Risque climat: les banques marocaines sont-elles bien préparées ?

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Face aux risques financiers inhérents aux aléas climatiques ou dictés par la transition écologique, le Maroc œuvre, sans relâche, pour accélérer la prise en compte des enjeux climatiques dans son écosystème bancaire, tout en promouvant une finance verte.

En effet, ces risques interpellent de plus en plus les autorités financières de par le monde, lesquelles ont accéléré les efforts dans ce sens pour mettre en place un cadre de surveillance efficace garant d’une stabilité financière.

Étant conscient des menaces climatiques potentielles sur l’activité économique et financière, le Maroc demeure en fait précurseur, dans la mesure où Bank Al-Maghrib a fait sortir, en mars dernier, sa directive sur les risques liés aux changements climatiques et à l’environnement et dans laquelle la Banque centrale appelle à la prise en compte de ce nouvel enjeu dans le système bancaire.

Non seulement, BAM fait partie des premières banques à avoir adhéré (2018) au Réseau des Banques Centrales et des Superviseurs pour le Verdissement du Système Financier (NGFS), une coalition qui a pour objectif d’accélérer les travaux des banques centrales et des superviseurs sur le risque climatique et environnemental et sur le renforcement de la finance verte.

En fait, ladite directive de BAM regroupe les bonnes pratiques permettant au secteur bancaire d’identifier les sources de ces risques, d’en assurer, de manière progressive, la mesure, la gestion, le suivi et le contrôle. Aussi, la Banque œuvre à la conception de stress tests climatiques sur la base de scénarii de chocs préconisés par les institutions internationales et inspirés des expériences des banques centrales les plus avancées en la matière.

« Au-delà de l’identification des risques, cette directive appelle le système bancaire et les établissements de crédit à intégrer le risque climat dans leurs orientations stratégiques, à adopter un dispositif d’évaluation, de gestion et de suivi des risques, à adapter la gouvernance aux nouveaux enjeux du développement durable, et à mettre en place un reporting périodique sur l’intégration du risque climat dans les politiques d’octroi de crédit », c’est ce qu’explique Kamal Zine, consultant en banque et assurance.

 

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Dans une déclaration à la MAP, M. Zine, précise que ladite directive définit deux principaux risques auxquels sont confrontés les systèmes bancaire et financier. Le premier est le « risque physique », qui peut être la conséquence d’accidents ou d’évènements climatiques, tels que la hausse des températures moyennes, les inondations, ou les épisodes de sécheresse.

Quant au deuxième risque, il est lié à la transition écologique et peut résulter des transformations visant à décarboner et à verdir l’économie à travers la réduction des émissions de gaz à effet de serre, l’amélioration de l’efficience énergétique et la préservation des ressources naturelles et de l’environnement d’une manière plus globale, poursuit l’expert financier.

Ces changements, qui peuvent être liés aux « orientations vertes » des banques ou aux choix de leurs clients cherchant à s’inscrire dans un processus de transition écologique, impacteraient les bilans des banques, soit à travers la valorisation de leurs actifs, ou bien à travers l’allocation de leurs ressources, ajoute-t-il.

De surcroit, la directive de la Banque Centrale mentionne le « risque de responsabilité » dans les risques liés au climat, a-t-il renchéri, faisant savoir que ce sous-ensemble des risques physiques et de transition est relatif aux poursuites en justice que pourraient subir les banques à cause de leur implication potentielle, directe ou indirecte, dans des dégâts ou des dommages environnementaux.

Stress test climatique : Un benchmarking des pratiques à l’international

La prise en compte des risques climatiques dans le cadre de la supervision micro et macroprudentielle a gagné en importance au cours des dernières années.

Dans son dernier rapport sur la stabilité financière, BAM fait remarquer que les Banques Centrales œuvrent de plus en plus à étendre leurs dispositifs de gestion de risques pour couvrir ceux liés au climat, et à mettre en place des stress tests spécifiques pour quantifier l’impact sur la stabilité financière et mieux comprendre les conséquences d’une transition disruptive sur le secteur financier.

Par exemple, le stress test climatique publié par la Banque Centrale des Pays-Bas en 2019 constitue le premier exercice du genre, et fournit un premier cadre de référence méthodologique.

Les résultats de cet exercice ont été publiés dans le rapport « Un test de résistance sur les risques liés à la transition énergétique pour le système financier des Pays-Bas ».

En France, dans le cadre de groupes de travail mis en place avec les banques et les assureurs français, la Banque de France et l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) ont préparé un exercice pilote de stress test du secteur financier, centré sur l’évaluation de l’impact des risques de transition.

En 2019, la Banque d’Angleterre (BoE) a effectué son premier stress test climatique en collaboration avec les assureurs britanniques. L’objectif de cet exercice était exploratoire, permettant à la BoE de comprendre les capacités du marché à identifier les risques et d’aider à éclairer les choix de conception et de spécification pour le Scénario Exploratoire Biennal (SEB).

La Banque utilisera son SEB de l’année 2021 pour réaliser un nouvel exercice de stress test en vue d’explorer les risques financiers posés par les risques climatiques, physique et de transition.

Dans ce sillage, notre interlocuteur fait observer que la crise de Covid-19 a catalysé les plans de transition écologiques. En effet, les plans de relance en Europe et aux Etats-Unis ont mis l’accent sur le développement de l’économie verte.

Les banques centrales, en particulier la Banque Centrale Européenne (BCE), ont privilégié les instruments financiers s’inscrivant dans la finance verte dans leurs programmes de rachat d’actifs, affirme M. Zine.

 

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L’objectif était d’orienter les investissements et les financements vers la transition écologique et l’innovation dans les secteurs liés au développement durable, explique-t-il, notant que la BCE a davantage intégré le risque climat dans ses politiques relatives à la stabilité financière et à la supervision bancaire.

Répondant à une question sur l’intérêt d’établir un reporting climat par les banques marocaines et son impact sur la stabilité financière globale, M. Zine souligne que les banques marocaines sont amenées à communiquer un reporting climat, a minima chaque année. L’objectif, précise-t-il, est de mesurer l’engagement de ces banques dans la finance verte et de s’assurer de leur prise en compte des enjeux environnementaux, notamment dans leurs politiques d’investissement et de financement.

Cela passe, dit-il, par la vérification de la mise en place d’une gouvernance adaptée pour évaluer les risques et déterminer les opportunités et les impacts potentiels du changement climatique. Il permettrait également de partager les bonnes pratiques entre les banques.

« Ce reporting est un pas dans le bon sens. Néanmoins, une attention particulière doit être accordée aux indicateurs qui seront adoptés et communiqués ainsi que les hypothèses et les modèles pris en compte dans le cadre des stress tests futurs », conclut-il.

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