom du Sultan, Ma El Aïnin lutta à la tête de ses tribus de Ouled Dlim et Rguibat, durant des décennies, contre les chrétiens qui avaient des visées sur sa zone d’influence.
Quelques années après la mort de Moulay Hassan, il fonda en 1898 un ribat (forteresse religieuse) à Smara, à l’époque simple carrefour caravanier. De là, il lança un appel à la guerre sainte contre les colonisateurs espagnols. Armé et financé par le Sultan Moulay Abdelaziz, Ma El Aïnin s’empara du comptoir de Donald MacKenzie à Cap Juby (zone entre le Protectorat français et le Protectorat espagnol, ndlr), situé entre Tindouf à l’est et Sidi Ifni à l’ouest. En 1905, il entra en guerre contre les Français à Chenguit (actuelle Mauritanie).
En 1907, après avoir combattu le commissaire français Henri Gouraud, Ma El Aïnin est contraint de se replier à Tiznit, où il meurt en 1910, après avoir subi une défaite cuisante. Sa résistance, malgré sa défaite, demeure un symbole de la lutte sahraouie menée par le Trône pour la liberté et l’indépendance.
L’ALM sur les pas des premiers résistants
Le Sahara ne fut pacifié par les Espagnols qu’en 1934, avec la prise d’Ifni, lorsque le colonel d’infanterie Osvaldo Capaz y établit une petite garnison espagnole. Quelques années plus tard, après la fondation de l’Armée de Libération Nationale (ALN) au nord, l’Armée de Libération du Sud fut créée, raconte Mohamed Bensaïd Aït Idder, l’un des leader historique de l’ALN dans son livre « L’Alliance franco-espagnole dans la bataille d’Ecouvillon ».
Les combattants de l’ALN du sud vont alors mener une série de batailles contre les Espagnols.
Après la proclamation de l’indépendance du Maroc en 1956, jugée «inachevée» par les leaders du mouvement national, notamment, du parti de l’Istiqlal de Alla El Fassi, les combats s’intensifient. L’ALN, soutenue par les tribus du sud, harcèle sans relâche les garnisons espagnoles, qui se retrouvent confinées dans trois villes côtières: Dakhla (Villa-Cisneros), Laâyoune et Tarfaya (Cap-Juby).
Mohammed V, le tacticien
Après l’accord d’indépendance du Maroc avec la France le 2 mars 1956 et l’accord signé avec l’Espagne le 7 avril 1956 pour restituer les territoires sous sa domination dans le nord du Maroc, le Royaume ibérique s’obstine à conserver les régions de Saguia el-Hamra, Oued Ed-Dahab (Rio de Oro), et Tarfaya, que Mohammed V revendiquait. Lors de sa visite aux États-Unis en novembre 1957, il rappelle fermement ces revendications. Ce refus est alors perçu par le Maroc comme une violation de l’accord du 7 avril.
Parallèlement à ce processus politique et à l’adhésion du Maroc à l’Organisation des Nations Unies le 22 janvier 1958, le roi Mohammed V soutient l’«armée irrégulière» et encourage la résistance au sud. L’Armée de Libération marocaine, en coordination avec les tribus Ait Baamrane, attaque alors les positions espagnoles dans la région et s’empare de six centres près de Sidi Ifni, infligeant de lourdes pertes à l’armée espagnole, avec la mort du lieutenant Ortiz, tué sur le champ de bataille.
Le Sahara quasi-libéré
L’Espagne, se sentant menacée, organise un plan de défense. Elle transfère des troupes supplémentaires depuis les îles Canaries et envoie deux navires de guerre, les Canarias et Neptuno, qui pénètrent dans les eaux territoriales marocaines et menacent de bombarder la ville d’Agadir. Le prince héritier de l’époque, Moulay Hassan (futur Hassan II), prend la responsabilité de défendre le Maroc contre toute attaque espagnole et envoie des troupes le long des côtes d’Agadir et autour de Sidi Ifni.
