Moncef Lahlou (Capital Foncier): «C’est le pouvoir d’achat qui doit s’adapter aux prix, et non l’inverse»

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Subissant de plein fouet la conjoncture du covid-19, le secteur immobilier aborde la phase post-covid-19 avec plusieurs interrogations. Moncef Lahlou, directeur général de Capital Foncier, livre son analyse de l’impact de la crise, ainsi que les pistes de relances les plus adéquates.

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Moncef Lahlou, DG de Capital Foncier.

– A quel niveau évaluez-vous l’impact de la crise du covid-19 sur le secteur immobilier ?

Tout dépend de quel secteur dans l immobilier. L’industriel a très bien marché avec une demande soutenue tant à la vente qu’à la location, Capital foncier a réalise plus d’une dizaine de transactions avec des clients établis mais aussi de nouveaux intrants industriels.

Le secteur des bureaux pourrait connaître une baisse des prix pour les petites surfaces car les PME ont été davantage touchées, la demande pour les immeubles de bureau en mono-locataire pourrait aussi souffrir car des utilisateurs ont décalé leur arrivée, d’autres ont annulé leurs besoins.

Le secteur du retail, les magasins mais aussi la restauration vont passer par une phase de tourmente en raison d’un manque d’affluence, de la fermeture prolongée et d’un manque de solidité financière des établissements et commerces qui ne leur permettent pas d’affronter ces difficultés, et ce malgré les aides bancaires. Nous avons déjà constaté des fermetures.

Le secteur des appartements de seconde main n’a pour le moment pas évolué mais certains clients pourraient affronter des difficultés suite a leur baisse de pouvoir d’achat ou même de licenciement et les amener à vendre à des prix plus bas, mais je ne pense pas que le marché baissera de plus de 10% et que l’on pourra constater quelques ventes flash a moins 15%.

Pour le secteur du neuf, nous voyons déjà quelques offres alléchantes de promoteurs fleurir ainsi que des réaménagements de leurs offres, réétudiées et mieux présentées sans qu’il n’y ait de baisse réelle. Pour rappel, la situation n’était pas au top le premier trimestre 2020 et les promoteurs avaient déjà fait des efforts sur leurs marges.

Le secteur des villas de luxe s’est maintenu avec quelques ventes réalisées par Capital foncier pendant le Covid et ce parce que les prix avaient déjà baissé sur le prix des terrains d’environ 20%.

Le secteur du locatif s’est maintenu pour le résidentiel et la demande en villas à louer est très forte et nous constatons une demande placée pour environ 100 unités chez Capital foncier dès à présent et qui se renforcera dès l’ouverture des frontières.

 

– Dans le cadre de la politique de relance, quelle mesure proposez-vous afin de redynamiser la demande ?

Définitivement, augmenter le pouvoir d’achat en réduisant le coût du crédit et BAM a déjà annoncé la baisse du taux directeur, en espérant que cela se reflète dans une baisse des taux pour l’immobilier et  ensuite libérer le référentiel qui bloque les transactions inférieures au référentiel et ensuite de manière générale se focaliser sur la création d’emplois et la relance industrielle du Maroc.

Pourquoi l’AUDA se focalise sur des immeubles de luxe chers sur 350 hectares, pourquoi ne pas faire d’autres gammes de prix pour permettre une mixité entre le luxe et le moyen standing et donner un vrai nouveau souffle a la Casablanca et en même temps donner sa chance a ce projet structurant mais élitiste et qui mettra plus de dix ans a décoller si il se limite a une population cible dont la profondeur de marché est limitée.

On pourrait avoir une offre à partir de 700 000 DH pour des ménages à l’aéroport d’Anfa !  C’est une décision de l’aménageur public de baisser son prix.

Il y au d’autres « poches » immobilières a Casa que l’administration pourrait mettre a profit pour avoir une offre en adéquation avec les budgets des ménages.

 

– Cette conjoncture aura-t-elle pour effet de redistribuer les cartes au sein du secteur immobilier ?

Pendant le Covid, Capital foncier a été contacté par plusieurs promoteurs qui souhaitaient continuer à investir. Donc, oui il y aura des promoteurs qui vont disparaître, certains vont survivre portés par les banques et d’autres opérateurs prendront le lead. Je précise que les promoteurs qui se portent bien ne le sont par hasard, ce sont ceux qui ont privilégié la qualité, le respect des délais et qui n’ont pas plombé leurs bilans par trop d’acquisitions financées par les banques.

Les banques seront obligées de passer par le système des dations, qui consiste à récupérer des terrains pour effacer les dettes des promoteurs.

 

– Ces transformations auront-elles un impact sur les prix ? Pourra-t-on enfin voir une corrélation avec le niveau de la demande ?

C’est un vaste sujet et je vois mal les prix des appartements baisser au point de rattraper le niveau de vie des ménages. Le coût de la vie à Casablanca entre les écoles privées, la Lydec , la santé et les courses est comparable a un coût de vie européen où les ménages bénéficient de la gratuite des soins, de l’éducation et de nombreuses aides.

L’immobilier ne peut pas baisser assez pour rattraper le vrai besoin des Marocains, c’est le pouvoir d’achat qui doit se mettre à niveau.

 

– Avant la crise du covid-19, l’affaire Bab Darna avait défrayé la chronique et l’image du secteur immobilier a été fortement impactée, que préconisez-vous pour que les acquéreurs regagnent la confiance ?

Effectivement, Bab Darna  c’est le mauvais élève qui punit toute la classe et d’autres scandales sont à venir.

Les promoteurs ne sont pas ravis d’êtres assimilés a ces pratiques, aussi doivent-ils faire preuve de transparence, communiquer sur leur solidité financière, présenter le dossier d’autorisation aux acquéreurs, gérer leurs doléances.

Ceci-dit les gros promoteurs de la place n’ont jamais lâché personne.

Certains promoteurs de moyenne taille ont toujours fait de la confiance et de la relation client leur cheval de bataille.

La confiance se construit, se mérite, si certains ne la méritent pas, ils disparaitront.

Un conseil que je donne : le concept de marketing de chantier qui consiste à visiter le chantier pour constater si il est correctement approvisionné et si les équipes de travail sont en nombre suffisant. Cet indicateur en dit long sur la capacité du promoteur à rebondir et sur la confiance que placent en lui ses propres partenaires et fournisseurs.

Malgré tous les efforts, certains promoteurs disparaîtront et les meilleurs se développeront, et ceci pour le bien des acquéreurs.

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