Il donne ensuite l’ordre de tirer sur tout avion espagnol ou étranger violant l’espace aérien marocain. Les combats s’intensifient à Sidi Ifni, et l’Espagne envoie davantage de troupes et de renforts. Six navires de guerre espagnols surgissent au large d’Agadir, alors que les forces armées marocaines pointent leurs canons vers l’océan prêtes à riposter.
التاريخ الي ما قراوكش pic.twitter.com/fWzuiB7XtV
— Zoomer (@Dr_CB4) November 2, 2024
Durant cette période, les Espagnols sont cantonnés dans les villes côtières et l’ALM commence à harceler les Français dans la région riche en fer de Tindouf, mais également au Sud.
Des intérêts convergent
Dans ce contexte, l’exploitation des richesses de la région, première motivation des forces coloniales, est quasi-impossible. Français et Espagnols considèrent alors le Sahara, dans sa globalité, comme la “nouvelle sibérie” capable de faire d’eux la première puissance européenne (Monde Diplomatique février 1978).
L’opération Ecouvillon, ou l’opération coup de balai, est intervenue dans ce contexte.
Le 10 février 1958, l’opération Écouvillon (ou « opération coup de balai ») est lancée. 5.000 hommes, 600 véhicules et 70 avions français sont engagés dans une offensive pour repousser l’Armée de Libération et reprendre les territoires libérés, notamment la ville de Smara. Cette intervention française, au soutien à l’armée franquiste, s’est déroulée dans un climat de violence extrême, et fut surnommée par les locaux «l’année du bombardement aérien».
© DR.
L’historien sahraoui Rahal Boubreak, né à Tan-Tan, considère qu’«aucun chercheur spécialiste de l’histoire de la région ne peut ignorer cette opération en raison de ses conséquences, à savoir le partage du pays, le massacre des habitants, le nombre de prisonniers, le déracinement des familles, l’humiliation des populations, la destruction des sources de leurs moyens de subsistance, sans oublier que le Sahara est resté sous le joug du colonialisme espagnol».
Genèse de l’idée séparatiste
L’opération Écouvillon entraîne la sortie des forces espagnoles de leurs garnisons, avant de consolider leurs positions derrière des lignes défensives jusqu’à la conclusion d’un cessez-le-feu à la mi-1958. Le Maroc en tire profit avec le Traité de Cintra, par lequel l’Espagne s’engagea à céder au Maroc la colonie du Cap Juby (Tarfaya).
A noter que cette opération constitue également un des premiers déclencheurs du conflit autour du Sahara. La plupart des résistants fuyant l’armée espagnole-française étaient des Sahraouis, dont plusieurs figures importantes : Mohammed Ould Hamana Ould Dihouhi (père de Mahfoud Ali Beida, ancien Premier ministre de la pseudo-RASD), Sidi Ould Abdessamad (père de Mohammed Salem Ould Salek, chef de la diplomatie du Polisario), Seddik Ould El Bachir (père de Bouffetah Mae El Aïnin Seddik, ancien ministre des Affaires étrangères du Polisario), et Moulay Ahmed Layli (père de Mohamed Lamine, ancien conseiller de Mohamed Abdelaziz, leader du Polisario).
Cette intervention française empêche le Maroc de récupérer son Sahara 17 ans avant la Marche Verte et provoque la fuite de 40.000 Sahraouis vers Tan-Tan et Guelmim.
Le 6 novembre 1975, le prince héritier Sidi Mohammed (SM le Roi Mohammed VI) lance officiellement la MARCHE VERTE.
Le peuple marocain, armé uniquement de résilience, de patience, de l’amour de sa patrie et du Coran à la main, avance d’un pas déterminé pour reprendre ses terres… pic.twitter.com/UKIIun35w1
— Maroc Archives (@Maroc_Archives) November 5, 2024
Bien que le Maroc a récupéré ses provinces du Sud grâce à la Marche glorieuse, cet épisode sera exploité plus tard par l’Algérie, qui cherche alors à utiliser la question sahraouie pour ses propres intérêts géopolitiques.